Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Chien (suite)

Avoir un Chien

Avoir un Chien, c’est être décidé non seulement à le nourrir et à le loger convenablement, mais aussi à le rendre heureux. Sa vie est plus courte que la nôtre : un Chien de 21 ans — certains Caniches atteignent cet âge — équivaut à un centenaire humain.

Avoir un Chien présuppose que l’on sait pourquoi on en veut un. Si c’est pour chasser, on sait à peu près où et quoi et l’on choisit en conséquence le grand Setter irlandais pour la plaine ou le petit Cocker pour la Bécasse. Si l’on veut faire garder sa maison, on sait quels sont les bons gardiens : Bergers allemands, Groenendael, Dogue allemand, Dogue du Tibet — si on en trouve —, ou simplement un « avertisseur » sonore comme tant de petits Chiens, ou un Airedale tout en mâchoires d’acier. Si l’on veut un ami de tous les jours, on pensera à la place dont on dispose, en sachant qu’un Chien n’est pas un Chat et qu’on doit le sortir au moins trois fois par jour. La muselière est à proscrire, sauf obligation légale (épidémie de rage). Le Chien est un Carnivore, certes, mais on doit lui donner, aussi, des légumes et des fruits cuits, des biscuits spéciaux, du riz, des pâtes, un os de veau de temps en temps, des vitamines et de l’eau propre et fraîche à volonté. Il ne peut être question ici du dressage au sens étendu du mot (« bon Chien chasse de race »), mais un peu d’entraînement est indispensable, beaucoup plus pour les Chiens de travail, qui ont un métier à apprendre.

Les Chiens sont sujets à de nombreuses maladies. La plus redoutable, celle qui tue le plus ou qui laisse des sujets irrémédiablement tarés, c’est la maladie de Carré, ou plutôt les maladies de Carré, qui associent trois ou quatre virus. Le vaccin, dès l’âge de deux mois et demi, quand le chiot n’est plus protégé par les antidotes du lait maternel, devrait être obligatoire, administré en deux fois par un vétérinaire. La maladie de Carré sévit partout ; le virus est sur le trottoir de toutes les villes, sur toutes les routes, et guette tous les Chiens non prémunis, s’il est indifférent à l’Homme. D’autres maladies graves affectent les Chiens, jeunes ou moins jeunes. Les signes extérieurs en sont toujours à peu près les mêmes : les yeux coulent, l’appétit s’éteint, la diarrhée et la fièvre s’installent, le poil perd son brillant, le Chien tousse, le ventre se creuse, les yeux sont tristes. Il faut alors voir le plus vite possible le vétérinaire.

R. R. W. et H. F.

➙ Carnivores / Domestication.

 A. C. A. Lebeau, Élevage et médecine du chien (Vigot, 1948 ; 3e éd., 1966). / K. Lorenz, So kam der Mensch auf den Hund (Vienne, 1950 ; trad. fr. Tous les chiens, tous les chats, Flammarion, 1970). / F. Méry, les Chiens de chasse (Payot, 1951) ; le Chien, son mystère (Laffont, 1968). / E. Dechambre, les Chiens (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1952 ; 3e éd., 1971). / E. Dechambre, R. de Kermadec et M. Luquet, Encyclopédie canine Prisma (Éd. Prisma, 1955). / E. Dechambre et R. Pécriaux, De la psychologie du chien (Libr. des Champs-Élysées, 1958). / F. Méry (sous la dir. de), le Chien (Larousse, 1959). / P. Groulade, Clinique canine (Maloine, 1965-1967 ; 2 vol.). / Y. Pincemin, Morphologie et esthétique canine (Vigot, 1965). / J.-L. de Waziers, Chiens d’aujourd’hui. Élevage et dressage (Flammarion, 1967). / A. Jeannin, Encyclopédie du chien (la Palatine, 1968). / A. Fatio, Manuel pratique d’éducation et de dressage du chien (Payot, 1970). / Encyclopédie du chien (trad. de l’italien, Denoël, 1972 ; 2 vol.). / P. Rousselet-Blanc (sous la dir. de), Larousse du chien (Larousse, 1974). / F. Méry, Avoir un chien (Denoël, 1976).

chī‘isme

Système religieux des chī‘ites.



Le grand schisme politique de l’islām

Le chī‘isme (ou chiisme) est, sans calembour, le grand schisme de l’islām. Il a sa racine dans des rivalités politiques remontant aux origines et s’accompagnant de tendances divergentes. Le parti politico-religieux qui prit pour guide ‘Alī, cousin et gendre de Mahomet, se raidit dans l’opposition aux tendances dominantes de l’islām, se constitua en groupes organisés, qui eurent une histoire agitée, fertile en révoltes et en luttes, avec des scissions constantes. Les chī‘ites obtinrent parfois le pouvoir. Au début du xvie s., une tendance chī‘ite centriste devint la doctrine officielle de l’État persan.

Dans les luttes politiques acharnées qui suivirent la mort de Mahomet (632), beaucoup de mécontents se rallièrent à ‘Alī, mari de Fāṭima, fille du Prophète. ‘Alī, écarté des responsabilités politiques, paraissait le symbole de la fidélité aux principes de la nouvelle foi, à la communauté théoriquement égalitaire des croyants en face des gouvernants contaminés par l’opportunisme, entourés de ralliés tardifs intéressés surtout par le développement du nouvel empire arabe. ‘Alī, arrivé au pouvoir en 656 dans des circonstances troubles, fit la preuve de son manque de sens politique et de sa maladresse. Après son assassinat en 661, son fils Ḥasan abandonna la lutte contre son principal adversaire, Mu‘āwiyya, fondateur de la dynastie des Omeyyades, moyennant une forte somme. Ḥusayn, le second fils d’‘Alī, ayant pris les armes plus tard, fut tué avec les siens à Karbalā’, en Iraq (680), par les troupes de Yazīd, fils et successeur de Mu‘āwiyya.

Munie ainsi d’un martyr, une fraction importante de l’opposition au régime omeyyade resta fidèle au « parti » (en arabe chī‘a, d’où chī‘isme et chī‘ite) de la famille du Prophète qui appliquerait strictement les lois d’une société musulmane pieuse et juste. Le premier mouvement chī‘ite important, celui de Mukhtār à Kūfa en Iraq (685-687), fit appel aux « clients » non arabes et aux pauvres, défavorisés de la société omeyyade. La chī‘a, par la suite, sut mobiliser tous les mécontentements sociaux et nationaux, formant tout un milieu sans frontières nettes qui, hésitant entre plusieurs prétendants, se tournait vers la Famille pour restaurer le règne de la Loi et de la justice. De ce milieu émana le groupe politique qui réussit en 750 la révolution ‘abbāsside, portant au pouvoir, à la place des Omeyyades, des califes descendants de ‘Abbās, oncle du Prophète. Déçue par les ‘Abbāssides, la plus grande partie de la chī‘a persista dans une opposition sourde ou militante, suscitant de multiples révoltes. La répression fit de nombreux martyrs, qui renforcèrent la foi chī‘ite. Les sympathisants et les complices camouflés étaient nombreux parmi les fonctionnaires même du pouvoir.