Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

canonique (droit) ou droit canon (suite)

Quoi qu’il en soit, il semble bien que le futur Code ne pourra contenir, outre la loi fondamentale de l’Église, que des normes très générales, la discipline particulière étant réglée, selon les circonstances locales, par les conférences épiscopales. Longtemps influencé par le droit romain, et, dans une moindre mesure, par les droits des nations, le droit canonique devrait ainsi s’ouvrir dans les prochaines années aux traditions juridiques africaines, asiatiques, etc.

La codification du droit dans les Églises d’Orient

Le Code de droit canonique de 1917 — quelques canons exceptés — ne concerne que l’Église latine (canon 1). Les catholiques orientaux unis à Rome continuèrent donc, après le Code, à être gouvernés par les conciles, les livres liturgiques, les collections canoniques et les coutumes de leurs Églises. Cela reste encore vrai aujourd’hui en grande partie. Mais, dans un désir de clarification d’une législation souvent embrouillée et contradictoire, Pie XI institua en 1935 une commission de codification du droit oriental (elle fut préparée dès 1929).

Cette commission n’a pas totalement achevé ses travaux, souvent taxés de « tentative de latinisation » par les évêques orientaux. Elle a cependant publié 58 volumes concernant les sources du droit oriental, et 1 590 canons ont pu être promulgués par Pie XII entre 1949 et 1957. Ils concernent le mariage, la procédure judiciaire, la terminologie juridique, les personnes, la vie religieuse, les biens ecclésiastiques.

L’avenir de la commission de codification du droit oriental reste incertain, surtout depuis que le concile Vatican II a déclaré « solennellement que les Églises d’Orient, tout comme celles d’Occident, ont le droit et le devoir de se gouverner selon leurs propres disciplines particulières » (décret sur l’œcuménisme, no 6).

R. A.

➙ Église catholique / Papauté.

 P. Gasparri et G. J. Seredi, Codicis juris canonici fontes (Rome, 1923-1939 ; 9 vol.). / R. Naz (sous la dir. de), Dictionnaire de droit canonique (Letouzey, 1924 et suiv.) ; Traité de droit canonique (Letouzey, 1953-1956 ; 4 vol.). / A. Cance, Décisions et précisions canoniques 1928-1955 (Gabalda, 1956). / E. Regatillo, Institutiones juris canonici (Santander, 1956) ; Interpretatio et jurisprudentia Codicis juris canonici (Santander, 1959). / J. des Graviers, le Droit canonique (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1958). / P. Palazzini (sous la dir. de), Dictionarium morale et canonicum (Rome, 1962 et suiv.). / Vatican II. Pour construire l’Église nouvelle (Éd. du Cerf, 1970-1971 ; 2 vol.).

Canova (Antonio)

Sculpteur italien (Possagno, prov. de Trévise, 1757 - Venise 1822).


Vénitien par ses origines et sa formation, Romain par la plus importante partie de son œuvre, il connut, sans jamais renier son extraction paysanne, une célébrité européenne qui s’explique surtout par le caractère largement international du mouvement néo-classique (v. classicisme), dont il fut l’un des plus brillants adeptes. On peut se demander s’il ne le fut pas malgré lui. Ses premiers essais (Orphée et Eurydice, 1776, Pradazzi d’Asolo, villa Falier ; Dédale et Icare, 1779, Venise, musée Correr) sont encore imprégnés de l’esprit baroque qui régnait alors à Venise. Le séjour romain et l’influence de théoriciens doctrinaires (Winckelmann, Milizia puis Quatremère de Quincy) l’ont-ils engagé dans une voie qui n’était point la sienne ?

En fait, accueillant tous les conseils, travaillant pour tous les clients, il resta essentiellement fidèle à l’idée qu’il se faisait de son art : un travail longuement pensé et exécuté avec un souci de perfection presque artisanal. Par une pratique quotidienne du dessin d’après le nu, il réussit à dominer les faiblesses que l’on décèle dans les études anatomiques de ses débuts. Toute sa vie, cependant, il chercha vainement à atteindre, dans le rendu des drapés, cette aisance spontanée qu’il admirait chez les Anciens : ainsi s’expliquent par exemple les deux versions du groupe Psyché ranimée par le baiser de l’Amour (Louvre et Leningrad).

L’œuvre de Canova présente un double aspect. Sculpteur attitré de la papauté et de l’Empire napoléonien, il fut chargé de commandes officielles ; artiste favori des riches amateurs et des grands de la terre, il multiplia les mythologies aimables, puisant ainsi son inspiration aussi bien dans le sévère classicisme grec et la grandeur romaine que dans la grâce alexandrine.

Canova eut le mérite de renouveler profondément le genre du tombeau monumental. Ceux qu’il édifia pour Clément XIV (1787, Rome, Saints-Apôtres), Clément XIII (1787-1792, Rome, Saint-Pierre), Vittorio Alfieri (1810, Florence, Santa Croce) contrastent fortement par leur monochromie et leur simplicité avec ceux de l’âge précédent. On lui doit aussi d’avoir ressuscité la stèle funéraire à l’antique (stèle Volpato, Rome, Saints-Apôtres ; stèle des Stuarts, Rome, Saint-Pierre). Parmi les effigies officielles, la plus étonnante est le célèbre Napoléon nu de 1810 (bronze à Milan, palais Brera ; marbre à Londres, Wellington Palace), parfaite illustration de l’idéal néo-classique, que l’empereur refusa cependant de voir exposé en public.

Avec les effigies des femmes de la famille impériale, on entre dans le domaine de la grâce anacréontique, où le prétexte mythologique permet toutes les audaces. Ainsi Pauline Borghèse, en Vénus victorieuse (1805), appartient-elle au monde des Psychés, des Vénus, des Danseuses, des Hébés, des Nymphes et des Grâces que Canova multiplia autant par goût personnel que pour satisfaire un public enthousiasmé par des figures dont la perfection formelle semblait faire oublier la profonde sensualité.

Le goût actuel est sévère pour Canova. À ses sculptures monumentales on reproche une certaine banalité. Dans les sujets mythologiques, le contraste paraît choquant entre le choix des sujets et la froideur du marbre final. Peut-être est-ce le processus de la création chez cet artiste qui est ainsi mis en cause : l’abîme est trop grand entre les esquisses fougueuses et vivantes et les modèles livrés aux praticiens, tels qu’on peut les voir aujourd’hui à la « Gipsoteca canoviana » de Possagno. L’art néo-classique, pour ne considérer que la « belle nature au repos », éliminait le mouvement spontané, l’accident et, à la limite, la vie elle-même. Dans ses qualités comme dans ses défauts, Canova incarne parfaitement le goût de son temps.

J. R. G.

 E. Bassi, Canova (Bergame, 1943). / G. Hubert, la Sculpture dans l’Italie napoléonienne (De Boccard, 1965).