Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Brésil (suite)

Architecture

Pour comprendre les monuments du Brésil, il faut les comparer à ceux du Portugal, les deux pays formant une vaste unité dotée d’écoles très diverses. Au xviie s., ce sont les ordres religieux qui se chargent de faire évoluer ces différentes tendances. Les sévères modèles jésuites sont imités par les franciscains, les bénédictins et les carmes (v. Recife et Salvador). Le développement de la colonisation rurale s’est accompli sous un régime quasi féodal : avec sa « casa grande », ou résidence du maître, son moulin à sucre et sa « senzala » formée par les cases des esclaves, l’ensemble architectural caractéristique des zones sucrières est le reflet des hiérarchies sociales.

Si la capitainerie de Minas Gerais doit son rapide essor démographique à la richesse de son sous-sol, c’est aux confréries qu’il faut attribuer l’épanouissement de l’architecture religieuse, surtout dans la seconde moitié du xviiie s., où se produit une évolution vers le rococo attestée par la grande variété des plans et l’existence de murs ondulés. Les exemples les plus importants de cette tendance sont : l’église des Carmes à Ouro* Prêto (1766), caractérisée par sa façade concave-convexe-concave ; la terrasse monumentale du sanctuaire de Bom Jesus de Congonhas do Campo (1770), dont la scénographie présente une combinaison convexe-concave-droite et rappelle les églises de pèlerinages du nord du Portugal ; l’église des Franciscains de São João del Rei (1774), à façade plane mais à nef ovale.

Au xxe s., de nouveau, le Brésil s’ouvre aux tendances architecturales d’avant-garde. Si la « Semaine de l’art moderne » de São Paulo, en 1922, a préparé les esprits, sur le plan officiel l’impulsion première est due au ministre Gustavo Capanema, qui confia la construction du ministère de l’Éducation et de la Santé de Rio de Janeiro à l’architecte Lúcio Costa (né en 1902) et à ses collaborateurs ; le projet fut esquissé par Le Corbusier, qui vint à Rio en 1936, contribuant par son prestige à consolider le mouvement rénovateur. En 1939, l’architecture nationale connaît une heure de gloire : le pavillon brésilien de la foire internationale de New York, œuvre de Lúcio Costa et d’Oscar Niemeyer*, enlève tous les suffrages de la critique mondiale. Après cette consécration, l’aide officielle aux jeunes architectes (Carlos Leão, Jorge Machado Moreira, Afonso Reidy et Ernani de Vasconcelos) va s’intensifier. Ainsi Reidy (1909-1963) et Moreira (né en 1904) sont appelés à édifier le bâtiment de la direction des chemins de fer du Rio Grande do Sul, dont on a dit qu’il était une transposition de l’ordre colossal de Palladio dans les structures modernes. Reidy est également l’auteur du musée d’Art moderne de Rio (ouvert en 1960). De son côté, l’architecte paysagiste Roberto Burle-Marx (né en 1909) a su tirer le meilleur parti des ressources de la flore tropicale. Quant à l’audacieuse Brasília*, la nouvelle capitale, son plan a été confié à Lúcio Costa et son architecture à Oscar Niemeyer.


Sculpture

La sculpture brésilienne s’inspire directement de celle de la métropole. Ici s’impose le génie multiple de l’Aleijadinho* (1730-1814). Tempérament foncièrement baroque, fils d’architecte, cet artiste a toujours regardé architecture et sculpture comme inséparables. Il est notamment l’auteur du plan ainsi que d’une partie du décor sculpté et du mobilier de l’église de São Francisco de Assis à Ouro Prêto, de la décoration de l’église des Carmes à Sabará et des sculptures de Congonhas do Campo.

La réaction néo-classique se produit au Brésil vers 1795, bien que le goût pour le baroque se maintienne jusqu’au premier quart du xixe s. Avec Victor Brecheret (1894-1955), la sculpture brésilienne s’ouvre aux courants modernes. Le monumentalisme de Bruno Giorgi (né en 1905) s’est donné libre cours sur la place des Trois-Pouvoirs de Brasília. Les œuvres de Sônia Ebling (née en 1922) ou de Mary Vieira (née en 1927) recherchent une compénétration tant avec l’espace architectural qu’avec l’espace urbain, tandis que les objets et environnements en matériaux divers de Lygia Clark (née en 1920) convient le public à un type expérimental de perception.


Peinture

Elle n’a jamais connu un grand développement. Les artistes les plus représentatifs du xviie s. furent Frans Post (v. 1612-1680) et Zacharias Wagner (1614-1668), peintres de l’école hollandaise qui, séjournant au Brésil, s’inspirèrent des types indigènes et des paysages tropicaux (thèmes qui ne suscitèrent que fort peu d’intérêt chez les peintres de l’Amérique espagnole). Parmi les peintres du xviiie s. se détache Manuel da Costa Ataide (1762-1837), à qui l’on doit le décor peint de São Francisco de Assis d’Ouro Prêto (1803-1804).

La révolution moderniste de 1922 apporte au Brésil la révélation de l’expressionnisme allemand. Lasar Segall, d’origine lituanienne (1891-1957), interprète la vie populaire et les paysages brésiliens ; les adeptes du mouvement « anthropophagique » déforment la réalité pour lui conférer un aspect monstrueux. Le plus célèbre des peintres du xxe s. est Cândido Portinari (1903-1962). Après avoir remarquablement assimilé la leçon des écoles européennes, spécialement du cubisme, Portinari, avec un éclectisme jugé parfois excessif, a fait triompher au Brésil un art alliant à cette influence de l’Europe celle du nationalisme esthétique d’origine mexicaine. Alfredo Volpi (né en 1896) et Cicero Dias (né en 1908) font la liaison entre la saveur d’une expression populaire et le courant abstrait, représenté par des artistes comme Frans Krajcberg (né en 1921) ou le Nippo-Brésilien Manabu Mabe (né en 1924). Un autre contemporain, Ivan Serpa (né en 1923), a évolué de l’abstraction à une néo-figuration violente et à une variété de pop’art. À Paris ont travaillé ou travaillent notamment Antônio Bandeira (1922-1967), Flávio Shiro, Artur Luis Piza, Sérgio de Camargo, la figurative Morgan-Snell et les femmes sculpteurs Luísa Miller et Liuba Wolf. Depuis 1951, les Biennales de São Paulo ont été un important facteur de renouveau artistique au Brésil.

Traduit d’après S. S.