Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Ben Gourion (David) (suite)

En commun avec Isaac Ben Zvi (deuxième président d’Israël), Ben Gourion a publié à New York, en 1918, un ouvrage en yiddish sous le titre de Terre d’Israël dans le passé et le présent. Il a traduit en hébreu l’œuvre de Werner Sombart sur le socialisme et les mouvements sociaux au xixe s. On a aussi de lui, en hébreu, une dizaine de volumes, dont certains touchent à l’histoire juive et au mouvement sioniste.

H. S.

➙ Israël / Sionisme.

 M. Edelman, Ben Gurion, a Political Biography (Londres, 1964 ; trad. fr. Ben Gourion, Pr. de la Cité, 1965). / M. Bar-Zohar, Ben Gourion, le prophète armé (Fayard, 1966).

Bénin

Royaume de la forêt guinéenne qui, au moment de sa plus grande extension, semble avoir été limité par le Niger à l’est et la mer au sud, avoir atteint Ouidah (Dahomey) à l’ouest et établi entre le 7e et le 8e parallèle sa frontière avec les Yoroubas.


Certaines traditions font des Binis (ou Edos) des autochtones longtemps gouvernés par une dynastie semi-mythique d’egiso, ou fils du ciel. La linguistique et l’archéologie confirmeraient l’ancienneté d’une civilisation originale. D’autres traditions, très ancrées, rattachent le Bénin à Ife*. Eweka Ier fut, entre le xiie et le xive s., le premier oba, ou roi historique. À la fin du xve s., les Portugais visitèrent le Bénin, qui accueillit même des missionnaires. Du xvie au xixe s., le Bénin passa par des phases encore mal connues d’expansion et de contraction. Les communautés côtières s’enrichirent par la traite des esclaves et secouèrent sa tutelle (Lagos en 1830). Le Bénin proprement dit, qui semble avoir fourni aux Européens plus de poivre et d’ivoire que d’esclaves, se renferma sur lui-même, conservant intacts une religion animiste très élaborée et un système politique dont le village divisé en classes d’âge formait la base et un roi-dieu l’autorité suprême.

L’oba, caché dans son palais, accomplissait les rites pour obtenir le salut de l’État.

Des associations très complexes, dont les titres et les grades étaient les uns héréditaires, les autres à la discrétion de l’oba, administraient le royaume.

En 1892, les Anglais imposèrent un traité de protectorat à l’oba Ovenramwen (Overami). En janvier 1897, le massacre d’une mission provoqua une énorme expédition punitive, qui détruisit la ville de Bénin. Pour conjurer le désastre imminent, Ovenramwen avait multiplié les sacrifices humains, qui valurent longtemps au Bénin une sinistre réputation. Ovenramwen fut déporté. À sa mort, en 1914, les Anglais intronisèrent son fils oba.

Les Binis, qui auraient appris d’Ife, au temps de leur sixième oba (fin du xive s.?), l’art de couler le bronze, ont laissé des milliers de pièces artistiques (têtes, plaques, autels) illustrant cinq siècles d’histoire. Certains bronzes et des ivoires sont d’extraordinaires chefs-d’œuvre.

En 1975, les autorités du Dahomey, faisant référence à l’ancien royaume, donnent à leur pays le nouveau nom de République démocratique populaire du Bénin.

D. B.

➙ Afrique noire.

 J. U. Egharevba, A Short History of Benin (Ibadan, 1953 ; 3e éd., 1960 ; 1re éd. en edo, Lagos, 1954). / P. Mercier, Civilisations du Bénin (Soc. continentale d’éd. modernes illustrées, 1962). / W. Fagg, Merveilles de l’art nigérien (Éd. du Chêne, 1964). / M. Palau Marti, le Roi-Dieu au Bénin (Berger-Levrault, 1964).

Benn (Gottfried)

Écrivain allemand (Mansfeld, Prusse, 1886 - Berlin 1956).


Benn fait partie du mouvement expressionniste allemand. Son évangile artistique se place sous le signe de Nietzsche ; il comprend l’art comme « la tâche essentielle de la vie », comme « une activité métaphysique ». Fils d’un pasteur protestant, Gottfried Benn est né dans la Westprignitz. Sa mère, originaire de la Suisse romande, parlait à peine l’allemand. Contraint par son père à faire des études de théologie, il les abandonne vite pour la médecine. Trop sensible, il ne peut réaliser son intention initiale de devenir psychiatre. Cependant, médecin militaire, puis spécialiste des maladies de peau et des maladies vénériennes, il gardera toujours un goût très vif pour la psychologie. Préoccupé des problèmes du génie, il s’intéresse en particulier aux phénomènes de l’hérédité et de la dépersonnalisation. C’est dans sa propre origine et dans l’évolution de son esprit qu’il trouve ample matière à réflexion. « Le mariage de mes parents unissait le sang germain et le sang latin, ces deux éléments prépondérants dans la population européenne, disons même : le caractère allemand et le caractère français », écrit-il en 1934 (Vie d’un intellectualiste). L’alliance de deux races lui semble la base favorable à la naissance d’un génie, et c’est au sein des « vieilles familles de savants et de pasteurs » que se développe « le type de génie spécifiquement allemand », le poète-penseur (Problèmes du génie, 1930). Benn, en effet, est un éminent poète-penseur. Deux fois dans sa vie, il a su exercer une influence prépondérante sur les lettres allemandes. D’abord en 1912, par sa première œuvre, un bref recueil poétique intitulé Morgue, qui fait scandale. Les poèmes évoquent des promenades dans des hôpitaux, des moribonds, une accouchée, une chair en décomposition, l’ambiance des petits cafés à Berlin. C’est un univers sans illusion et sans espoir. Des images crues, présentées sobrement, souvent sur un ton cynique, sans aucune note sentimentale ; ainsi s’annoncent les premiers accents du « nihilisme » de Benn, un nihilisme délibéré qu’il définit en 1931 comme un « sentiment de bonheur » (Discours sur Heinrich Mann).

Dans son premier essai dramatique, Ithaka, paru en 1914, Benn introduit le personnage du docteur Rönne, qui occupe la place centrale dans plusieurs récits qu’il réunit en 1916 pour les publier sous le titre Cerveaux. Rönne, qui reflète le caractère problématique de Benn, se fait dans Ithaka le représentant de l’antirationalisme et de l’irrationalisme ; il devient dans Cerveaux l’image même de la désagrégation. « Rönne [...] ne connaissait plus que des contradictions et des dilatations du moi [...] », écrit Benn dans son autobiographie Double Vie (1950). En 1917, Benn ouvre un cabinet médical à Berlin. En 1922 paraît une première anthologie de ses œuvres. Dans la postface, il s’explique sur sa situation : « Trente-sept ans et totalement liquidé, je n’écris plus rien... je ne lis plus rien... » Cependant, il continue son activité littéraire. Un voyage en France fait naître deux essais — le genre littéraire dans lequel il excelle avant tout —, Paris (1924-1925) et la France et nous (1930), tous deux pleins d’admiration pour la civilisation française. En juillet 1931, Benn a la joie d’accueillir André Gide à Berlin.