Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Bourse de commerce (suite)

 R. Villemer, la Réglementation de la Bourse de commerce de Paris (Libr. sociale et économique, 1939). / G. Gold, Modern Commodity Trading Futures (New York, 1961). / G. Tardieu et F. de La Morandière, la Bourse de commerce de Paris. Remisiers et clientèle particulière (L. G. D. J., 1970). / A. Saclé et M. Goldschmidt, le Marché à terme (Éd. d’Organisation, 1974).

Bourse de valeurs

Marché officiel organisé sur lequel s’effectuent publiquement les négociations des valeurs mobilières dont la cotation est assurée quotidiennement. Il y a dans le monde plus de 170 Bourses de valeurs réparties sur le territoire de 46 pays.



Historique

L’origine première des marchés remonte aux temps les plus reculés, à l’âge du troc.

Après l’invention de la banque* par les Assyriens et de la monnaie* par les Grecs, les Romains imaginent ce que sont les actuelles Bourses de valeurs mobilières. Les dispositions de leur droit public, l’organisation des lieux où s’opèrent les transactions et le nombre des valeurs négociées en sont une préfiguration précise. La classe des publicains, sorte de bourgeoisie financière, se réserve l’exclusivité des adjudications pour les embellissements de Rome, les fournitures aux armées et bien d’autres entreprises. Devant l’importance croissante des capitaux nécessaires à leurs activités, ils doivent bientôt constituer des sociétés en commandite, dont ils proposent les actions au grand public. Ces parts, nominatives et cessibles par voie de transfert, s’échangent à un rythme rapide dans de somptueuses basiliques édifiées à cet effet.

Il faut attendre le Moyen Âge pour que des grandes foires marchandes périodiques renaisse l’idée de réunions permanentes où les négociations sur les titres soient toutes concentrées en un même lieu. La dénomination en est alors imprécise : « place », « loge », « change », « convention », « estrade » sont pratiquement synonymes. C’est à Bruges, dit-on, que la Bourse va trouver son nom, dans la maison du marchand Van de Bürse, dont la porte s’orne d’un écusson portant trois bourses. La première des Bourses est celle d’Anvers, née en 1531 ; peu d’années après apparaît en France la Bourse de Lyon, puis celles de Toulouse (1549), de Paris (1563), de Rouen (1566) et de Bordeaux (1571). Aux changeurs qui, depuis 1141, sont établis sur le Pont-au-Change pour régler les transactions se sont progressivement adjoints les courtiers de banque et de change, intermédiaires habilités à faciliter les règlements commerciaux entre acheteurs et vendeurs moyennant une commission.

L’histoire de la Bourse suit étroitement celle des entreprises et de leur financement. L’aventure coloniale, en suscitant de grandes compagnies proches des sociétés modernes par actions, en marque la première étape. Après la Compagnie de la Nouvelle-France, celles du Morbihan et de Saint-Christophe, la Compagnie française des Indes orientales est créée par Colbert en 1664. De fusion en fusion naît la Compagnie des Indes, dont le promoteur est le financier écossais John Law (1671-1729). Les actions de cette compagnie, qui pour la première fois sont au porteur, sont négociées dans une cour du palais de justice, la cour du Mai, puis rue Quincampoix, où la spéculation bat son plein. En mars 1720, après l’effondrement du « système » de Law, interdiction est faite à toute personne, sauf aux agents de change, de négocier du « papier » dans un lieu public. Les arrêts du 24 septembre et du 14 octobre 1724 confirment ce monopole des agents de change et confèrent la qualité de Bourse à ce qui n’était jusqu’ici que « la maison commune des marchands de Paris ».

Officiellement reconnue par le gouvernement royal, la Bourse s’organise progressivement. Soumises à l’autorité du lieutenant général de police, les séances se déroulent de 10 à 13 h. Y sont admis les professionnels ainsi que les particuliers au domicile fixe, à l’exception des femmes ; les étrangers y ont accès sur autorisation. L’institution d’un parquet modifie par ailleurs l’aspect de la Bourse ; jouxtant ce lieu surélevé où se regroupent les seuls agents de change, se crée une allée que bientôt on appellera la coulisse. La Bourse ne trouve cependant pas de domicile fixe avant 1827. Son existence errante la mène de l’hôtel de Soissons à celui de la Compagnie des Indes, sis rue Vivienne, de l’église des Petits-Pères à une galerie du Palais-Royal.

Les fonds d’État constituent l’essentiel de l’activité des agents de change jusqu’à la Restauration ; c’est pourquoi, pendant une longue période, la Bourse est étroitement influencée par les bouleversements politiques. Successivement adulée pour les richesses qu’elle draine et suspectée pour ses sautes d’humeur inopportunes, elle ne trouve enfin une réglementation stable que sous l’Empire, qui lui donne également un édifice digne d’elle.

La loi du 19 mars 1801 et l’article 76 du Code de commerce de 1807 organisent la Compagnie des agents de change, qui compte alors 80 membres, tout en définissant avec précision son rôle et celui du marché boursier. En 1827, la Bourse s’installe définitivement dans le palais conçu par l’architecte Alexandre Théodore Brongniart (1739-1813). Elle y cohabite avec le Tribunal de commerce jusqu’en 1864. Engendrée par le progrès technique et la lente progression du capitalisme, l’industrie est véritablement née en France au cours des dernières années de la Restauration et au début du second Empire. À cette époque, la cote officielle compte, à côté des fonds d’État, de nombreuses valeurs financières, et les sociétés de chemins de fer y font leur apparition. La place de Paris domine le continent. En 1832, pour la première fois, les marchés à terme sur les valeurs mobilières sont admis par les tribunaux, mais ils ne seront reconnus par le législateur qu’en 1885. Après 1870, l’industrie se développe, s’amplifie, se diversifie. La Bourse, extrêmement active, lui fournit des capitaux en abondance. La Compagnie des agents de change, à qui la Ville de Paris loue le palais, doit lui adjoindre deux ailes au début du siècle afin d’aménager de nouveaux groupes de cotation. En 1962, une réforme unifie le marché de Paris en supprimant les courtiers en valeurs mobilières, successeurs des coulissiers, et en créant un marché hors cote. Une seconde réforme, en 1967, place toutes les Bourses françaises sous l’égide d’une seule Compagnie des agents de change, composée à l’heure actuelle de 107 membres.