Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Chénier (André) (suite)

Né « Français dans le sein de Byzance », toute sa vie amoureux de la Grèce, à laquelle il croyait par sa mère appartenir, André Chénier quitte le collège de Navarre (1773-1781) pour un bref séjour à l’armée (1782), puis partage son existence entre la vie du monde et les joies de studieuses méditations, composant des Bucoliques et des Élégies. Le charme mélancolique de ses vers soigneusement ciselés est autre chose qu’un jeu poétique : leur simplicité même, qui allie le sens du plastique à une science très sûre de l’harmonie, trouve son expression la plus achevée dans des idylles comme « l’Aveugle », « le Mendiant », « le Malade », « la Liberté ». S’il y a parfois chez lui les grâces conventionnelles d’un jeune homme qui s’essaie à l’art d’écrire, Chénier sait également traduire les élans d’un cœur sensuel et pudique. Notons l’absence de vraies couleurs au profit d’une lumière qui voudrait rivaliser avec celle du ciel hellénique. Lorsqu’il devient secrétaire d’ambassade à Londres (1787), où il souffre du dépaysement, Chénier songe à des projets plus vastes. Sera-t-il le Lucrèce de son temps, comme le laisse supposer l’Hermès, « sa plus belle espérance », mais aussi sa plus grande illusion, grandiose vision épique et rêve d’une poésie cosmique ? Œuvre toujours remise en question et jamais achevée, tout comme une autre, l’Amérique, l’Hermès aurait montré la puissance du souffle de son auteur. Mais une sorte d’hymne, l’Invention, véritable esquisse, à la fois didactique et lyrique, d’une poétique qui se cherche, aide à mieux comprendre les ambitions et les incertitudes du poète. « Audendum est », dit l’épigraphe.

En 1789, Chénier accueille avec enthousiasme les premiers signes de la Révolution, quitte à condamner deux ans plus tard les excès des Jacobins. Devenu suspect après le 10-Août, il erre de refuge en refuge, jusqu’au jour où il est arrêté (mars 1794) et incarcéré à Saint-Lazare pour avoir tenu « depuis le commencement de la Révolution une conduite incivique ». Outre les Odes, son emprisonnement nous vaut le déferlement des Iambes. Animé d’une fureur sacrée, Chénier fustige ses adversaires dans le martèlement de ses cadences où s’élèvent les cris de la révolte, tandis que la mort s’apprête à le saisir. Il est guillotiné deux jours avant la chute de Robespierre, ayant ainsi offert, au cours de sa trop brève existence, l’image d’un poète qui passa du culte de la beauté aux accents vengeurs de la satire et de la haine.

A. M.-B.

 P. Dimoff, la Vie et l’œuvre d’André Chénier (Droz, 1936 ; 2 vol.). / G. Walter, André Chénier, son milieu et son temps (R. Laffont, 1947). / J. Fabre, André Chénier, l’homme et l’œuvre (Hatier-Boivin, 1955 ; nouv. éd. 1966). / F. Scarfe, André Chénier, his Life and Work (Oxford, 1965). / G. d’Aubarède, André Chénier (Hachette, 1970).

chenille

Larve des Insectes Lépidoptères, stade précédant la chrysalide et le papillon. (On applique également ce nom à la larve de quelques Hyménoptères.)



Description

Corps cylindrique et annelé, courtes pattes, démarche ondulante : la grande majorité des chenilles répond à cette description sommaire. L’usage fait désigner certaines d’entre elles sous le nom impropre de Vers : ainsi en est-il du Ver à soie ou du Ver des pommes. Un examen minutieux révèle dans une chenille la morphologie caractéristique d’un Insecte. Protégée par une capsule rigide, la tête porte deux antennes réduites, six pièces buccales broyeuses et des ocelles latéraux généralement au nombre de douze. Sous le thorax, les trois paires de pattes à trois articles et une griffe terminale servent à la locomotion et à la préhension de la nourriture. Formé de dix anneaux, l’abdomen montre des appendices propres à la larve, les pattes membraneuses, ou fausses pattes, qui s’appliquent au support par une ventouse bordée de minuscules crochets ; leur présence détermine un mode de locomotion particulier, sorte de reptation accompagnée d’ondes qui parcourent le corps d’arrière en avant ; on compte habituellement cinq paires de fausses pattes, sous les segments abdominaux 3, 4, 5, 6 et 10. Sur les côtés du corps s’ouvrent les stigmates, une paire sur le prothorax et une sur chacun des sept premiers anneaux de l’abdomen.

Chez un certain nombre de familles, la morphologie de la chenille s’écarte sensiblement du type général. Ainsi, les larves de Lycénidés et des Limacodidés ont-elles un corps aplati rappelant celui d’un Cloporte ; celles des Microptérygidés possèdent des antennes allongées et huit paires de pattes abdominales ; les chenilles mineuses des Eriocraniidés sont pratiquement apodes ; chez les Géométridés, les pattes abdominales n’existent que sur les segments 6 et 10, et l’animal se déplace en prenant appui successivement sur ses pattes thoraciques et sur ses pattes postérieures, incurvant son corps de façon caractéristique (chenilles arpenteuses).

Même à la fin de leur vie larvaire, les chenilles des Microlépidoptères ne dépassent guère quelques millimètres de longueur ; à l’opposé, celles du Grand Paon de nuit (Saturnia pyri) atteignent 15 cm. Le tégument peut être nu et dépourvu d’aspérités ; chez les Attacidés, il porte des tubercules, et, chez les Sphingidés, le huitième anneau de l’abdomen montre un éperon dorsal. Le corps disparaît parfois sous un abondant revêtement de poils (« chenilles-ours » des Arctiidés) ; les poils qui couvrent les chenilles processionnaires provoquent une irritation pénible sur la peau humaine. On connaît des chenilles vivement colorées, comme celles du Bombyx à livrée (Malacosoma neustria), aux bandes longitudinales bleues et rouges, ou comme celles du Sphinx du Troène (Hyloicus ligustri). La couleur s’harmonise assez souvent avec celle du milieu ; on pense que la teinte verte de beaucoup de chenilles est en relation avec l’absorption de chlorophylle. Certaines arpenteuses simulent si bien des brindilles, tant par leur couleur que par leur maintien dans une immobilité parfaite, qu’il faut un regard particulièrement attentif pour les découvrir.