Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

basques (provinces) (suite)

Pendant quarante ans, le Pays basque espagnol est mis à feu et à sang. En 1834-35, les carlistes, sous le commandement de Tomás de Zumalacárregui (1788-1835), échouent devant Bilbao après avoir remporté plusieurs victoires. En 1841, les fueros de Navarre sont supprimés ; c’est un avertissement à l’égard des autres provinces, qui renforcent alors leur soutien à don Carlos, car celui-ci promet le rétablissement de tous les fueros. En 1876 se termine la dernière guerre carliste : Serrano en est le grand vainqueur. C’est à cette époque que commence l’émigration des Basques vers les États-Unis et l’Argentine. Mais c’est à ce moment-là aussi que la métallurgie prend son essor et que se constitue un prolétariat important de tendance socialiste.


Les premiers pas vers la centralisation

Ayant remporté la victoire, le pouvoir central s’en prend à toutes les institutions basques : les postes d’instituteurs sont confiés à des non-Basques, qui ignorent langue et coutumes du pays ; le droit coutumier est remplacé par le droit romain, et les juges basques par des juges madrilènes ; les jeunes gens sont enrôlés dans l’armée espagnole ; le gouvernement nomme des évêques non originaires de ces provinces, ce qui crée une tension permanente entre le haut et le bas clergé ; le castillan empiète de plus en plus sur l’eskuara. Ce dernier point surtout irrite la population, et, à la fin du xixe s., les intellectuels basques fondent des revues dans leur langue et créent, à l’instigation du juriste Sabino Arana y Goiri (1865-1903), le parti nationaliste basque (1895). Celui-ci acquiert une certaine importance vers 1920 ; la dictature de Primo de Rivera est particulièrement sévère à son égard.

Aux élections de 1931, les Basques votent contre la monarchie, en espérant qu’un régime nouveau leur accordera une grande autonomie.


La république

Après la proclamation de la république, le 14 avril 1931, les Basques, croyant leur heure venue, adoptent à Estella un projet d’autonomie et se rassemblent à Guernica, où ils sont violemment dispersés par la police. Les gouvernements qui se succèdent jusqu’en 1936 rejettent le statut d’autonomie présenté par le parti nationaliste basque aux Cortes.

Les élections de 1936 voient le triomphe du Front populaire, qui est favorable au statut d’autonomie du Pays basque. Bien que la droite y soit violemment opposée, ce statut est voté au mois d’octobre de la même année, et José Antonio Aguirre y Lecube (1903-1960) fonde le gouvernement provisoire d’Euzkadi. Dès le 18 juillet, la Navarre et l’Álava sont passés aux nationalistes, et la coalition militaire groupe les éléments qui ont toujours lutté contre l’autonomisme basque. Le 19 juillet, les troupes de la Phalange saccagent les locaux des journaux basques. Les Basques se rangent alors du côté des républicains, mais leurs divisions internes et l’aide apportée par les Allemands aux franquistes aboutissent à la chute de Bilbao le 19 juin 1937, après le bombardement de Guernica (27 avr.) : c’est la fin de l’autonomie d’Euzkadi ; elle provoque l’exil de nombreux combattants.


De l’après-guerre à nos jours

Dès lors, les autorités de Madrid vont tout faire pour réprimer le nationalisme basque : le statut d’autonomie est aboli en 1937, et le Pays basque est converti en province de droit espagnol ; les « diputaciones » provinciales sont limitées à des fonctions de second plan, telles que la solution des questions relatives aux monuments, aux hôpitaux ou aux routes ; les municipalités sont transformées en simples dépendances du pouvoir central ; la langue basque est interdite. Ces mesures ajoutent à une forte émigration vers le Nouveau Monde, une résistance qui se manifeste par l’existence d’un gouvernement en exil et surtout par une opposition populaire profonde, exprimée en particulier par le mouvement E. T. A. (Euzkadi ta Askatasuna, « le Pays basque et sa liberté ») créé en 1959. Le clergé joue un grand rôle : très près du peuple, il soutient souvent les luttes ouvrières. En réalité, tout comme à Barcelone, à Madrid et à Séville, ce n’est plus seulement l’autonomie que l’on revendique, mais le respect des libertés, et même chez certains une forme de socialisme révolutionnaire, car la génération nouvelle n’a connu ni le nationalisme ni la guerre et n’a plus les mêmes aspirations que celles qui l’ont précédée. En outre, les Espagnols du Sud venus s’installer dans les villes industrielles apportent au Pays basque un élément nouveau de prolétarisation. En décembre 1970, le procès de Burgos, au cours duquel 16 Basques sont jugés pour le meurtre du commissaire Manzanas, provoque une très vive émotion en Espagne et à l’étranger.

R. G.-P.

➙ Carlisme / Espagne.

 R. M. de Labra, Las sociedades económicas de Amigos del País (Madrid, 1943). / A. A. Schulten, Los Cántabros y Astures y su guerra con Roma (Madrid, 1943). / F. Castro Guisasola, El enigma del vascuence ante las lenguas indoeuropeas (Madrid, 1944). / J. Caro Baroja, Los Vascos (Saint-Sébastien, 1949). / P. Baroja, Guía del País Vasco (Barcelone, 1953). / P. Veyrin, les Basques (Arthaud, 1955). / D. de Areitio, Los Vascos en la historia de España (Bilbao, 1959). / L. Boussard, l’Irrintzina ou le Destin des Basques (Laffont, 1969). / M. García Venero, El nacionalismo vasco (Madrid, 1969). / R. Oyarzun, Historia del Carlismo (Madrid, 1969).

Bassano (les)

Famille de peintres de la Vénétie (xvie s.).


La dynastie des Bassano occupe dans l’histoire une place assez curieuse, plus importante sans doute dans la peinture européenne que dans l’école vénitienne même. Mais, inversement, le « bassanisme » — comme formule internationale d’un certain réalisme rustique et « luministe » — a estompé et rétréci l’image de son créateur, Jacopo. Celui-ci, sans atteindre le rang de la triade Titien*-le Tintoret*-Véronèse*, est une des figures les plus attachantes de son temps.

C’est à la petite ville de Bassano del Grappa, à 70 km au nord-ouest de Venise, que les peintres de la famille da Ponte ont pris leur nom d’artistes.

Francesco da Ponte « il Vecchio » — peintre local mal connu, qui disparaît vers 1530 — semble apporter, à travers ses rares œuvres certaines (Déploration du Christ, musée de Bassano), un reflet provincial de l’art des Bellini*.

Son fils Jacopo (Bassano v. 1510 ou 1516-1518 - id. 1592) passe son enfance et son adolescence à Bassano : cette nature humide et généreuse, les paysages montueux et boisés, les prairies peuplées de bœufs et de moutons se retrouveront constamment dans ses œuvres.