Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

chirurgie (suite)

Quelques grands chirurgiens


Guy de Chauliac

(né à Chauliac, dans le Gévaudan, entre 1290 et 1300 - † v. 1370). Il était le fils de pauvres cultivateurs. Il étudia à Toulouse, à Montpellier, à Bologne et à Paris. Protégé des papes Clément VI, Innocent VI et Urbain V, il vécut à la cour de Villeneuve-lès-Avignon et laissa un grand livre : Inventaire ou Grande Chirurgie.

« Il faut, dit-il, qu’il [le chirurgien] entende les choses naturelles, principalement l’anatomie car sans elle il n’y a rien de fait en la chirurgie. »

Il étudia l’inflammation, les furoncles, l’incision des abcès, décrivit l’hydrocèle, l’œdème. Il recommanda dans les fractures la suspension du membre et l’extension par poulies et poids.


Joseph Desault

(Vouhenans, près de Lure, Franche-Comté, 1738 - Paris 1795). Né d’une famille de pauvres paysans, il fit une brillante carrière chirurgicale. Venu à Paris en 1769, il eut des débuts difficiles, mais la protection de Louis XV et de La Martinière lui permit d’être agréé au Collège des chirurgiens, puis à l’Académie de chirurgie en 1776. Il fut successivement le chirurgien de l’Hospice des écoles (1776-1782), de la Charité (1782-1785), puis de l’Hôtel-Dieu en 1785. C’est là qu’il vécut la Révolution. Inquiété, bien qu’il se tint à l’écart d’activité politique, il fut arrêté, relâché, puis nommé professeur de clinique lorsque la Révolution s’aperçut que la France avait besoin de médecins et qu’il fallait instruire les étudiants. Il fut commis pour examiner le Dauphin, emprisonné au Temple ; ses déclarations furent diversement interprétées quant à la personnalité du prisonnier : fils de Louis XVI ou enfant substitué ?


Guillaume Dupuytren

(Pierre-Buffière, Limousin, 1777 - Paris 1835). Il vint très jeune à Paris, où il fit rapidement carrière. Prosecteur à 18 ans, professeur de médecine opératoire à 35 ans, il fut chirurgien en chef de l’Hôtel-Dieu (1815) et membre de l’Académie des sciences (1825). Ses travaux ont porté sur de nombreux chapitres de pathologie externe : la résection du maxillaire inférieur, la ténotomie du sterno-cléïdo-mastoïdien dans le torticolis, la ligature de l’artère sous-clavière, celle de l’artère iliaque externe, la description d’un ingénieux instrument destiné à la cure par écrasement des anus contre nature, l’entérotomie qui porte son nom. Appelé auprès du duc de Berry, victime d’un attentat à l’Opéra, dans la nuit du 13 au 14 février 1820, il rédigea pour la Chambre des pairs un rapport circonstancié, « modèle de convenance, de point et de style », dit Larrey. Avec Bichat et Laennec, Dupuytren fut véritablement à la base de la méthode anatomo-clinique qui devait, pour 150 ans, constituer le fondement des connaissances et de l’enseignement médico-chirurgical.


Érasistrate

(île de Céos v. 330 av. J.-C. - Asie Mineure v. 280 av. J.-C.). Il écrivit de nombreux livres qui ne nous sont pas parvenus. Ce que nous savons de son œuvre, nous le devons à Celse. Il aurait pratiqué des laparotomies.


Hérophile

(né en Bithynie vers 335 av. J.-C.). Il étudia l’anatomie, en particulier celle du système nerveux, et décrivit le confluent veineux qui porte son nom ; il pratiqua les accouchements et découvrit la valeur du pouls. Véritable savant, il fit école et eut de nombreux élèves.


John Hunter

(Long Calderwood, Lanarkshire, 1728 - Londres 1793). Issu d’une famille de médecins et frère de William Hunter (1718-1783), anatomiste, il est le créateur de la pathologie expérimentale en Angleterre. Il ouvrit des cours d’anatomie et de chirurgie à Londres, et créa un riche musée de pièces anatomiques. Il étudia notamment les chancres et les maladies des vaisseaux et des capillaires. La gouttière fibreuse de l’artère fémorale porte son nom.


François Gigot de La Peyronie

(Montpellier 1678 - Versailles 1747). Il obtint de Louis XV la création de l’Académie de chirurgie (1731) et les lettres royaux (1743) qui donnaient aux chirurgiens les mêmes privilèges qu’aux régents et docteurs en médecine et les séparaient ainsi des barbiers.


Dominique Jean Larrey

(Beaudéan, près de Bagnères-de-Bigorre, 1766 - Lyon 1842). Il fut successivement chirurgien de l’armée du Rhin, de l’armée d’Égypte et de la Grande Armée. Il créa les ambulances volantes et régla l’évacuation des blessés. Payant partout de sa personne, le baron Larrey avait acquis une renommée considérable parmi les troupes et fut honoré de la confiance de l’Empereur.


Joseph François Malgaigne

(Charmes 1806 - Paris 1865). Grand érudit, il fut le premier chirurgien à établir des statistiques. Frappé des mauvais résultats qu’il avait obtenus de ses amputations au cours de la campagne de Pologne (1830), Malgaigne, revenu à Paris, se livra à une étude sur les résultats des opérations dans les hôpitaux de Paris : de 15 trépanés, pas un n’avait survécu ; la kélotomie (section de la bride qui provoque la hernie étranglée) ne sauvait pas beaucoup plus d’un tiers des opérés (87 sur 200) ; la taille (ouverture de la vessie pour extraire la pierre) n’en guérissait que 3 sur 5 ; on perdait 6 amputés de cuisse sur 10, plus de la moitié des amputés de jambe, presque la moitié des amputés de bras, et il n’était pas jusqu’aux amputations de doigts et d’orteils qui n’accusaient près de 10 p. 100 de mortalité.


Henri de Mondeville ou d’Hermondaville,

chirurgien du roi Philippe IV le Bel. Il suivit celui-ci en Flandre en 1301. Il enseigna à Montpellier (1304) et à Paris (1306). La Chirurgie de maître Henri de Mondeville a été composée de 1306 à 1320. L’auteur termine un long plaidoyer en faveur de la chirurgie par cette péroraison : « Vous autres, chirurgiens, si vous avez opéré consciencieusement chez les riches et pour un salaire convenable, et chez les pauvres par charité, vous ne devez craindre ni le feu, ni la pluie, ni le vent. »


Ambroise Paré

(Bourg-Hersent, près de Laval, v. 1509-1516 - Paris 1590). Fils d’un coffretier, employé chez un barbier à Laval à 15 ans, il fait le poil, prépare les perruques, passe le fer, panse quelques ulcères, des clous, des anthrax. Après Laval, ce sera Angers, où l’apprenti barbier, venu à dos d’âne, tient de nouveau le rasoir et se familiarise un peu mieux avec les onguents, emplâtres et saignées. Ambroise s’instruit seul, lit avidement et rêve d’aller à Paris voir des maîtres et se mesurer avec les meilleurs écoliers. C’est en 1532 ou 1533 qu’il arrive à Paris et loge rue de la Huchette. Pour vivre, il s’engage de nouveau chez un barbier. Mais il étudie et va rue de la Bûcherie écouter « les leçons de médecine faites par un professeur en robe rouge qui commente Galien, ou dirige la dissection d’un cadavre faite par un prosecteur. Les étudiants en médecine, en robe aussi, ne cachaient pas leur mépris pour les apprentis barbiers-chirurgiens et riaient de leurs pourpoints crasseux » (H. Mondor). Bientôt, Ambroise a le désir d’œuvrer lui-même, d’opérer des blessés. Plus tard, il dira : « Ce n’est rien de feuilleter des livres, de gazouiller et de caqueter en chaire de la chirurgie, si la main ne met en usage ce que la raison ordonne. » Il choisit pour ce faire l’Hôtel-Dieu et s’en félicita longtemps : « Faut savoir que pendant trois ans j’ai résidé en l’Hôtel-Dieu de Paris où j’ai eu la possibilité de voir et de connaître — à cause de la grande diversité des malades y gisant ordinairement — tout ce qui peut être altération et maladie du corps humain ; et aussi y apprendre sur une infinité de corps morts tout ce qui peut se dire et considérer sur l’anatomie, ainsi que je l’ai prouvé suffisamment et publiquement à Paris aux écoles de Médecine. » (H. Mondor.)