Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Charles Ier d’Anjou (suite)

 Sources. A. De Boüard, Actes et lettres de Charles Ier, roi de Sicile, concernant la France, 1257-1284 (Flammarion, 1926) ; Documents en français des Archives angevines de Naples (Règne de Charles Ier) [De Boccard, 1933-1935 ; 2 vol.].
A. de Saint-Priest, Histoire de la conquête de Naples par Charles d’Anjou, frère de Saint Louis (Amyot, 1847-48 ; 4 vol.). / L. Cadier, Essai sur l’administration du royaume de Sicile sous Charles Ier et Charles II d’Anjou (Thorin, 1891). / E. Jordan, les Origines de la domination angevine en Italie (A. Picard, 1910). / G. Lesage, Marseille angevine (De Boccard, 1950). / E. G. Léonard, les Angevins de Naples (P. U. F., 1954).

Charles XII

(Stockholm 1682 - Fredrikshald [auj. Halden] 1718), roi de Suède (1697-1718).



L’héritage

Lorsque Charles XII monte sur le trône, à quinze ans, il trouve à sa disposition un pouvoir quasi absolu qui lui a été préparé par son père, Charles XI (roi de 1660 à 1697), souverain prudent, mais énergique et efficace. C’est lui qui a forgé l’instrument politique et économique solide, l’absolutisme monarchique, grâce auquel son fils pourra entreprendre son projet : l’établissement de l’hégémonie de la Suède sur toute l’Europe du Nord.

La grande opération du règne de Charles XI, à partir de 1680, avait été de briser la haute noblesse politiquement et économiquement ; la politique dite « de réduction » devait permettre de récupérer au profit de la Couronne et de la paysannerie toutes les terres royales accaparées par la haute noblesse. Les conséquences avaient été considérables. La propriété avait été redistribuée, et les terres partagées en parts à peu près égales entre la Couronne, la noblesse et la paysannerie. Ces réductions avaient surtout atteint la grande noblesse ; quant à la moyenne, elle avait traversé la crise sans grand dommage. Les paysans, s’ils y avaient gagné la garantie de leurs droits politiques, n’en avaient pas vu pour autant leurs charges diminuées.

Mais le pouvoir royal n’avait pas limité son ambition à accroître ses ressources. Sur le plan politique, il avait obtenu du Riksdag (les États) le droit de légiférer sans entraves (1682). En fait, la Couronne avait retrouvé avec Charles XI le pouvoir absolu. Ses moyens financiers renforcés par la politique de « réduction », le roi avait entrepris de constituer une milice nationale solide en donnant à chaque soldat un bien foncier capable de l’aider à vivre. Les troupes étaient cantonnées autour de leurs officiers sur des terres royales, dont les paysans, exemptés d’autres impôts, devaient subvenir au reste de leur entretien.

Le roi avait reconstitué aussi une flotte et fondé en Blekinge un port militaire important, Karlskrona. À sa mort, en 1697, il léguait à son fils un pouvoir absolu et incontesté, des rouages administratifs et militaires excellents ainsi que des ressources financières très importantes.

L’éducation du jeune prince ne laissait rien à désirer, instruit qu’il avait été par les savants les plus distingués du pays dans l’histoire, la géographie, les mathématiques et les langues. Il savait 1 allemand, le français et le latin, et parmi ses lectures favorites figurait la Vie d’Alexandre (de Quinte-Curce), qu’il rêvera d’imiter. Son père, le jugeant trop jeune, avait confié le pouvoir à sa mère, Hedwige-Éléonore, la veuve de Charles X Gustave, jusqu’à sa majorité, fixée à dix-huit ans. Mais, impatient de régner, le jeune roi se faisait déclarer majeur par les États dès 1697.


De l’avènement à Narva

Il y a une énigme Charles XII, car ce prince n’a laissé aucun mémoire, aucun écrit qui permettrait de comprendre sa pensée et ses intentions en matière de politique étrangère. Il faut cependant remarquer qu’il n’a jamais déclaré la guerre et qu’au faîte de sa puissance il n’a pas cherché à s’emparer de nouvelles conquêtes ; il est vrai que les possessions extérieures de la Suède, surtout en Allemagne, comportaient déjà des risques suffisants d’éparpillement.

Aussi peut-on se demander — en dehors de la nécessité de se défendre contre ses voisins danois, russes ou polonais — quels étaient les buts réels du monarque en se lançant dans des expéditions lointaines et démesurées, et si son génie politique était à la hauteur de ses qualités de grand capitaine.

À l’avènement de Charles XII, la Suède possède la Finlande, la Carélie, l’Estonie, la Livonie et une partie de la Poméranie. Les duchés de Schleswig-Holstein, qui bloquent le Danemark au sud en fermant ses frontières méridionales, sont en même temps le chaînon qui unit la Suède à ses possessions allemandes de Poméranie. Dans ces conditions, on comprend la crainte du Danemark, entouré de tous côtés par le géant suédois. Aussi n’est-il pas difficile à un noble livonien, rebelle à la suite de la politique de « réduction », Johan Reinold Patkul (1660-1707), de fomenter une alliance entre le Danemark et la Saxe, dont le souverain est en même temps roi de Pologne et de Russie. Ces deux derniers pays songent à s’agrandir aux dépens de la Suède, ce qu’ils croient facile sous un monarque qu’ils jugent jeune et inexpérimenté.

À l’alliance conclue en novembre 1699, Charles XII répond aussitôt en janvier 1700 par une autre avec l’Angleterre et les Provinces-Unies. L’attitude de ces pays s’explique par leurs intérêts commerciaux. Leurs flottes, en effet, sont presque entièrement construites avec les matières premières importées de Suède. Ainsi, l’Angleterre absorbe la moitié des exportations suédoises. Elle en reçoit principalement le bois et 80 p. 100 de ses importations de fer et de goudron. Mais cette alliance politique restera précaire, car Anglais et Hollandais la subordonneront à la mesure exacte de leurs intérêts économiques.

C’est Frédéric IV, roi de Danemark (de 1699 à 1730), qui attaque le premier en envahissant les terres du duc de Holstein-Gottorp, allié et, de surcroît, beau-frère du roi de Suède, dont il a épousé une sieur : ainsi débute la guerre du Nord (1700-1721). En mai 1700, Charles XII s’embarque à Karlskrona avec une flotte de trente vaisseaux appuyée par une escadre anglo-hollandaise.