Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

catholicisme (suite)

Le Christ, s’il est parfaitement Dieu, est aussi parfaitement homme. C’est l’autre face du mystère dont parle saint Paul : « Il s’est anéanti lui-même en prenant la nature de l’esclave, devenu semblable aux hommes et reconnu pour homme. » Cette doctrine a pris corps peu à peu dans les premiers temps de l’Église et s’est précisée, s’est explicitée sous l’influence de nombreuses hérésies, dont les unes et les autres niaient soit la divinité du Christ, soit son humanité. Il y a donc coexistence dans la deuxième personne de la Trinité de deux natures distinctes, que l’on nomme l’union hypostatique, mais une seule personne, qui est la personne divine.

De cette union découlent plusieurs conséquences qui sont capitales pour la compréhension du dessein de Dieu sur l’humanité. En effet, le Père ne peut aimer que son Fils, seul objet digne de son amour ainsi qu’il est expliqué à propos du mystère de la Trinité, mais « si le Verbe s’est fait chair, écrit saint Irénée, si le Fils éternel du Dieu vivant est devenu le Fils de l’homme, c’est afin que l’homme entrât en communion avec le Verbe de Dieu et, recevant l’adoption, devînt fils de Dieu. »

Par ce moyen se trouve accomplie l’intention qu’avait Dieu en créant l’homme de le faire à son image et à sa ressemblance, et que l’homme avait bouleversée par sa désobéissance en voulant être non plus son semblable, mais son égal ; et par là se trouve restauré le désir de divinisation que cette première destination avait laissé dans le cœur de l’homme. L’homme, grâce à l’union hypostatique. est réellement rendu participant de la nature divine, mais par grâce et non par nature, ainsi que l’exprime saint Cyrille d’Alexandrie dans son Commentaire sur l’Evangile de Jean. « Devenus participants de lui par l’Esprit, nous sommes frappés à sa ressemblance [...] Ainsi nous sommes élevés à la dignité surnaturelle par le Christ, mais ce n’est pas au même titre que lui que nous serons nous aussi fils de Dieu, mais comme a sa ressemblance, par la grâce. » C’est ce que confirme saint Athanase : « Il est manifeste que ce n’est pas nous qui sommes fils par nature, mais bien le Fils qui est en nous, et que de son côté Dieu n’est pas notre Père par nature, mais le Père du Verbe qui est en nous. »


Le mystère de la Rédemption

Mais le point culminant de l’œuvre de Dieu sur terre, c’est dans le mystère de la Rédemption que nous le trouvons, parachèvement de l’action entreprise par le Fils pour restaurer l’humanité dans son intégrité et sa béatitude première. Dans ce mystère viennent confluer tous les autres mystères de Dieu et de ses desseins, mystère du mal et du péché, mystère de l’Incarnation, mystère de la justice et mystère de la charité de Dieu.

La Rédemption, c’est-à-dire la mort du Christ sur la croix, prolonge l’Incarnation et l’accomplit, la Résurrection et l’Ascension ne faisant qu’un avec la mort qui est l’acte décisif. Cet acte, c’est le sacrifice du Christ, dont la mort sur la croix suivie de sa Résurrection a constitué une véritable expiation. Mais l’explication du mystère est des plus difficiles, et la théologie, malgré ses efforts, n’a pas réussi encore à en cerner toute la richesse. Sur la croix un Dieu qui est à la fois le prêtre et la victime s’offre en sacrifice et immole en même temps en lui toute l’humanité qui lui était adjointe depuis l’Incarnation.

Le sacrifice doit être considéré à la fois comme un don, une offrande de soi à Dieu, dans le besoin qu’a l’homme de prendre conscience de sa condition de créature, de reconnaître sa dépendance envers son Créateur, de glorifier ses perfections et de le remercier de ses bontés. Or, confesser cette dépendance, c’est obéir à Dieu, proclamer notre relation envers lui, c’est le contraire de l’attitude d’Adam.

Les hommes ne peuvent revenir à Dieu que par l’obéissance, et, comme celle-ci se ramène au sacrifice de soi, ils doivent s’offrir à lui en holocauste. Sacrifice spirituel du cœur, mais aussi sacrifice visible, l’homme étant un être corporel qui doit s’incarner en un acte sensible. Mais il faut aussi que le sacrifice soit agréable à Dieu, qu’il soit accepté par lui. Le Christ réunit dans sa mort sur le Calvaire toutes ces conditions. Dans l’Evangile, il dit : « C’est pour cela que le Père m’aime, parce que je donne ma vie pour la reprendre. Personne ne me la ravit, mais je la donne de moi-même. »

Le Christ offre à son Père son être corporel, il le donne de son pein gré, et cette offrande ne peut être qu’agréable à Dieu. « Vivez, dit saint Paul, dans la charité à l’exemple du Christ qui nous a aimés et s’est livré lui-même pour nous, s’offrant à Dieu en oblation et en sacrifice d’agréable odeur. » En se faisant obéissant jusqu’à la mort sur la croix, le Verbe répare la faute originelle d’Adam, son refus d’obéir qui est le refus du dessein de la divinité sur la créature. Dans l’Evangile, l’obéissance du Fils est souvent affirmée : « Je suis descendu du ciel non pour faire ma volonté à moi, mais la volonté de Celui qui m’a envoyé. »

Par son immolation sanglante, le Christ a procuré la libération de toutes les peines et de tous les tourments auxquels le péché originel avait réduit l’humanité, ce péché originel a pu être ainsi effacé par le nouvel Adam (mais non, on l’a vu, la tendance à pécher, rançon de notre libre arbitre). Mais c’est surtout la mort qui a été vaincue, qui était par excellence le châtiment de la faute originelle. Selon saint Paul, « le Christ ressuscité des morts ne meurt plus, la mort n’a plus d’emprise sur lui. Sa mort fut une mort au péché une fois pour toutes ; sa vie est une vie pour Dieu. »

Cependant, la mort subsiste pour l’humanité, mais l’Église explique qu’elle est illusoire, momentanée et utile à l’homme, qui doit l’accepter comme une condition de son rachat, un moyen de se réconcilier avec Dieu. Le triomphe définitif sur la mort et le mal est renvoyé à la fin des temps, dans une vision eschatologique de jugement dernier. D’ores et déjà, pour l’Église comme pour saint Paul, la mort a été vaincue, et l’apôtre des gentils peut proclamer : « La mort a été engloutie dans la victoire du Christ, Ô mort, où est ta victoire ? Où est, ô mort, ton aiguillon ? »