Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

censure (suite)

Le contrôle « a posteriori » sur les moyens d’expression

Conséquence des nécessités du maintien de l’ordre public, il est exercé par les autorités revêtues de pouvoirs de police générale : gouvernement, préfets, maires, qui peuvent prendre des mesures d’interdiction ou de saisie en raison de troubles apportés à l’ordre public. Ces interdictions sont toujours susceptibles d’un recours pour excès de pouvoir devant les tribunaux administratifs, mais, multiformes et conjoncturelles, les mesures de police de cet ordre constituent toutes des cas d’espèce, dont l’appréciation du bien-fondé est souvent délicate, et ne peuvent, par ailleurs, être soumises à des normes rigides sans perdre de leur efficacité.

La censure se révèle ainsi un phénomène difficile à délimiter dans sa nature et dans son étendue, d’autant qu’une définition de la censure serait bien incomplète si l’on ne mentionnait pas la censure exercée au moyen de pressions indirectes et sa conséquence, l’autocensure, pratiquée par ceux qui sont soumis à ces pressions. Ces formes ne relèvent évidemment plus de la notion juridique de censure, bien que leurs effet soient semblables, sinon plus contraignants.

Th. M.

 F. Terrou et L. Solal, le Droit de l’information (Unesco, 1952). / M. Garçon, Plaidoyer contre la censure (J.-J. Pauvert, 1963). / L. Gabriel-Robinet, la Censure (Hachette, 1965). / Censure et liberté d’expression (Desclée De Brouwer, 1970).

Cent Ans (guerre de)

Conflit qui mobilisa, de manière discontinue, toutes les forces des royaumes de France et d’Angleterre pendant plus d’un siècle (1337-1453) et qui prit le relais de celui qui avait opposé les Plantagenêts aux Capétiens dans un cadre déjà séculaire depuis l’avènement d’Henri II au trône d’Angleterre en 1154 jusqu’à la signature du traité de Paris entre Louis IX et Henri III, en 1259.


Ne couvrant théoriquement que la période qui commence avec la confiscation de la Guyenne par Philippe VI de Valois (1337) et qui s’achève par la reconquête définitive de Bordeaux par Charles VII le 19 octobre 1453, la « seconde » guerre dite « de Cent Ans » pourrait tout aussi bien être qualifiée de « biséculaire », sinon même de « triséculaire » puisque sa plus lointaine manifestation en est la première confiscation de la Guyenne prononcée par Philippe IV le Bel en 1294, et puisque ses dernières traces ne seront effacées que par la trêve de Picquigny conclue par Louis XI et Édouard IV le 29 août 1475, et par la reconquête par surprise de Calais par François de Guise le 6 janvier 1558.


Les origines


La querelle féodale

Querelle féodale bientôt doublée d’un conflit dynastique dégénérant finalement en guerre nationale, la guerre de Cent Ans a pour origine première la volonté des rois d’Angleterre de transformer leur fief de Guyenne en alleu dans le double but de se soustraire à la pratique de l’hommage, humiliante pour leur dignité royale, et d’ôter aux rois de France et à leurs agents toute possibilité légale d’intervention notamment par évocation des causes judiciaires devant leurs tribunaux. Combattue par les rois de France désireux au contraire d’achever la reconquête de l’empire continental des Plantagenêts par la réintégration de la Guyenne* (et du Ponthieu) dans le domaine royal, cette politique eut pour conséquences les deux premières guerres de Guyenne (1294-1297/1303 ; 1324-1327), qui, commencées également par la prononciation de la commise des fiefs d’Édouard Ier et d’Édouard II, aboutirent à la restitution à ces souverains de leurs derniers fiefs continentaux, celui de Guyenne surtout, auquel ils étaient particulièrement attachés en raison de son importance démographique (400 000 âmes) et surtout économique (production de 800 000 hl de vin en moyenne).


Le conflit dynastique

Or, la mort de Charles IV le Bel sans héritier mâle en 1328 offre justement à Édouard III la possibilité de tenir en toute indépendance ses possessions continentales en lui permettant non seulement de contester la légitimité du nouveau roi de France Philippe VI de Valois, mais aussi de revendiquer pour lui-même l’héritage des Capétiens.

Depuis 1316, en effet, la transmission de la couronne royale s’était faite dans cette famille sans tenir compte des droits légitimes des filles de Louis X le Hutin et de Philippe V le Long, qu’aucune disposition juridique n’écartait du trône. D’ailleurs, des incidents avaient marqué le couronnement à Reims de Philippe V le Long le 9 janvier 1317, couronnement auquel étaient opposés les partisans de Jeanne II de Navarre, fille de Louis X le Hutin. Aussi avait-il fallu réunir dans la capitale une assemblée de nobles, de clercs, de bourgeois et d’universitaires parisiens qui approuva l’avènement du nouveau souverain et justifia par avance l’accession au trône, en 1322, de son jeune frère Charles IV le Bel, qui eut lieu sans aucun incident. Par là se trouva fixée dans les faits mais non dans le droit la règle qui excluait les femmes de la couronne de France et assurait sa transmission au plus proche héritier mâle par le sang du souverain défunt, sans qu’il ait été jamais nécessaire de recourir à une prétendue loi salique qui ne sera évoquée qu’à partir du règne de Charles V pour justifier a posteriori l’avènement des Valois en 1328.

Pourtant, les événements de 1316 et de 1322 n’avaient pas entièrement résolu le problème de la succession monarchique, car, dans les deux cas, les filles des souverains défunts écartées du trône n’avaient pas de fils. Or, leur inaptitude à assumer la dignité royale n’entraînait pas ipso facto leur inaptitude à la transmettre. En était-il ainsi en 1328 d’Isabelle de France, fille de Philippe IV le Bel, sœur de Charles IV le Bel, mais aussi mère du roi d’Angleterre Édouard III, dont se trouvait par là même justifiée la candidature au trône de France concurremment avec celles des cousins germains du souverain défunt, Philippe de Valois et Philippe d’Evreux ? Ayant écarté ce dernier prince en raison de sa jeunesse relative et de son manque d’ambition, ayant refusé la couronne à Édouard sous le prétexte de l’inaptitude des femmes à la transmettre à leurs descendants mâles, ce qui revenait à poser un principe nouveau en matière de droit successoral monarchique, une nouvelle assemblée, composée exclusivement de barons et de prélats réunis à Paris, porta son choix sur le second de ces princes, fondateur de la dynastie de Valois. Sous le nom de Philippe VI, celui-ci devait être couronné à Reims le 29 mai 1328, et, malgré quelques protestations de pure forme mais non dénuées de valeur juridique, Édouard III se résignait à lui prêter hommage à Amiens le 6 juin 1329 et à reconnaître ledit hommage comme « lige » par des lettres patentes munies du grand sceau d’Angleterre le 30 mars 1331.