Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Brésil (suite)

Le Brésil de l’or

Après le cycle du sucre commence le cycle de l’or et du diamant (entre 1720 et 1770).

La recherche de l’or provoque la création du Brésil intérieur ; les chercheurs d’or accompagnent les « mamelucos », qui fournissent les plantations côtières en esclaves indiens ; ces raids esclavagistes partent de São Paulo vers l’ouest, le nord et le sud, tandis que l’or engendre le développement des Minas Gerais, puis du Goiás, qui deviennent des capitaineries indépendantes ; le mouvement arrive jusqu’au Mato Grosso.


Le nouveau Brésil

Ces bouleversements provoquent des conflits très violents entre Blancs portugais et métis mamelucos, qui abandonnent la côte pour s’enfoncer dans l’intérieur. Une nouvelle vague d’immigrants et d’esclaves noirs vient combler le vide laissé par les départs sur les plantations, et le volume de la traite ne cesse d’augmenter. Cette expansion pose des problèmes internationaux, car elle a entraîné le Brésil bien au-delà de la ligne de partage avec l’Espagne ; l’union des deux royaumes d’Espagne et du Portugal (1580-1640) n’avait fait que mettre entre parenthèses le conflit.

L’Espagne et le Portugal, séparés par le vide amazonien, se heurtent sur le Rio de La Plata : l’actuel Uruguay est la conséquence de cet affrontement d’où il est né comme un État tampon. Le Brésil fonde Sacramento, l’Espagne répond par la création de Montevideo, et les deux colonies se font la guerre tandis que le Portugal colonise l’actuel Rio Grande do Sul. Le traité de Madrid en 1750 donne à l’Espagne, moyennant l’annulation du traité de Tordesillas, l’actuel Uruguay ; cela n’empêchera pas la guerre et la campagne militaire de 1777, qui fixe enfin la frontière (traité de San Ildefonso).


Le régime colonial

La mécanique du système colonial est extrêmement simple au départ, à cause du caractère primitif de la culture indienne rencontrée, qui interdit l’établissement d’un type de relations entre conquérants et vaincus tel qu’il existe dans l’Empire espagnol ; tout se réduit à un pouvoir central qui assure la souveraineté de la métropole, veille sur la tranquillité interne, repousse les menaces extérieures et maintient une communauté d’intérêts entre les colons et la métropole. Au cours de l’évolution économique naissent des groupes qui, petit à petit, s’efforcent de mettre en place des moyens d’expression politique ; c’est une organisation fondée sur l’existence de chambres communales, qui donne aux grands propriétaires terriens la possibilité de s’exprimer ; ces chambres, théoriquement limitées à leur circonscription géographique, sont capables, en fait, de s’adresser directement, dans certains cas, à Lisbonne. Elles fixent les salaires, les prix, discutent du cours de la monnaie, des impôts de la Couronne, et de toutes les affaires économiques locales ; il leur arrive même de déposer le gouverneur ou le « capitaine ». Sur le plan local, les propriétaires terriens sont, au départ, la seule force réelle, jouissant du prestige que donne la puissance ; avec l’arrivée des commerçants, dont la participation à la vie brésilienne va croissant et qui se trouvent directement associés à l’économie mondiale, en passant par Lisbonne, la situation devient plus complexe, et le pouvoir politique n’est plus monopolisé.

Quant au reste de la population (2 millions à la fin du xviiie s.), elle ne participe pas aux activités politiques naissantes. Évidemment pas les esclaves qui vivent sur les plantations sucrières du Nord-Est. Pas non plus la population urbaine de petits commerçants et d’artisans, ni la population rurale de Blancs et de métis. Pour les élections aux chambres communales, seuls les « gentilshommes » (c’est ainsi que les propriétaires se nomment eux-mêmes) disposent du droit de vote.


L’empire


L’indépendance

Ici encore le Brésil tourne le dos au reste du continent. Lui seront épargnées la saignée et la dévastation des guerres de l’indépendance, puis l’anarchie du premier tiers du xixe s., qui furent le lot du reste de l’Amérique latine.

L’occupation du Portugal par les armées de Napoléon et l’arrivée de la Cour à Rio de Janeiro (1808) font du Brésil la métropole, la tête de l’empire, si bien que le loyalisme va dans le sens d’une promotion. Il n’y aura pas de rupture, pas de crise et cela explique que de 1800 à 1830 la croissance démographique soit ininterrompue : de 3,6 millions le Brésil passe à 5,3 millions d’habitants.

Sur le plan extérieur joue la bénéfique alliance anglaise, à l’intérieur l’arrivée de la Cour se traduit par un apport de capitaux et de capacités techniques. Le Brésil est doté de toutes les caractéristiques d’un État indépendant : imprimerie nationale, bibliothèque royale, Académie des beaux-arts, autant de signes révélateurs. Au congrès de Vienne (1814-1815), sur une suggestion de Talleyrand, le prince-régent, proclamé roi sous le nom de Jean VI, élève le Brésil au rang de royaume égal au Portugal. C’est pour cela que le soulèvement de Pernambouc, en 1817, n’est pas tant un mouvement pour l’indépendance qu’un mouvement révolutionnaire interne, révélateur de la profonde crise du vieux Brésil du Nord-Est, crise qui n’a pas encore été dénouée aujourd’hui. La révolution de Recife, capitale du Pernambouc, dure soixante-quinze jours ; étrange révolution à laquelle participent intellectuels et prêtres, qui rêvent d’un coup de main sur Sainte-Hélène pour délivrer Napoléon et le mettre à la tête d’une armée de libération continentale...

Les liens avec le Portugal sont coupés sans peine ; le Portugal s’agite pour se libérer de l’allié britannique, et une révolution libérale triomphe en 1821, qui rappelle le roi à Lisbonne, bien malgré lui. Jean VI laisse tous les pouvoirs à son fils Pedro (ou Pierre). Les Cortes de Lisbonne ayant pris des mesures vexatoires pour le Brésil et obligé le roi Jean à rappeler son fils, celui-ci proclame l’indépendance du Brésil. La chance du Brésil est d’éviter la violence. Le 12 octobre 1822 Pierre se proclame empereur constitutionnel du Brésil ; toutes les provinces le reconnaissent, l’expulsion des garnisons portugaises s’opère sans drame.