Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

bétonnage (suite)

Coffrages et moules

Éléments très importants dans le bétonnage, tant pour le respect des formes et des cotes que pour l’aspect du béton en place, les coffrages sont coûteux : le plus souvent, ils représentent environ 40 p. 100 du prix de la construction. Leur conception nécessite une étude minutieuse et des calculs précis. De plus, leur réalisation doit être parfaite. Au point de vue économique, il faut rechercher la mise en place des plus grands panneaux possibles, et songer aux possibilités de réemploi ultérieur. Rendus indéformables par des raidisseurs appropriés, les panneaux ne doivent pas « buter » sur les échafaudages, mais prendre appui sur les parties inférieures du béton déjà durci ; si nécessaire, ils sont entretoisés à la partie supérieure. Ils doivent être étanches et non absorbants, à surface nette et polie ; à ces points de vue, les coffrages en acier sont préférables aux coffrages en bois. Il faut éviter de clouer les coffrages, car ils deviennent rapidement inutilisables et difficiles à décoffrer. Pour éviter l’adhérence au béton, surtout avec le bois, on enduit la face interne des coffrages avec un produit de décoffrage, huiles solubles par exemple, en évitant les huiles de moteur usées.

On décoffre au bout de quelques jours s’il fait chaud ou si le ciment est à haute résistance initiale ; mais il faut parfois attendre 12, 15 et même 18 jours, selon la température, afin que le béton ait suffisamment durci. Les parties non coffrées, ou celles fraîchement décoffrées, doivent être protégées contre la dessiccation et le retrait par pulvérisation d’un vernis temporaire dénommé curing compound, ou produit de cure.

Outre les coffrages en bois et en acier, on réalise actuellement des coffrages en alliage léger, à base d’aluminium, ou très léger, à base de magnésium ; mais il sont assez coûteux, et, surtout, il faut soigneusement les isoler du béton par une couche régulière d’huile de décoffrage, car l’aluminium attaque le ciment en cours de durcissement, en raison de la chaux mise en liberté.

Il existe aussi des coffrages « glissants » ou grimpants, les panneaux inférieurs étant déplacés au-dessus de la partie coulée et durcie, lorsque cette dernière peut être démoulée. Les moules sont notamment utilisés pour les pièces préfabriquées.


Mise en place et compactage du béton

Le béton coulé se met en place de lui-même, comme un liquide visqueux. Le béton plastique s’étale par vibration. Le béton ferme s’étale à la main, ou mécaniquement pour les grandes surfaces telles que radiers, plots de barrage, etc.

Le compactage du béton se fait suivant différentes méthodes, exposées ci-dessous.

• La compression appliquée progressivement est surtout usitée pour la fabrication d’éléments moulés, concurremment avec l’action d’une « table à secousses ».

• Le damage, ou pilonnage, est le procédé courant pour compacter des bétons qui ne nécessitent ou ne supportent pas la vibration ; on se sert de dames, de pilons, de battes ou de fouloirs ; mus à l’air comprimé, ces derniers portent le nom de pilettes. Les pilons et les battes sont surtout utilisés pour le béton armé, que l’on pilonne par couches.

• Le piquage, complément fréquent du pilonnage, consiste à faire pénétrer dans la masse de béton des tiges de fer qui détruisent la stratification, imbriquent le gros granulat et aident à l’évacuation de l’air. Cependant, employé seul, le piquage n’est pas toujours très efficace.

• La force centrifuge, qui peut être très élevée si la rotation est rapide, est utilisée pour certains produits, mais il y a ségrégation, les gros éléments étant rejetés vers la paroi externe. Pour la fabrication des tuyaux et conduites, la centrifugation donne une texture rationnelle, la rugosité de surface étant effacée par la laitance (ou coulis des grains les plus fins du ciment dans un lait de chaux).

• La vibration est le mode le plus fréquent de compactage des bétons fermes, gâchés à consistance de terre humide.

La vibration simple, ou vibration externe, s’effectue par l’intermédiaire des parois des moules ou des coffrages, notamment au moyen de vibreurs électromagnétiques, tandis que la pervibration, ou vibration interne, s’opère au moyen de pervibrateurs de formes diverses, qui flottent et mettent en vibration toute la masse. L’effet de la vibration ou celui, plus accentué, de la pervibration est de diminuer le frottement interne des éléments solides, qui, entrant eux-mêmes en vibration, n’ont de contact direct que pendant une très courte durée. Il en résulte un accroissement considérable de la fluidité du béton, ce qui permet l’évacuation de l’air et une mise en place facile, même pour des bétons frais normalement raides et fermes. Ayant été gâchés avec moins d’eau, les bétons vibres ont un poids spécifique ainsi qu’une compacité et une résistance mécanique considérablement accrus. Leur retrait est diminué ainsi que leur perméabilité ; enfin le fluage est réduit, tandis que sont fortement accrus d’une part le module d’élasticité, d’autre part l’adhérence du béton aux armatures.

L’efficacité dépend du choix de la fréquence et de l’amplitude des vibrations, qui sont fonction des masses à vibrer et doivent être, dans le cas du béton armé, en rapport avec la dimension des armatures ; on poursuit l’opération jusqu’à totale évacuation de l’air et reflux de la laitance. Les vibrateurs les plus efficaces sont ceux qui sont à fréquence élevée et à faible amplitude pour une même énergie mise en œuvre, les grains fins et très fins ne pouvant être mobilisés que par des vibrations à fréquence très élevée. La fréquence optimale doit être d’autant plus élevée que les grains sont plus fins et en plus grande abondance dans la masse : elle varie en moyenne de 50 Hz, pour les gravillons, à 125 pour les sables et à 300 pour les grains les plus fins, y compris le ciment. Il ne faut, toutefois, jamais vibrer des bétons frais gâchés très plastiques, ce qui détériorerait leur texture : la vibration n’est profitable qu’aux bétons pour lesquels elle est précisément indispensable. Une durée de vibration trop prolongée, ou survibration, est, en général, nuisible, car il se produit une ségrégation des éléments et une perte d’homogénéité. Toutefois, l’effet de la survibration est peu sensible pour les bétons gâchés avec très peu d’eau et pauvres en mortier. La pervibration s’opère à l’aide de grandes aiguilles que l’on enfonce dans la masse et qui sont mises en vibration soit par le choc d’un piston sur le fond d’un cylindre, soit par la rotation très rapide d’un petit volant muni d’une masse excentrée. Oh utilise soit l’air comprimé, soit l’énergie électrique, soit encore l’énergie d’un moteur à essence. Les pervibrateurs nains permettent de vibrer le fond des coffrages étroits et surtout montés à l’avance sur une très grande hauteur. Dans les grands ouvrages (barrages, ouvrages maritimes), on utilise de grands vibrateurs pour vibrer très rapidement des bétons très raides et très secs ou des bétons cyclopéens à très gros éléments ; ils fonctionnent à l’air comprimé sous haute pression (5 à 7 bars) ; ils peuvent serrer de 25 à 40 m3/h. Le béton est vibré par couches dont l’épaisseur est un peu supérieure à celle dont l’aiguille pervibrante peut s’enfoncer dans la masse ; les vibrateurs internes sont enfoncés verticalement à des distances de 40 à 50 cm l’un de l’autre, répartis en quinconce, parfois en quadrillage. Le vibrateur doit traverser la couche fraîchement mise en place, mais ne doit pénétrer dans la couche inférieure que si le béton de dessous peut redevenir « plastique » sous l’effet de la vibration. On peut vibrer tardivement le béton qui, ayant achevé sa prise, n’a toutefois pas atteint un début de durcissement excessif. Dans le cas du béton armé, il ne faut jamais, en principe, vibrer par l’intermédiaire des armatures. Les vibrateurs internes ne doivent jamais toucher les coffrages, qui se cintreraient.