Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

affectivité (suite)

Il convient de dire enfin un mot des rapports entre l’affectivité et la personnalité. D’un point de vue descriptif, les structures de l’affectivité ont été tantôt rapportées au caractère, tantôt aux attitudes latentes du sujet, tantôt à sa « personnalité profonde », mais on ne saurait négliger, dans l’appréciation globale de la personnalité, le degré de liberté du je par rapport aux emprises affectives, sa capacité de contrôle et d’adaptation réaliste, son intelligence et sa créativité. Le degré d’intégration des déterminants affectifs de la conduite aux intentions transcendantes du je permet d’évaluer la normalité ou l’anormalité du sujet ; plus simplement, elle s’évalue par le degré de conscience authentique de soi. Car la conscience et le je sont souvent dupes de l’affectivité. D’une part parce qu’elle intervient au niveau même de la perception, comme donatrice de sens subjectif, d’autre part parce que les déterminants affectifs mettent facilement à leur service l’intelligence et les masques sociaux, et apparaissent comme idéologie, logique, morale, conceptions philosophiques, vocation même par le jeu des mécanismes de rationalisation secondaire, de sublimation, de défense sociale du moi. C’est pourquoi la liberté du je passe par la connaissance authentique de soi.

R. M.

 H. Wallon, les Origines du caractère chez l’enfant (Boivin et Cie, 1934). / J.-P. Sartre, Esquisse d’une théorie des émotions (Hermann, 1941). / J. Delay, les Dérèglements de l’humeur (P. U. F., 1946). / C. Baudouin, l’Âme enfantine et la psychanalyse (Delachaux et Niestlé, 1950-1951, 2 vol.). / A. Freud, le Traitement psychanalytique des enfants (trad. de l’allemand et de l’anglais, P. U. F., 1951). / P. Malrieu, les Émotions et la personnalité de l’enfant (Vrin, 1953) ; la Vie affective de l’enfant (Édit. du Scarabée, 1956). / A. H. Maslow, Motivation and Personality (New York, 1954). / R. A. Spitz, la Première Année de la vie de l’enfant (P. U. F., 1958). / R. Mucchielli, Philosophie de la médecine psychosomatique (Aubier, 1961) ; Introduction à la psychologie structurale (Dessart, Bruxelles, 1967). / T. Gouin-Decarie, Intelligence et affectivité chez le jeune enfant (Delachaux et Niestlé, 1962). / R. Zazzo, Conduites et conscience (Delachaux et Niestlé, 1962-1968, 2 vol.). / J. Piaget et B. Inhelder, la Psychologie de l’enfant (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1966). / G. Lanteri-Laura, Phénoménologie de la subjectivité (P. U. F., 1968). / G. Amado, l’Affectivité de l’enfant (P. U. F., 1969).

affiche

Feuille de papier imprimée destinée à être placardée sur les murs. L’affiche est un mode direct d’information, particulièrement approprié à la diffusion commerciale des produits et des services ainsi qu’à la propagande idéologique.



La préhistoire de l’affiche

On serait tenté de tenir dans le passé toute information publique manifestée par le dessin ou l’écriture comme ancêtre de l’affiche. Ce serait notamment le cas des albums romains, ces murs blanchis à la chaux et répartis en surfaces égales où les citoyens, sur les places et aux carrefours, vantaient leur marchandise ou faisaient leur propre éloge. Ou encore des enseignes, dont l’essor se situe entre le xve et le xixe s. et qui développaient en pleine rue, au-dessus des boutiques, une véritable héraldique de l’artisanat et du commerce. Mais avant toute chose l’affiche est affaire de généralité : elle ne se conçoit que tirée à des centaines, voire des milliers d’exemplaires, donc susceptible de concerner des appétits multiples et identiques et de leur proposer quelque satisfaction. Aussi se trouve-t-elle techniquement liée à la découverte des moyens de grande diffusion et dépendante économiquement du développement de la production industrielle et des échanges commerciaux. L’invention de l’imprimerie provoque l’apparition des premières affiches connues (1477, en Angleterre, celle de William Caxton ; 1482, en France, le Grand Pardon de Notre-Dame de Reims), mais seul le xixe s. allait entraîner la naissance de la véritable affiche moderne, expression frappante de la société de consommation et de la concurrence permanente des intérêts qui la caractérise. Une peinture de John Parry, datée de 1840, nous montre les murs londoniens assaillis d’affiches. Les autorités sont contraintes de prendre des mesures d’urgence : en Angleterre, on interdit d’afficher sur les propriétés privées (1839) ; à Paris, le préfet Rambuteau fait édifier des colonnes réservées à l’affichage (1842).


Naissance de l’affiche moderne

Pourtant, l’affiche n’a pas encore trouvé son statut. Le plus souvent typographique, elle s’orne quelquefois d’une vignette dans l’esprit des illustrations de livres ou dans celui des annonces de presse. Il lui faudra découvrir sa propre esthétique dans la rencontre d’un texte bref mais incisif avec une image simple et saisissante, faite pour être aperçue et comprise de loin et d’un seul coup d’œil. Or, cette découverte, ce ne seront ni les industriels, ni les commerçants, ni les publicitaires qui la feront, mais les artistes. Telle est la raison pour laquelle l’affiche moderne naît en même temps que l’art moderne, c’est-à-dire il y a environ un siècle : car l’art moderne participe lui aussi de cette volonté de simplifier l’image, de l’épurer, de la débarrasser du bavardage académique et du détail oiseux. Vers 1866, toutes les conditions sont réunies : la lithographie en couleurs est au point, les grands formats sont désormais possibles, l’impressionnisme est en train de naître. Significativement, les premières affiches modernes sont consacrées à des fêtes (Chéret, Bal Valentino, 1868), à des livres (Manet*, les Chats, de Champfleury, 1869), au théâtre (Frederick Walker, The Woman in White, 1871). L’indiscutable pionnier, c’est ici le Français Jules Chéret (1836-1932), qui, jusqu’en 1900, couvrira les murs de Paris de flambées de joie et de grâce. Alors que la peinture officielle se complaît dans la grisaille, la franchise des couleurs et l’audace du dessin de ce Tiepolo de l’affiche font sensation, préparant le regard des contemporains à la révolution picturale.