Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

bombe nucléaire (suite)

• Dans les phénomènes de fusion, la perte de masse résultant de l’accolement des noyaux de certains éléments légers est de l’ordre du centième de la masse des constituants de départ. Les éléments légers qui interviennent sont le deutérium et le tritium . À la différence de la réaction en chaîne par fission, qui démarre spontanément, les réactions de fusion doivent être amorcées par la réalisation de très hautes températures. Quand on essaie en effet d’accoler des noyaux légers, il se développe des forces de répulsion ; pour les vaincre, il faut communiquer à ces particules une énergie cinétique considérable, et, pour cela, il faut monter dans l’échelle des températures (c’est pourquoi on appelle aussi ces bombes bombes thermonucléaires). La solution la plus simple consiste à prendre comme détonateur un engin de fission, mais, pour obtenir ces hautes températures, on pourrait imaginer d’autres procédés : concentration de charge creuse, décharge dans les gaz raréfiés, dispositif utilisant les ondes de choc...


Les bombes nucléaires de fission

Le 2 décembre 1942, Enrico Fermi* et son équipe mirent en œuvre dans les sous-sols du stade de Chicago une petite pile atomique et réussirent, en empilant des barreaux d’uranium et des barres de graphite, à provoquer la première réaction en chaîne. Cette réalisation fut ignorée du grand public, et ce furent les explosions d’août 1945 sur le Japon, qui révélèrent au monde la puissance de l’énergie nucléaire. Les Américains possédaient en 1945 au moins trois bombes atomiques. Ils expérimentèrent la première le 16 juillet à Alamogordo, dans le désert du Nevada, puis ils lancèrent au début d’août les deux autres sur Hiroshima et Nagasaki.


La bombe d’Hiroshima

Le 6 août 1945, à 8 h 15, un bombardier américain « B-29 », l’Enola Gay, qui avait décollé de l’île de Tinian (Mariannes), larguait à 600 m d’altitude la première bombe atomique sur la ville d’Hiroshima (250 000 hab.). Les statistiques américaines évaluent les effets de cette explosion à 72 000 morts, 80 000 blessés, 12 km2 de la ville rasés, 60 000 maisons détruites sur 90 000.

• Nature et mise en œuvre de la bombe. Cet engin, qui pesait 4,5 t, était à l’uranium 235. Pour le fabriquer, les Américains avaient installé à Los Alamos un centre de recherches et construit d’immenses usines à Oak Ridge (Tennessee). Après avoir envisagé divers procédés, ils adoptèrent finalement la méthode de diffusion gazeuse.

Au moment de la fission du noyau d’uranium 235, deux à trois neutrons en moyenne sont éjectés, lesquels peuvent fissionner les noyaux des atomes voisins et déclencher la réaction en chaîne. Pour que celle-ci prenne un caractère explosif, il est nécessaire qu’il y ait un certain volume d’uranium 235, dit « volume critique », et partant une certaine masse appelée « masse critique », dont la valeur est fonction de la forme de l’engin, de la nature et de la pureté du métal utilisé.

• Énergie dégagée par l’explosion. On évalue à 5 p. 100 le rendement de la bombe d’Hiroshima ; si l’on adopte comme valeur de la masse critique le chiffre de 20 kg initialement donné par les Américains, un kilo d’uranium 235 a donc eu ses noyaux fissionnés. Les pertes de masse dans le phénomène de fission étant de un pour mille, il y a donc eu perte de masse d’un gramme. Si l’on transforme en énergie, suivant la relation d’Einstein, ce gramme de matière, on calcule que l’énergie apparue lors de l’explosion est égale à 25 millions de kWh : c’est celle qui serait nécessaire pour soulever 92 000 t à 100 km de hauteur.

Selon les Américains, pour obtenir la même quantité d’énergie, il aurait fallu faire exploser environ 20 000 t (ou 20 kt) de trinitrotoluène (T. N. T.). Le chiffre de 13 000 t de T. N. T. a été donné par les experts français après l’explosion de la première bombe française (1960), mais il y a lieu de préciser qu’il s’agit là d’une notion d’énergie dégagée et non de puissance.

• Les effets de la bombe atomique d’Hiroshima. Bien qu’ils agissent tous simultanément, on classe les dommages résultant d’une explosion nucléaire en effets thermiques, effets dus à l’onde de choc (ou effets mécaniques, ou effets de souffle), qui existent également dans l’explosion d’un projectile classique, et en effets radio-actifs, propres aux explosions nucléaires.

Les dégâts sont évalués à partir du point de rencontre avec le sol de la verticale du point d’éclatement, qu’on appelle point zéro. La radio-activité n’est responsable que de 15 p. 100 du nombre total des victimes, alors que les effets dus à l’onde de choc le sont d’un tiers et les effets thermiques de plus de la moitié : à Hiroshima, une victime sur deux était un brûlé.

Effets thermiques.
Au moment d’une explosion nucléaire aérienne apparaît une boule de feu dont la température au centre serait de l’ordre de plusieurs dizaines de millions de degrés. Immédiatement après monte dans le ciel le champignon caractéristique. Après 1,5 × 10−2 s, la température tombe à 5 000 °C, le diamètre de la boule de feu est alors d’une centaine de mètres. Après 10 s, la luminosité a cessé et la boule de feu s’est transformée en un nuage radio-actif dont le diamètre atteint 400 à 500 m. L’explosion est accompagnée d’une émission de radiations thermiques se propageant à la vitesse de la lumière. Il en résulte une double conséquence :
1. Les personnes non protégées sont atteintes dans un rayon de 1 200 m de brûlures mortelles (3e degré, une dizaine de calories au centimètre carré) ; entre 1 200 et 2 400 m, de brûlures graves (2e degré, 6 calories au centimètre carré) ; entre 2 400 et 4 000 m, de brûlures légères ;
2. Un grand nombre de feux s’allument. Sous l’action des radiations thermiques, les corps combustibles peuvent s’enflammer, provoquant un grand nombre d’incendies. Si certaines conditions sont remplies, il peut même se déclencher ce qu’on appelle une tempête de feu une vingtaine de minutes après l’explosion.