Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Calonne (Charles Alexandre de) (suite)

Mais les recettes de l’État dépendent de la richesse des Français ; Calonne veut donc augmenter la production et accroître le commerce du royaume. Là encore, une règle : unifier le royaume pour favoriser le producteur, allégé d’une partie des fardeaux fiscaux (taille, corvée ou gabelle). Les douanes intérieures, qui cloisonnent le pays, seront supprimées. Un vaste marché sera ainsi ouvert ; il permettra l’établissement du « juste prix » et du profit maximal pour les propriétaires fonciers.

Ces derniers, reconnus comme les éléments les plus utiles du royaume, seront enfin appelés à aider le roi dans l’administration. Des élections au suffrage censitaire, ignorant des divisions en ordres, leur permettront de siéger et de donner leur avis dans des assemblées municipales, de districts ou de provinces.

C’est donc toute une œuvre de régénération de la société et de l’État qui est projetée.

Régénération politique : face à une France « agrégat inconstitué de peuples désunis », ce sera poursuivre l’entreprise d’unification amorcée depuis plus d’un siècle par la monarchie. L’unité favorisera le pouvoir royal, menacé par l’action aristocratique. L’impôt, devenu permanent et national, donnera au roi la finance nécessaire à son absolutisme. Désormais, les remontrances et l’obstruction que les parlementaires, porte-parole de l’aristocratie, faisaient à l’occasion de l’enregistrement des crédits fiscaux seront écartées. Établir des assemblées consultatives, ce sera enfin faire participer l’élite du tiers état qui le réclame, mais aussi jouir des oppositions et conserver en fait la réalité du pouvoir.

Régénération sociale : la distinction ne sera plus tant le privilège que la possession d’une propriété. Ainsi les institutions se rapprocheront de la réalité sociale, sans toutefois se confondre avec elle. C’est qu’en effet la réforme sociale de Calonne est modérée. Si les mesures fiscales portent des coups graves à l’ordre du clergé, qui perd notamment ses assemblées particulières, la noblesse conserve l’exemption des charges personnelles auxquelles sont soumis les membres du tiers. Les droits honorifiques sont maintenus et la noblesse peut espérer continuer à tenir les places importantes de l’État.

L’aristocratie ne retiendra des réformes proposées que les mesures qui tendaient à la ravaler au rang du commun. Le 22 février 1787, le roi réunit l’assemblée des notables, composée en majeure partie de nobles triés sur le volet ; cette assemblée doit permettre de tourner l’opposition du parlement et d’avaliser le plan de Calonne.

Prévenue contre le rôle qu’on veut lui faire jouer, menée par les représentants du clergé, où l’on distingue Loménie de Brienne, l’assemblée repousse la subvention territoriale. L’argument est habile : « L’établissement d’un impôt par quotité représente une recette indéfinie et surpasse l’autorité du roi, qui ne demande l’impôt que pour les besoins... il ne pourrait être admis par les parlements, qui n’ont qu’un pouvoir subsidiaire et de confiance pendant l’absence des états généraux ; ... il faudrait donc des états généraux pour prêter un consentement suffisant à un impôt de cette nature. »

Le contrôleur en appelle lui aussi à l’opinion publique, désormais juge des affaires de l’État. En vain. L’opposition des notables, le refus d’impôt nouveau ruinant le crédit public, la versatilité du roi perdent Calonne, renvoyé en avril 1787.

Poursuivi par la haine de ses ennemis politiques, Calonne quitte le royaume. La révolte nobiliaire se déchaîne alors contre un pouvoir royal tragiquement amoindri. La première étape de la Révolution française commence.

Avec cette dernière, Calonne, réfugié en Angleterre, puis à Turin et à Coblence auprès des frères du roi, retrouve un rôle politique : il apparaît comme l’un des chefs de la contre-révolution ; à son service, il met toute sa fortune. Ruiné et abandonné, il se retire en Angleterre. Il reviendra à Paris pour mourir.

J.-P. B.

➙ Louis XVI / Révolution française.

 P. Jolly, Calonne (Plon, 1949). / R. Lacour-Gayet, Calonne, financier, réformateur, contre-révolutionnaire, 1734-1802 (Hachette, 1963).

calorimétrie

Partie de la physique qui a pour objet la mesure des quantités de chaleur.



Sa place dans les sciences physicochimiques

La calorimétrie, bien que née de préoccupations à la fois pratiques et théoriques, s’est surtout développée pour répondre aux besoins de la recherche fondamentale. C’est ainsi que la détermination précise des chaleurs massiques et l’interprétation des résultats de cette étude ont conduit à des progrès essentiels dans la connaissance de la structure intime de la matière et que, conjuguée avec la mesure des chaleurs de réaction, elle a permis une prévision générale du comportement des systèmes chimiques. La microcalorimétrie, de création récente, a contribué à élargir son domaine d’application aux sciences biologiques.


Notion de quantité de chaleur

La notion d’échange de chaleur relève de la connaissance vulgaire, et le vocabulaire premier appartient au langage courant. L’expérience quotidienne nous a appris que, si nous plongeons dans une masse d’eau prise à la température ambiante un morceau de fer que nous avons préalablement porté à 100 °C, nous observons simultanément une élévation de température de l’eau et un abaissement de celle du fer jusqu’à ce que l’eau et le fer atteignent la même température. Nous disons qu’au cours de cette opération le fer et l’eau ont échangé de la chaleur ; nous précisons même que l’eau a reçu de la chaleur et que le fer en a cédé. Lorsque l’eau et le fer ont atteint la même température, nous disons qu’un équilibre thermique a été réalisé et que, dès lors, l’échange de chaleur cesse. Si nous plongeons le morceau de fer chaud dans un mélange d’eau et de glace en équilibre à 0 °C, nous constatons que la température du mélange eau-glace ne varie pas, mais que de la glace fond. L’équilibre thermique s’établit à 0 °C. Nous disons encore que le fer, en se refroidissant, a cédé de la chaleur au mélange eau-glace et nous sommes conduits à admettre que cette quantité de chaleur a servi à fondre de la glace, mais sans qu’il y ait eu variation de température du système qui la recevait. Si la température initiale du fer était – 10 °C, on observerait cette fois un abaissement de la température de l’eau dans la première expérience et une augmentation de la masse de glace dans la seconde. Ce serait, cette fois-ci, le fer qui aurait reçu de la chaleur, fournie soit par l’eau qui se serait refroidie, soit par l’eau qui se serait transformée en glace à température constante. « Recevoir de la chaleur » (ou « fournir de la chaleur ») se traduit pour une masse d’eau par une certaine élévation (ou un certain abaissement) de sa température et pour un mélange d’eau et de glace par la fusion (ou la formation) d’une certaine masse de glace sans variation de température. Ces deux observations et cette façon de parler ont servi de base à la construction d’un système de mesure des quantités de chaleur.