Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

bière (suite)

Depuis quelques années, un appareil, le Whirlpool, permet aussi d’éliminer le « gros trouble » et la drêche de houblon selon le principe simple suivant : le moût bouillant est envoyé à grande vitesse dans un tank vertical cylindrique au moyen d’une buse tangentielle. Le moût tourbillonne en formant un vortex et, au cours du ralentissement en trente minutes, il se forme un dépôt de trouble au fond du tank ; le moût sort brillant de l’appareil.

• La fermentation. La fermentation du moût comprend deux étapes principales : la fermentation principale, qui dure de cinq à dix jours selon la densité de la bière, à la température de 8 à 10 °C en fermentation basse ; la fermentation secondaire (ou garde), qui dure de deux à douze semaines, à la température de 0 à 5 °C.

La fermentation principale se déroule dans des cuves parallélépipédiques ouvertes ou fermées (si l’on récupère le gaz carbonique de la fermentation), dans des foudres cylindriques horizontaux, dans des tanks cylindro-coniques, tout matériel muni d’un dispositif de refroidissement manuel ou automatique du moût en fermentation (serpentins ou double enveloppe). Le matériel se fait principalement en aluminium ou en acier inoxydable.

Au cours de la fermentation principale, après une phase de latence, la levure se multiplie activement et fermente les oses du moût de façon préférentielle, dans l’ordre suivant : saccharose, glucose, maltose, maltotriose.

L’azote assimilable du moût contribue à la multiplication cellulaire et à la synthèse des enzymes (perméases, maltase) nécessaire à la fermentation des oses. La levure assimile environ 50 p. 100 de l’azote du moût.

Les facteurs de croissance (vitamines du groupe B) sont indispensables à la bonne marche de la fermentation et ils sont apportés par le malt.

Au cours de la fermentation principale, la levure produit des substances volatiles qui vont constituer le parfum de la bière (alcools supérieurs ou fusels, aldéhydes, esters, acides organiques). L’étude scientifique de ces composants a été réalisée ces dernières années grâce à la chromatographie en phase gazeuse.

La bière voit son pH diminuer en cours de fermentation vers 4-4,4.

Certaines bières spéciales, comme le « lambic », peuvent avoir un pH très acide, de l’ordre de 3.

Après une phase active de fermentation, qui se traduit par un fort dégagement de gaz carbonique et la formation de mousses blanches à la surface du moût, la levure flocule dans le bas de la cuve en fermentation basse, et d’autant mieux qu’on refroidit brutalement le moût en fin de fermentation principale lorsqu’il a atteint la densité désirée. Cette levure est récoltée et utilisée pour la fermentation suivante (on récolte de deux à quatre fois la quantité de levure ensemencée).

À une fermentation correspond ce qu’on appelle une génération de levure ; on peut utiliser la levure sans ennuis durant six à huit générations, après quoi il peut survenir une baisse d’activité de la levure, appelée dégénérescence. On repart alors de la souche pure de levure et d’une nouvelle propagation à partir du stade laboratoire.

À la fin de la fermentation principale, le moût contient encore l’extrait nécessaire pour assurer en garde la fermentation secondaire, où la bière va subir sa maturation. L’opération de transfert du moût de fermentation principale en fermentation secondaire se dénomme le traversage.

Au cours de la fermentation principale, on peut récupérer environ 3 kg de gaz carbonique par hectolitre de bière fabriquée.

La fermentation secondaire, ou garde, va permettre d’achever la fermentation, de saturer la bière en gaz carbonique naturel (de 4,5 à 5 g de CO2 par litre), d’affiner la bière (maturation), de précipiter le trouble au froid de la bière de constitution protéo-tannique. Cette maturation peut durer deux semaines pour une bière bock et six à douze semaines pour une bière de luxe ; on évite toute oxydation de la bière, et cela depuis le début de la fermentation. Pour chaque bière, il existe une durée optimale de garde.

Au cours de la fermentation secondaire, on peut traiter la bière en vue de lui assurer une bonne stabilité colloïdale une fois soutirée et stockée (réducteurs, bentonites, gel de silice, tanins, enzymes protéolytiques).

Aux États-Unis, la fermentation secondaire comprend deux phases ; la première dure de une à trois semaines, puis, après une filtration grossière, la bière part dans une cave de maturation et de traitement (finishing) pendant à peu près le même temps.

Dans certaines bières belges, dites « des trappistes », la bière filtrée est mise en bouteilles avec un peu de sirop de sucre et une levure spéciale. Une fermentation tertiaire se produit alors dans une chambre d’incubation à 25 °C ; la levure spéciale fermente, puis flocule et va se coller au fond de la bouteille. La bière a une forte saturation et gagne un goût spécial très agréable.

Depuis la réfrigération du moût, le brasseur est obligé de travailler en milieu stérile, car le moût est un milieu nutritif très fragile. En effet, les bactéries lactiques (sarcines, Lactobacillus pastorianus) sont des bactéries d’infection très dangereuses pour la bière, qui, infectée, s’acidifie, se trouble et devient imbuvable.

Le brasseur prend donc des mesures spéciales de nettoyage, de désinfection et de stérilisation de son matériel et de ses locaux.

• La filtration de la bière. Elle a pour but de la rendre brillante en éliminant les levures en suspension de la fermentation secondaire et le trouble au froid formé en cave de garde : au cours de la filtration, si elle est très serrée, il peut y avoir une légère absorption de matières amères et de substances moussantes.

Autrefois, on filtrait la bière dans un filtre à masse, dont les gâteaux de masse filtrante étaient constitués de fibres de coton et d’amiante. Ce procédé est désormais remplacé par la filtration sur kieselguhr.

Le kieselguhr provient d’une roche fossile contenant des carapaces de Diatomées marines ou d’eau douce de 1 à 15 microns. La roche est broyée, calcinée et calibrée afin d’obtenir des adjuvants de filtration de différentes caractéristiques (rapides, moyens, lents).