Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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bronze (âge du) (suite)

Les documents

Les sépultures fournissent une masse énorme de matériel. À la différence du Néolithique, les tombes sont surtout individuelles, bien qu’il existe quelques ossuaires collectifs en grottes. Au bronze ancien apparaissent de nombreuses inhumations en tombes « plates », en coffres et même en jarres. Puis l’habitude se généralise de recouvrir les sépultures, inhumations ou crémations, par des tumulus parfois imposants. Dans certaines régions se développe la pratique de l’urne funéraire. Ce rite, propre à divers groupes du bronze moyen (Angleterre), va surtout connaître un développement considérable avec la civilisation des champs d’urnes du bronze final. Les tombes variées de l’âge du bronze fournissent d’intéressants mobiliers funéraires : armes, outils, poteries et bijoux. Un complément d’information est apporté par l’étude des structures annexes des sépultures : cercles de pierres, trous de poteaux périphériques ou fossés des tumulus, enclos ou fosses entourant les urnes funéraires.

Les habitats ou les traces d’occupation du sol sont multiples et variés, mais les agglomérations ne dépassent pas souvent le simple village de huttes (mis à part, évidemment, les palais crétois ou les centres urbains de l’Égée et de l’Asie Mineure, qui sont aux portes de l’histoire). En Europe « barbare », les types d’habitation sont des cabanes circulaires en pierre (Méditerranée occidentale), des maisons creusées dans l’argile et recouvertes de branchages (Europe centrale) ou de grandes huttes rectangulaires à charpente en bois (Tchécoslovaquie), dérivées de modèles néolithiques. Les villages peuvent être protégés (éperons barrés ou camps situés sur des hauteurs). Les palafittes, ou stations littorales des lacs alpins, sont encore en usage. Au bord de la mer (Bretagne), on trouve des traces d’habitats. Beaucoup de groupes, probablement nomades, n’ont laissé que peu de vestiges de leur vie quotidienne (tessons de poterie et éclats de silex dans les terres accumulées pour la construction des tumulus). En Italie centrale (Emilie) sont édifiées de grandes plates-formes rectangulaires protégées par des talus de pierre et de terre, sur lesquelles on bâtit des villages, ou « terramares », à plan géométrique.

En dehors des habitats, on trouve des traces d’élevage (enclos ou fosses à bestiaux) ou de culture (traces de labours sous les dunes ou les tumulus ; indices de déforestation décelés par l’analyse des pollens des tourbières ou des vieux sols). Les secteurs miniers ont été fréquentés : la surface des gisements livre parfois des instruments en bronze ; certaines roches gravées sont interprétées comme des signes de repère de prospecteurs. Mais les vestiges d’exploitation du cuivre et de l’étain sont rares, beaucoup de gîtes miniers ayant été écrémés sommairement par de petites excavations (« pingen »). Cependant, on connaît en Autriche, au bronze final, des mines anciennes avec galeries, exploitées par la technique de l’eau et du feu : on arrosait d’eau froide la roche portée au rouge pour la faire éclater. Des maillets en pierre, des seaux et des échelles en bois, des pics en bronze ont également été recueillis.

Les dépôts sont particulièrement importants. On récupérait les moindres bribes de métal usagé dans les dépôts de fondeurs, groupant les outils et armes brisés, les déchets de fonderie et les culots de bronze ou de cuivre neuf. Les objets fabriqués étaient également stockés en grand nombre (dépôt de quatre mille haches à Maure-de-Bretagne, en Ille-et-Vilaine), de même que des lingots de formes variées (barres, torques ou saumons). Certaines cachettes pouvaient être votives, et l’on connaît des bijoux en or jetés dans des tourbières.

Les objets isolés ne sont pas négligeables. On a recueilli ainsi de nombreuses haches plates en cuivre. De même, les plus beaux spécimens d’épées ne proviennent pas toujours de sépultures ou de dépôts, mais de dragages dans les rivières, les lacs ou les estuaires côtiers.

Les monuments religieux sont souvent mal connus. Il en existe dans les îles de la Méditerranée occidentale (nuraghi de Sardaigne, taulas des Baléares). En Bretagne, les derniers grands menhirs taillés (Plouarzel) datent du bronze ancien, et c’est également à cette époque que fut achevé le célèbre sanctuaire formé de cercles de pierre et de trilithes de Stonehenge (Angleterre). Des temples en bois ont existé si l’on se réfère à une découverte récente des Pays-Bas. Une nouveauté est la fabrication de chars cultuels en métal, comme le chariot de Trundholm (Danemark), sur lequel un cheval en bronze tire un disque plaqué d’or, représentant le soleil.

Les gravures se retrouvent sur les rochers ou les dalles des tombeaux ; les cupules, les cercles concentriques, parfois les spirales sont fréquents. Quelques stèles avec représentation de chars sont connues à Mycènes, mais aussi dans le sud de la France et au Portugal. Les gravures rupestres sont groupées quelquefois avec une abondance extraordinaire. On en connaît au Japon, dans le Haut-Atlas, en Italie (Val Camonica) et dans les Alpes-Maritimes, au-dessous du mont Bego (vallée des Merveilles). Elles sont difficiles à dater et, dans plusieurs cas, amorcent des séries qui se poursuivent à l’âge du fer. Les représentations essentielles sont des armes (épées, poignards, hallebardes), des scènes de la vie quotidienne (labour, chasse, tissage) [Val Camonica], des cérémonies religieuses, des scènes de voyages en bateau ou des tableaux guerriers (Scandinavie).


Naissance de l’âge du bronze

Presque partout où il existe, l’âge du bronze a été précédé par des industries du cuivre. Mais il est difficile de dire où se produisit l’étincelle qui amena la naissance de la métallurgie. Des fouilles récentes ont révélé la présence d’objets en cuivre dès le VIIe millénaire à Çayönü tepesi, en Anatolie orientale, présence due à la proximité de gisements de cuivre natif. Mais il faut attendre encore deux millénaires pour voir le début de procédés de fonte et de moulage. L’Iran et le Turkestan apparaissent parmi les centres les plus anciens, suivis par la Palestine au cours du IVe millénaire. En Égypte également, on fabriqua tôt des instruments métalliques, mais à usage local. C’est surtout l’Iran qui semble avoir joué un grand rôle dans la création et la diffusion d’instruments (haches à emmanchement vertical, alênes, houes, herminettes), et cela dès le IVe millénaire, suivant Jean Deshayes. Dans la vallée de l’Indus se créèrent également très tôt des foyers de création métallurgique (Harappā). Le métal restait rare, et il est curieux de constater qu’il fut souvent imité, peut-être à des fins religieuses. Ainsi, on connaît en Mésopotamie de nombreuses copies en terre cuite imitant des haches en métal.