Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Charles VII le Victorieux (suite)

 Sources. Th. Basin, Histoire de Charles VII (Les Belles Lettres, 1934-1945 ; nouv. éd., 1964-65 ; 2 vol.). / Journal d’un bourgeois de Paris à la fin de la guerre de Cent Ans (Plon, 1963).
A. Vallet de Viriville, Histoire de Charles VII, roi de France, et de son époque, 1403-1461 (Renouard, 1862-1865 ; 3 vol.). / G. Du Fresne de Beaucourt, Histoire de Charles VII (t. I-IV, Librairie de la Soc. bibliographique ; t. V-VI, Picard, 1881-1891). / G. Dodu, les Valois. Histoire d’une maison royale, 1328-1589 (Hachette, 1934). / J. d’Avout, la Querelle des Armagnacs et des Bourguignons (Gallimard, 1943). / P. Jubault, D’Azincourt à Jeanne d’Arc, 1415-1430 (Impr. Moulet, Amiens, 1970). / P. Erlanger, Charles VII (Perrin, 1973).

Charles VIII

(Amboise 1470 - id. 1498), roi de France (1484-1498).


Fils de Louis XI et de Charlotte de Savoie, le jeune prince est élevé avec beaucoup de soin par les serviteurs de son père. Il est fiancé tour à tour à Marie de Bourgogne, qui épousera finalement Maximilien d’Autriche, puis à la fille de ce couple princier, Marguerite d’Autriche (1482), qui lui apporte en dot l’Artois et la Bourgogne et qu’il épouse le 22 juin 1483 à Amboise : le mariage ne sera pas consommé en raison du jeune âge de Charles. Placé à la mort de son père, le 30 août 1483, sous la tutelle de sa sœur aînée, Anne, et de l’époux de cette dernière, Pierre de Beaujeu, Charles VIII préside nominalement les états de Tours (janv.-mars 1484) et ceux de Rouen (avr.-mai 1484) avant d’être sacré à Reims les 30 et 31 mai suivants. Passionné de chasse et de guerre, il suit les armées qui combattent tant Maximilien d’Autriche (1486) que les féodaux révoltés en Guyenne (1487) et en Bretagne (1488).

Il fait pour la première fois acte d’autorité personnelle en signant avec le duc de Bretagne le traité de paix du Verger ou de Sablé le 20 août 1488, peu avant que ce dernier ne meure (9 sept.).

Lorsqu’il apprend la nouvelle du mariage, le 19 décembre 1490, d’Anne, héritière du duché de Bretagne, avec Maximilien d’Autriche, veuf de Marie de Bourgogne depuis le 27 mars 1482, il vient assiéger Rennes, qu’il occupe le 15 novembre 1491 ; il épouse alors la jeune Anne à Langeais le 6 décembre 1491, les époux se cédant mutuellement leurs droits sur le duché. Écartant dès lors progressivement les Beaujeu, il amorce son règne personnel avec l’aide de ses conseillers Étienne de Vesc, le sire de Miolans, l’amiral Mallet de Graville, l’évêque de Saint-Malo Guillaume Briçonnet, Michel Gaillard et même Louis d’Orléans, qu’il a libéré contre l’avis d’Anne de Beaujeu le 28 juin 1491.

Sa situation est alors difficile. En provoquant la rupture des mariages non encore consommés entre Charles VIII et Marguerite d’Autriche et entre Anne de Bretagne et l’empereur Maximilien d’Autriche, l’union du roi de France et de la duchesse de Bretagne a consolidé la formation d’une coalition antifrançaise, esquissée dès le 27 mars 1489 par le traité anglo-espagnol de Medina del Campo et nouée par le pacte à trois du 11 septembre 1490, en vertu duquel Anglais, Espagnols et Allemands sont alors intervenus en Bretagne.

Des concessions majeures désarment les adversaires de Charles VIII. Par le traité d’Étaples du 3 novembre 1492, Henri VII Tudor lève le siège de Boulogne qu’il a entrepris et accorde au roi de France sa neutralité bienveillante ; par celui de Barcelone du 3 janvier 1493, Ferdinand le Catholique récupère sans indemnité la Cerdagne et le Roussillon ; enfin, par la paix de Senlis du 23 mai 1413, Maximilien d’Autriche peut garder ses récentes conquêtes (Arras, Lens, Franche-Comté).

Ayant ainsi assuré à son royaume vingt ans de sécurité, le roi de France se consacre, avec l’appui des succursales lyonnaises de banques italiennes, à sa grande « entreprise » : l’aventure napolitaine. Charles VIII est désireux de faire valoir les droits dont lui-même et son père ont hérité sur le royaume de Naples à la mort de Charles II du Maine (1481) ; il répond à l’appel de Ludovic le More, régent du duché de Milan, qui cherche à garantir son usurpation contre le roi de Naples, père du beau-père de son neveu Giangaleazzo Maria Sforza. Encouragé par la mort du roi Ferdinand de Naples le 25 janvier 1494, il occupe Turin le 5 septembre, Florence, Rome et finalement Naples le 22 février 1495.

Il entreprend aussitôt d’organiser son nouveau royaume, mais il craint de ne pouvoir regagner la France du fait de la constitution, le 31 mars, de la ligue de Venise, animée par Ferdinand le Catholique et même par Ludovic le More, et comprenant notamment Venise, Florence, le pape et Maximilien d’Autriche. Il quitte Naples le 20 mai, bouscule l’armée adverse à Fornoue le 6 juillet, contraint Ludovic le More à signer la paix de Verceil le 9 octobre et reprend la route d’Amboise, où il installe aussitôt quelques architectes italiens.

Pendant ce temps, les Aragonais ont réoccupé le royaume de Naples, que Charles VIII songe aussitôt à reconquérir. Aussi conclut-il avec le roi d’Aragon un traité de partage de l’Italie à Alcalá de Henares le 25 novembre 1497. Mais s’étant heurté la tête contre un échafaudage au château d’Amboise le 7 avril 1498, il meurt neuf heures plus tard, laissant à son cousin et héritier Louis d’Orléans, devenu Louis XII, un royaume au sein duquel le gouvernement s’est encore fortifié notamment avec la naissance officielle, en 1497, du « Grand Conseil », section du Conseil du roi, spécialisé dans le jugement des causes réservées au souverain.

La régence des Beaujeu (1483-1491)

Anne de France (1461 - Chantelle 1522), fille de Louis XI, avait épousé en 1474 Pierre II de Bourbon, sire de Beaujeu (1438 - Moulins 1503), auquel Louis XI avait confié la lieutenance générale du royaume dès 1482. Énergiques mais souples, les deux époux gouvernèrent conjointement le royaume pendant la minorité de Charles VIII, selon la volonté du souverain défunt, mais sans le titre de régent. Contraints d’accepter la formation d’un conseil où entrèrent les princes du sang (Louis, duc d’Orléans ; François, comte de Dunois ; Jean II le Bon, duc de Bourbon, aussitôt nommé connétable ; etc.), obligés de sacrifier quelques-uns des conseillers de Louis XI, tel Olivier Le Dain, pendu au gibet de Montfaucon sur ordre du parlement, les Beaujeu acceptèrent de réunir les états généraux de Tours entre le 5 janvier et le 14 mars 1484. Marqués par le discours du grand sénéchal de Bourgogne Philippe Pot, ces derniers permirent à Pierre de Beaujeu de garder la présidence du Conseil du roi sans concession majeure en matière fiscale. Mécontent, le duc Louis d’Orléans se révolta en janvier 1485 au nom du « bien public », mais, malgré l’aide du duc François II de Bretagne, la « guerre folle » n’eut qu’un seul résultat : la chute, le 19 juillet 1485, du trésorier du duc de Bretagne, Pierre Landois, qui servait en fait les intérêts du duc d’Orléans. Déçu, ce dernier recommença la guerre ; il fut finalement vaincu et fait prisonnier à Saint-Aubin-du-Cormier (1488). Ainsi, les Beaujeu avaient-ils assuré la victoire de la monarchie aux dépens des derniers grands vassaux, victoire que concrétisa le mariage d’Anne de Bretagne avec Charles VIII.

P. T.

➙ Bretagne / Italie (guerres d’) / Louis XI / Louis XII / Valois.