Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Boris Ier (suite)

En 864 eut lieu, sur décision du roi Boris, la conversion du peuple bulgare au christianisme. Cet acte était dicté par le désir de renforcer le pouvoir central et de permettre à la Bulgarie de prendre place parmi les États chrétiens de l’Europe médiévale. La conversion se déroula selon le mode byzantin, après des négociations entre le roi Boris Ier et l’empereur byzantin Michel III. En vue de fonder une Église autonome bulgare, Boris Ier avait louvoyé un certain temps entre Rome et Constantinople, en profitant du conflit opposant le patriarche Photios au pape Nicolas Ier. En 869-70, au cours du concile de Constantinople, il fut décidé que la Bulgarie resterait dans la sphère religieuse de Byzance, mais l’Église bulgare avait obtenu en fait son autonomie.

À cette époque, l’alphabet slave existait déjà (créé par les deux frères Cyrille et Méthode de Thessalonique), mais il n’était employé que dans l’État slave de Grande-Moravie. En Bulgarie, la langue liturgique était le grec, qui était considéré comme la langue officielle et littéraire. Pour mettre un terme à cette situation anormale, qui contrecarrait le développement de la culture purement bulgare, le roi Boris Ier profita de la venue des disciples de Cyrille et Méthode, qui, chassés de la Grande-Moravie (885), s’installèrent en Bulgarie. Sur ses ordres, Clément fut envoyé dans les régions du Sud-Ouest bulgare (l’actuelle Macédoine), où il fonda une école d’études littéraires avec comme centre la ville d’Ohrid. En très peu de temps, il forma dans cette école plus de 3 500 prêtres et instituteurs, qui se dispersèrent dans tout le pays. En même temps fut fondée une autre école d’études littéraires à Preslav, dirigée par Naoum.

En 889, Boris Ier renonça au trône pour se retirer dans un monastère. Son successeur, le prince Vladimir (889-893), essaya de rétablir l’ancienne religion païenne, mais ne réussit pas. Boris quitta le monastère, destitua Vladimir et le remplaça sur le trône par son fils cadet, Siméon. Le concile convoqué à cette occasion à Preslav prit la décision de proscrire la langue grecque, considérée jusque-là comme officielle, et d’instituer comme langue officielle religieuse et littéraire la langue slavo-bulgare.

P. P.

➙ Bulgarie.

 V. N. Zlatarski, Histoire de l’État bulgare au Moyen Âge, t. I (en bulgare, Sofia, 1927). / V. Guzelev, le Prince Boris (en bulgare, Sofia, 1969).

Bornéo

La plus grande île de l’Insulinde ; environ 750 000 km2.


Traversée, à peu près en son milieu, par l’équateur, Bornéo est politiquement divisée en trois parties. La majeure partie de l’île (539 500 km2 ; 5 152 000 hab.) appartient à l’Indonésie et le nom de Kalimantan doit lui être réservé ; la partie nord-ouest, Sarawak (125 000 km2 ; 977 000 hab., capit. Kukhing) et Sabah (76 000 km2 ; 656 000 hab., capit. Kota Kinabalu), fait partie de la fédération de Malaysia, mais, entre ces deux États, Brunei (5 800 km2 ; 145 000 hab., capit. Bandar Seri Begawan) est resté un protectorat britannique.


Le milieu

Bornéo est une terre équatoriale hostile à l’homme. Le climat est un des plus typiques qui soient, constamment chaud et constamment humide. Pontianak, sur la côte ouest, a une moyenne de 27 °C pratiquement immuable et reçoit 3 180 mm de pluie en 185 jours : il pleut un jour sur deux, et le mois le moins arrosé accuse 167 mm de pluie. Dans la plupart des stations de l’île, les douze mois de l’année reçoivent plus de 100 mm de pluie ; la seule exception est, au sud-est, Banjermassin (Banjarmasin), où les pluies sont inférieures à 100 mm de juillet à septembre.

L’île est une immense forêt, forêt dense sempervirente, de type hygrophile à strates superposées, riche en lianes et épiphytes, interrompue par de grands espaces marécageux (danau) sur sols tourbeux, très acides. Faute de vraie saison sèche, cette forêt est difficile à brûler, et la technique de la culture sur brûlis est difficile à pratiquer. Les côtes, basses, plates, vaseuses, sont occupées par la mangrove à palétuviers, où les Rhizophora conjugata et micromata, à racines aériennes, constituent un obstacle considérable. Les rivières sont souvent barrées à leur embouchure par des bancs de sable et coupées, très tôt, par des rapides ; elles sont donc de très médiocres voies de pénétration. Enfin, les côtes sont, à l’est, frangées d’une barrière presque continue de récifs coralliens.

Dans ces conditions, l’île est mal connue. Le cœur en est montagneux : monts Madi et monts Schwaner, culminant à 2 278 m (au Bukit Raja), mais généralement beaucoup moins élevés ; s’y accolent au nord la chaîne sud-ouest - nord-est des monts Kapuas, qui forme la frontière entre Kalimantan et Sarawak, et qui se prolonge dans Sabah, où le Kinabalu atteint 4 101 m, et à l’est la chaîne méridienne des monts Meratus, qui atteint 1 897 m au Gunung Besar. Cette dernière chaîne est parallèle à la côte est ; ailleurs, de vastes plaines alluviales construites par le Kapuas, le Rayang et le Barito séparent les montagnes de la mer. Ce relief massif et confus correspond aux deux zones structurales de l’Asie du Sud-Est. La presque totalité de l’île est une zone consolidée de longue date, une portion du « pseudo-socle de la Sonde », socle ici crétacé, avec sa couverture horizontale discordante de grès éocènes détritiques. Les monts Meratus et les monts Kapuas sont des montagnes jeunes (pliocènes), mais sans volcanisme actuel, en bordure de mers profondes (mer de Sulu : 4 000 m ; mer de Sulawesi ou des Célèbes : 5 500 m) ; ils peuvent être rattachés à l’« Arc externe » de l’Insulinde.


Les hommes et les activités

Bornéo est peu peuplée (environ 7 millions d’hab. au total) ; Kalimantan, Sarawak et Sabah ont de 8 à 10 hab. au kilomètre carré. Les zones côtières ont quelque population (Kalimantan Ouest a 13 hab. au km2, et Kalimantan Sud 45), mais le centre est presque vide : Kalimantan Centre a 4 habitants au kilomètre carré, et ce chiffre est, sans doute, surévalué ; de bons observateurs (P. Pfeffer) estiment que la densité ne doit pas dépasser 1 habitant au kilomètre carré. Dans l’est de l’île, les Pounans, ethniquement mal définis, vivent par petits groupes nomades ; ils chassent le sanglier à la lance, les oiseaux ou les singes à la sarbacane ; leur existence comporte une alternance de festins, lorsque la chasse a été fructueuse, et de longues disettes. Les Dayaks, divisés en nombreuses tribus, sont des « Proto-Malais » de langue malayo-polynésienne. Comme les autres populations de l’Insulinde, ils n’ont subi ni l’influence de l’Inde ni celle de l’islām ; ils n’ont pas d’alphabet et sont animistes (quand ils n’ont pas été christianisés). Ils pratiquent le ladang, la culture sur brûlis à longue jachère. Mais, sous ce climat à pluies continuelles, il leur faut attendre une série de jours secs après avoir abattu les arbres, ce qui intervient assez souvent en janvier. Par ailleurs, le ladang est, dès la récolte du paddy, envahi par une végétation forestière et doit être laissé en jachère. Dans ces conditions, il faut se déplacer fréquemment. Les Dayaks habitent des maisons sur pilotis hauts, qui peuvent atteindre 200 m de long et être peuplées de plusieurs centaines d’individus ; chaque ménage descendant d’un même ancêtre y dispose d’une cellule et d’un foyer. Aux ressources du ladang (2 ha par ménage en moyenne), qui donne riz, manioc, tabac, les Dayaks ajoutent celles de la chasse aux sangliers et de la cueillette de produits forestiers.