Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

administration (suite)

Cet organisme est le juge d’appel :
— des tribunaux administratifs (composés d’un président et d’au moins quatre conseillers, dont l’un remplit les fonctions de commissaire du gouvernement), juridictions de droit commun ;
— des Conseils du contentieux administratif des territoires d’outre-mer ;
— du Conseil des prises. Créé en 1681, supprimé sous la Révolution, rétabli en 1806, supprimé en 1815 puis rétabli en 1854 et réorganisé en 1939, il comprend 8 membres dont un conseiller d’État, président. En droit strict, l’appel est porté devant le chef de l’État, qui le tranche par un décret préparé par le Conseil d’État. Le Conseil des prises est chargé de statuer, en temps de guerre, en droit et en équité, sur la validité de toutes les prises maritimes, même de celles qui ne sont l’objet d’aucune contestation.

Il est le juge de cassation de la Cour des comptes et de la Cour de discipline budgétaire et financière. Cette dernière, créée par la loi du 25 septembre 1948, et dont la compétence a été étendue par la loi du 31 juillet 1963, est composée de six membres désignés pour cinq ans par le gouvernement et choisis par moitiés au sein de la Cour des comptes et du Conseil d’État ; son rôle est de réprimer les fautes de gestion dont peuvent se rendre coupables les agents publics et assimilés. Le Conseil d’État est également le juge de cassation des Cours régionales des pensions, de la Commission centrale d’aide sociale, du Conseil supérieur de l’Éducation nationale, etc.

Les juridictions administratives françaises ont un double rôle : faire respecter la légalité par les administrations et protéger les droits subjectifs des administrés. Leur compétence porte sur tous les actes des administrateurs, y compris les règlements. En Allemagne, les juridictions administratives (créées en 1860) ont essentiellement pour rôle de contrôler la légalité des décisions administratives individuelles, les règlements échappant à leur compétence.

En Union soviétique, où il n’y a pas de juridictions administratives, il existe un procédé juridictionnel de régler les litiges entre les diverses administrations dépendant ou non d’autorités différentes : c’est l’arbitrage rendu par des arbitres tenus de faire application du droit.

Il convient également de noter le rôle important que jouent dans la vie administrative française les membres de la Cour des comptes et du Conseil d’État, tant à l’intérieur des nombreux conseils consultatifs (le Conseil d’État est d’ailleurs l’un d’eux) que dans les cabinets ministériels et les emplois les plus élevés de la haute administration.

Le fonctionnement des juridictions administratives françaises repose sur la coexistence de quatre types de contentieux administratifs.

La Cour des comptes

Tribunal administratif créé en 1807 en vue d’exercer un contrôle administratif sur les ordonnateurs et sur les comptes matières et un contrôle juridictionnel sur les comptes tenus par les comptables de deniers publics (à l’inverse des 13 Chambres des comptes fonctionnant sous l’Ancien Régime et supprimées en 1790, la Cour ne prononce aucune condamnation contre ces comptables eux-mêmes).

Elle apure directement les comptes de l’État (v. budget) et ceux des autres organismes publics dont le montant dépasse un plafond minimal (que ces comptes soient gérés par un comptable officiel ou un comptable de fait) ; elle juge en appel les comptes qui ont été apurés par un trésorier-payeur général (départements) ou un Conseil du contentieux administratif (territoires d’outre-mer). Sa compétence a été étendue aux comptes d’organismes ne constituant pas des collectivités publiques (Caisses de sécurité sociale, organismes percevant des taxes parafiscales, établissements publics de l’État à caractère industriel ou commercial, entreprises nationalisées, sociétés d’économie mixte dont l’État détient au moins la moitié du capital). Ses arrêts peuvent être déférés en cassation au Conseil d’État.

La Cour des comptes se compose d’un Premier président, de cinq présidents de chambres, de conseillers maîtres, de conseillers référendaires et d’auditeurs (issus de l’École nationale d’administration), qui sont des magistrats inamovibles, et d’un ministère public (un procureur général et deux avocats généraux). Les auditeurs ont droit à trois postes sur quatre de conseillers référendaires, le quatrième poste étant à la disposition du gouvernement selon les procédures du « grand extérieur » et du « petit extérieur ».

Les tâches administratives de la Cour se sont accrues depuis la réforme de la comptabilité publique de 1936 et ont été encore affirmées dans la Constitution de 1958 (art. 47 in fine) : « La Cour des comptes assiste le Parlement et le gouvernement dans le contrôle de l’exécution des lois de finances. »

La mission impartie à la Cour porte à la fois sur la régularité et sur l’opportunité des opérations de dépenses ; lors de l’examen des comptes des comptables, la Cour est tout naturellement amenée à constater les irrégularités commises par les administrateurs ; suivant la gravité des fautes, elle adresse une note ou une lettre à l’administrateur, une note de son parquet au chef de service, un référé au ministre responsable, qui est tenu de répondre dans les trois mois.

Chaque année, la Cour adresse au président de la République un « Rapport général », où elle signale les principales irrégularités découvertes au cours de ses investigations (ce rapport est inséré au Journal officiel [la presse en publie de larges extraits]) et où elle expose ses principales observations et propose ses vues de réforme et d’amélioration.


Le contentieux de pleine juridiction

Fait appel au contentieux de pleine juridiction le justiciable qui exerce une action fondée sur la méconnaissance d’un droit. Il s’agit notamment du contentieux de l’exécution des contrats et des quasi-contrats (gestion d’affaires, enrichissement sans cause) lorsqu’une collectivité publique est en cause, du contentieux de la responsabilité de la puissance publique et du contentieux des litiges d’ordre pécuniaire entre une collectivité publique et ses agents.