Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Bâle (suite)

Le port a été, en partie, à l’origine de la remarquable croissance industrielle. Son rôle dépasse, toutefois, le cadre local, car plus du tiers des importations globales suisses entrent par le port. En 1974, le trafic dépasse 9 Mt, en légère augmentation par rapport aux années précédentes, malgré le déclin des importations de houille. Les entrées dépassent 8 Mt. L’énorme déséquilibre montre le rôle national joué par le port, mais pose aussi des problèmes, car il faut faire revenir en aval des bateaux vides. Grâce au Grand Canal d’Alsace, le port peut être atteint même en hiver lors des basses eaux.

F. R.


L’histoire de la ville

Sur la colline où se trouve maintenant la cathédrale (le Münster) de Bâle, une citadelle fut construite par les Romains au ive s. apr. J.-C. Sous sa protection et sous le patronage des évêques s’est formée la première communauté chrétienne. La ville survécut à l’épreuve des migrations et à l’incursion des Magyars, et se développa sous la double influence du siège épiscopal et de la colonie d’artisans. Au temps des Carolingiens, les privilèges que l’empereur Henri II (1002-1024) et ses successeurs accordèrent à l’évêque mirent celui-ci en mesure de remplir ses tâches en tant que prince de l’Église et gouverneur de la ville. Différents corps de métiers ou corporations au caractère social, militaire et professionnel se constituèrent et exercèrent une influence politique grandissante, au point d’écarter l’évêque et l’aristocratie du gouvernement de la ville. Par le rachat des droits épiscopaux, le gouvernement passa au xive s. entre les mains de la bourgeoisie ; la ville administra aussi un important territoire assujetti, celui de Bâle-Campagne, que les seigneurs des environs lui avaient cédé ou mis en gage.

Bâle brilla d’un éclat particulier quand le grand concile* siégea dans ses murs (1431-1448), et c’est un des anciens secrétaires du concile, le pape Pie II, qui délivra, en 1460, l’acte de fondation de l’université. Durant la période qui suivit la victoire des Confédérés suisses sur les Armagnacs (1444) et sur Charles le Téméraire (1476), la vie intellectuelle à Bâle atteignit son plein épanouissement. Les plus grands esprits de l’époque, comme Sebastian Brant, Érasme, Thomas Platter, des peintres comme Urs Graf, Hans Holbein le Jeune et Konrad Witz firent de la ville un centre d’art et d’érudition. Au début du xvie s., la ville se rendit indépendante de l’empereur, de l’Empire et de l’évêque en entrant dans l’alliance des Confédérés (pacte du 13 juill. 1501). En 1529, la Réforme fut introduite à Bâle, et la ville devint un refuge pour les émigrés de France, de Hollande et d’Italie, persécutés pour leurs croyances. Ces étrangers apportèrent un esprit nouveau dans la vie intellectuelle et économique de la ville, et c’est à eux que Bâle fut redevable de nombreuses entreprises commerciales et industrielles.

Après une période de calme sous un régime patriarcal, Bâle se vit contrainte, en 1798, d’introduire les réformes imposées par la grande révolution et de se soumettre par la suite aux injonctions de Napoléon. Au cours de la période suivante, de graves dissensions avec la campagne bâloise aboutirent en 1833 à une division du canton de Bâle en deux demi-cantons, Bâle-Ville et Bâle-Campagne (chef-lieu : Liestal). La transformation de l’ancienne Confédération d’États suisses en un État fédératif fut pour Bâle le point de départ d’un brillant essor économique (apparition des chemins de fer, construction des fabriques et des habitations aux portes de la ville, amélioration des revenus et du niveau de vie des ouvriers). Cette évolution fut accompagnée d’une législation libérale dans le domaine fiscal et social.

L’université de Bâle (la plus ancienne de la Suisse), fondée en 1460, haute école des humanistes, vit ses chaires occupées dans le passé par Jacob Burckhardt et Friedrich Nietzsche, et à notre époque par Karl Barth, Karl Jaspers, l’économiste Edgar Salin et le zoologiste Adolf Portmann. Bâle dispose aussi de nombreuses sociétés d’art, de musique et de sciences naturelles, ainsi que d’importants musées. Son théâtre municipal est l’une des meilleures scènes des pays de langue allemande.

H. O.

Bâle, ville d’art

Carrefour de nations et de routes, foyer de culture presque millénaire, Bâle occupe une place de choix parmi les villes d’art qui s’échelonnent le long du Rhin. Par sa cathédrale et ses églises gothiques, par ses vieux quartiers évocateurs d’une bourgeoisie opulente, elle appelle la comparaison avec Strasbourg. Plus grave, moins colorée, moins pittoresque dans l’architecture, Bâle prend sa revanche par le paysage et par la splendeur de ses musées.

La cathédrale, dont la reconstruction (1185-1235), après l’incendie d’un premier édifice au début du xie s., coïncida avec la première poussée de croissance de la ville, en est le « haut lieu » et le belvédère. Mais le monument du xiiie s. a été presque entièrement ruiné par le tremblement de terre de 1356. Il en subsiste au nord un remarquable portail roman (porte de Saint-Gall). D’autre part, à la façade occidentale, reconstruite au xive s. avec ses tours, on a remployé quelques statues dont le réalisme « expressionniste » rappelle celui de la façade correspondante à Strasbourg (figure du Tentateur, statues d’Henri II et de l’impératrice, statues équestres de saint Georges et de saint Martin). L’intérieur est assez remarquable par les doubles bas-côtés et l’élégant triforium aux triples baies.

Une dizaine d’églises, s’échelonnant du milieu du xiiie s. (l’église des cordeliers : Barfüsserkirche ; celle des dominicains : Predigerkirche) au xve s. (Peterskirche), rappellent l’intense activité des couvents depuis l’installation des ordres mendiants jusqu’aux fastes conciliaires du xve s. Dépouillées de leurs œuvres d’art par la crise iconoclaste de la Réforme, ces églises conservent des nefs souvent fort élégantes et de beaux restes de cloîtres.