Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

catholicisme (suite)

L’Église prolonge de son corps mystique l’œuvre du Christ

L’assemblée des fidèles, que le baptême rassemble dans l’Église, est une continuation de la vie du Christ ; chaque chrétien, pour sa part, peut et doit prolonger le Christ. L’Église non seulement prolonge, mais achève et complète la mission de son chef suivant l’enseignement de l’apôtre Paul : « L’Église, affirme-t-il, est le corps du Christ, la plénitude de Celui qui est complété par tous pour toutes choses. »

Le Christ historique est aussi un Christ mystique, tête d’un corps qui s’étend dans l’espace comme dans le temps. Pour saint Jérôme, « il faut que le Christ prolonge ses mystères dans l’âme de ses fidèles pour que l’histoire du Christ arrive à toute sa vérité », et un mystique du xviie s. pourra écrire : « La fête de tous les saints me paraît plus grande, en quelque manière, que celles de Pâques ou de l’Ascension, car c’est ce mystère qui rend Notre Seigneur parfait ; Jésus-Christ, comme chef, n’est pas parfait ni accompli s’il n’est uni à tous ses membres qui sont tous les saints ensemble. »

La communion des saints n’est qu’un aspect du corps mystique. Comme tous les membres d’un corps sont unis entre eux vitalement et organiquement, grâce à sa propre vie que le Christ leur communique, les chrétiens sont unis entre eux par un lien essentiel et profond. L’ordre nouveau ainsi instauré par le Christ et destiné à réaliser l’unité de tous les hommes n’est autre que l’Église. C’est en réunissant les hommes à son corps ressuscité, son corps spirituel, comme les membres d’un même corps à leur tête, que le Verbe leur permet de s’unir les uns aux autres. Saint Paul parle de « l’Église qui est son corps ».

Aussi l’Église constituée essentiellement par une personne vivante, le Fils de Dieu fait homme, est-elle assurée de l’éternité, de ne pas périr selon la promesse qui lui a été faite par son fondateur lui-même. C’est donc à une Église que le Christ a confié cette mission de parachever son corps mystique, et plus particulièrement à ceux qui devront continuer dans la suite des temps son action sanctifiante, dirigeante et enseignante, c’est-à-dire aux douze apôtres et à leurs successeurs, qui constituent ce que l’on nomme la hiérarchie ecclésiastique.

L’Église est un moyen de communication avec Dieu ; toute sa mission est de relier les hommes à Dieu dans le Christ et par lui. Pour pouvoir mener jusqu’au bout la tâche qui lui est confiée, la hiérarchie a été gratifiée de trois pouvoirs : celui d’enseignement, le magistère, celui d’ordre et celui de juridiction.

Par le pouvoir du magistère, l’Église est chargée de conserver les vérités de la foi, de les enseigner, de les approfondir et d’empêcher les hommes de s’en écarter. Le fondement scripturaire se trouve dans l’Evangile de Matthieu : « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur terre, allez donc, enseignez toutes les nations. »

Quant au pouvoir d’ordre, c’est celui, spécifiquement sacerdotal et pontifical, qui a pour but de sanctifier les hommes par les sacrements, lesquels sont administrés par la hiérarchie ecclésiastique qui possède la plénitude du sacerdoce, en ce sens que seuls les évêques peuvent transmettre ce pouvoir à d’autres, à la différence des simples prêtres, soit dans sa totalité en sacrant d’autres évêques, soit en partie seulement en ordonnant de simples prêtres.

Le pouvoir de juridiction, lui, est un pouvoir d’autorité qui habilite à gouverner les baptisés pour leur faire observer les commandements du Christ et de l’Église ; c’est l’essentiel du ministère pastoral, qui se fonde sur le précepte évangélique : « Pais mes agneaux, pais mes brebis. » Ce précepte s’adresse d’ailleurs à Pierre, et c’est dans la dépendance de ce dernier et de ses successeurs, les souverains pontifes, que les évêques exercent ce pouvoir.


La morale

Mais le nouvel ordre chrétien ne peut s’instaurer sur le seul plan religieux. Il y faut ajouter le plan moral. Y adhérer seulement par la foi, les sacrements, la soumission à l’Église ne peut suffire. Le Christ a demandé à ses disciples d’apprendre aux croyants à observer tout ce qu’il leur a prescrit. Une transformation morale est donc nécessaire, il est indispensable de revêtir l’« homme nouveau » défini par saint Paul : « Vous avez été instruit à vous dépouiller, en ce qui concerne votre vie passée, du vieil homme corrompu par les convoitises trompeuses, pour vous renouveler, dans votre esprit et dans vos pensées, et revêtir l’homme nouveau, créé à l’image de Dieu dans une justice et une sainteté véritables. »

Le chrétien a un modèle éthique parfait en la personne du Christ, et la transformation morale consistera à s’identifier uniquement à lui en lui obéissant, ou plutôt en le revêtant. Dans l’Evangile, Jésus, à quelqu’un qui lui demandait quel était le plus grand commandement de la Loi, répondit : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton Esprit. C’est là le plus grand et le premier commandement, mais un second lui est semblable. Tu aimeras ton prochain comme toi-même. » Dans le Sermon sur la Montagne, le Christ développera plus longuement ce second précepte.

La raison de l’existence de commandements précis et contraignants est à chercher dans la faiblesse de l’homme, à qui il est difficile sur cette terre de revêtir l’« homme spirituel » complètement soumis à la loi d’amour énoncée par Jésus-Christ, et qui reste capable de pécher à cause de l’inclination au mal qui demeure en lui malgré le baptême, comme une marque de la faute originelle.

Le renouvellement moral s’opère donc par l’obéissance aux divers commandements, mais il doit aboutir à une union intime avec le Christ par la désappropriation de soi-même, ce qui n’est autre que la sainteté. Il s’agit en définitive de s’identifier moralement au Christ par l’obéissance à sa volonté et l’imitation de ses vertus. Tous les commandements de la nouvelle Loi se rattachent à l’unique commandement d’aimer, et toutes les vertus ne sont que les manifestations variées d’une unique, la charité.