Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Barrès (Maurice) (suite)

 R. Lalou, Maurice Barrès (Hachette, 1950). / J. M. Domenach, Barrès par lui-même (Éd. du Seuil, coll. « Microcosme », 1954). / P. de Boisdeffre, Barrès (Éd. universitaires, 1962) ; Barrès parmi nous (Plon, 1969). / Z. Sternhel, Maurice Barrès et le nationalisme français (A. Colin, 1972). / M. Davanture, la Jeunesse de Maurice Barrès (Champion, 1975).

Les principales étapes de la carrière de Barrès

1877

Au lycée de Nancy, cours de philosophie de Burdeau.

1883

À Paris, fonde la revue les Taches d’encre.

1888

Sous l’œil des Barbares, première manifestation du culte du moi.

1889

Élu député boulangiste de Nancy.

1892

Voyage en Espagne.

1894

Du sang, de la volupté et de la mort.

1896

Voyage en Italie.

1897

Les Déracinés inaugurent le Roman de l’énergie nationale.

1902

Leurs figures, tableau de l’affaire de Panamá.

1906

Élu député de Paris et reçu à l’Académie française.

1909

Colette Baudoche : Barrès est désormais le guide spirituel du mouvement nationaliste.

1913

La Colline inspirée.

1914

La Grande Pitié des églises de France, campagne en faveur des églises menacées de ruine à la suite de la loi de séparation de l’Église et de l’État. Voyage en Orient.

1914-1918

Articles dans l’Echo de Paris, qui formeront la Chronique de la Grande Guerre (1920-1924).

1919-1921

Tente de créer une mystique de la Rhénanie : l’Appel du Rhin et le Génie du Rhin.

1922

Un jardin sur l’Oronte, dernière expression d’un romantisme passionné.

Barth (Karl)

Théologien calviniste suisse (Bâle 1886 - id. 1968).


Avec Friedrich E. D. Schleiermacher*, il est le plus grand nom de la théologie protestante depuis Luther et Calvin ; il marque la fin d’une époque, celle de la théologie limitée aux règles de l’enseignement universitaire traditionnel, et en ouvre une autre, celle de la réflexion scientifique sur les engagements historiques motivés par la fidélité à la parole et à la vie du Christ.


Jusqu’en 1919

Issu d’une famille de théologiens et de philosophes, fortement marqué par l’humanisme et l’humour bâlois, K. Barth entreprend à son tour des études de théologie. Berne, Berlin, Tübingen et Marburg sont les étapes d’une formation où il acquiert la méthode et les orientations de la théologie libérale. Il s’exerce à l’ingrate et indispensable discipline de la critique historique, il se familiarise avec les grands noms de l’histoire de l’Église et de ses doctrines, il participe en renâclant au mouvement de réduction de la foi à une conduite morale.

Quelle qu’elle soit, la pensée de l’autre ne lui apparaît jamais comme étrangère et condamnable a priori. Il fait en face de tout et de tous un étonnant effort de pénétration par l’intérieur, d’identification et d’assimilation, qui devient petit à petit chez lui une seconde nature : c’est la « méthode de la sympathie ».

Formé par ses maîtres à l’école de la science exégétique et de l’histoire ecclésiastique, mis en contact avec le néo-kantisme théologique et son insistance sur l’anthropocentrisme de l’expérience religieuse, Barth, au sortir de ses années d’études, rencontre Christoph Blumhardt (1842-1919), animateur d’un mouvement de réveil en Wurtemberg, théologien original, ayant redécouvert dans l’eschatologie le nerf de la prédication et de l’existence chrétiennes, et, en même temps, résolument engagé dans les luttes politiques de son temps, député social-démocrate au Parlement de Stuttgart et lucide analyste de l’histoire contemporaine. Le choc est déterminant. Barth comprend une fois pour toutes qu’il ne s’agit ni de développer ni d’annoncer une forme supérieure de morale à base scientifique et à référence évangélique, mais uniquement de rendre compte d’un événement : l’entrée dans l’histoire de Jésus de Nazareth et la transformation par sa parole vivante de la relation de l’homme avec lui-même et avec l’ensemble de l’univers.

Après un bref séjour à Genève, où il est pasteur de la communauté protestante de langue allemande (1909), Barth est, en 1911, nommé à la tête d’une petite paroisse du canton suisse d’Argovie, Safenwil, bourg rural et industriel à la fois : c’est là que se cristallise sa réflexion théologique, à partir de ce qui est le cœur de sa responsabilité, la prédication.

Quel est le contenu et quelle est la forme du message évangélique pour l’homme d’aujourd’hui ? Toute la pensée de Barth va être désormais consacrée à répondre à cette question, non à partir de l’homme et de sa situation, de sa psychologie et de ses dispositions naturelles, mais sur la seule base du témoignage scripturaire rendu à Jésus de Nazareth, confessé comme Fils de Dieu, Seigneur du monde et prochain libérateur de tout homme.

Pendant la Première Guerre mondiale et malgré la neutralité suisse, Barth n’a nullement le sentiment d’être « au-dessus de la mêlée » : il suit intensément chacune des péripéties de la lutte et s’efforce à un message qui, constamment, en tienne compte. Concrètement, cela signifie pour lui qu’il va s’engager activement dans les luttes syndicales menées par les ouvriers de sa paroisse, adhérant en 1915 au parti social-démocrate et se faisant auprès des patrons le porte-parole des ouvriers (et surtout des ouvrières) luttant pour une meilleure justice sociale. Pour lui, le combat pour la paix passera toujours par la conquête des droits élémentaires au niveau personnel et collectif de l’existence humaine ; et l’engagement du chrétien pour un monde plus juste lui apparaîtra comme un indispensable service, la forme concrète de l’espérance et de l’attente eschatologiques.


De 1919 à sa mort

En 1919, dans une Europe ensanglantée et au milieu d’Églises encore complètement désarçonnées par la catastrophe qui les a toutes prises au dépourvu, paraît le fruit des dix années d’étude biblique de Barth, le Römerbrief, 500 pages de commentaires sur l’Épître aux Romains. C’est une véritable bombe théologique, une rupture avec le libéralisme psychologique et moraliste, le point de départ d’une démarche profondément évangélique soulignant à chaque pas l’initiative divine et le préalable radical, par rapport à tout acte et à tout désir humains, de l’œuvre accomplie par le Christ. Le protestantisme sentimental, pragmatique et social est, avec une insistance solennelle, rappelé aux origines de la Réforme, à l’Évangile de la pure grâce, reçu par la foi seule.