Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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zoologie (suite)

Le Moyen Âge (ve au xve s.)

Cette période n’est pas si obscure pour les sciences que l’ont affirmé certains, mais elle reste marquée par un goût très vif pour le surnaturel et le fabuleux. Chacun connaît les innombrables représentations de monstres ou d’êtres imaginaires dans l’art médiéval (dragons, licorne, sirènes, etc.).

En outre, pour ce qui est de l’Occident chrétien, la nature fut alors souvent mobilisée au service de la religion et de la poésie, et les êtres vivants (dont les animaux) servirent de thème à des variations théologiques, morales ou poétiques. Telles sont les diverses versions du Physiologus, recueil allégorique religieux dont la vogue fut considérable, tant en Occident qu’en Orient, et des bestiaires, de nature profane, où l’on trouve toutes sortes d’affirmations zoologiques invraisemblables : le sang du bouc briserait le diamant, l’hyène changerait de sexe à volonté, la belette concevrait par l’oreille et enfanterait par la bouche, etc.

Toute cette littérature relève davantage du folklore que de la science et il y eut heureusement pendant cette longue époque des contributions plus intéressantes dont nous allons examiner les principales.


Occident

Pour ce qui est de l’Occident, les principaux auteurs ayant laissé une réelle contribution zoologique peuvent se répartir en trois catégories : les religieux, les amateurs et techniciens, les illustrateurs.

Parmi les religieux qui écrivaient en latin des encyclopédies, il faut citer Isidore de Séville (v. 570-636), dont tout un livre des Etymologiae est consacré aux animaux, énumérés sans esprit critique et comprenant des espèces fabuleuses ; Hildegard de Bingen (1098-1179) a également traité de zoologie dans un livre de sa Physica, citant en particulier des espèces de la faune d’Allemagne connues de son temps et donnant leurs noms en latin et en allemand. À partir du xiiie s., la zoologie, tout comme les autres disciplines scientifiques, va subir l’influence de trois facteurs nouveaux : la fondation des universités, la redécouverte d’Aristote et l’activité enseignante de divers ordres religieux.

Ces deux derniers facteurs furent les plus importants. En effet, c’est par les traductions arabes, elles-mêmes retraduites en latin, que l’œuvre du Stagirite devint accessible en Occident, où elle constitua la base de diverses encyclopédies. Parmi celles-ci, il faut citer le traité De animalibus d’Albert* le Grand. Cet ouvrage comporte 26 livres, desquels 19 sont empruntés à Aristote, dont Albert perfectionna la classification zoologique. Il fit également des observations originales sur divers Invertébrés (araignées, fourmis) et Vertébrés (Cétacés, mœurs du castor, races géographiques de l’Écureuil d’Europe). Mais il considérait les Cétacés comme des Poissons et les chauves-souris comme des Oiseaux, ce qui marque un net recul par rapport à Aristote. Ses idées embryologiques et physiologiques étaient influencées par les auteurs de l’Antiquité (Hippocrate, Aristote, Galien, Pline). Il rompt cependant un long silence, et son œuvre marque une transition entre l’Antiquité et la Renaissance.

Les amateurs et techniciens, dégagés de préoccupations scolastiques ou religieuses, ont fait preuve d’un indiscutable esprit d’observation des choses de la nature et notamment des animaux. Ils exerçaient les professions les plus diverses : chasseurs, pêcheurs, fauconniers, agriculteurs, médecins, hippiatres, voyageurs, chroniqueurs, etc.

Le plus important de ces auteurs est l’empereur Frédéric II* de Hohenstaufen (1194-1250) qui a rédigé un important traité de fauconnerie (De arte venandi cum avibus) qui constitue une véritable encyclopédie ornithologique, car il n’y est pas seulement question de faucons, mais de toutes sortes d’autres Oiseaux dont il étudia la morphologie et les mœurs (vol, migrations, nutrition, etc.). Les manuscrits connus de ce traité sont illustrés par d’excellentes miniatures, dont certaines donnent avec une grande précision l’habitus de telle ou telle espèce. On retrouve de telles illustrations zoologiques, souvent très fidèles, dans divers manuscrits médiévaux. Elles concernent aussi bien des Vertébrés (Oiseaux, Mammifères) que des Invertébrés (Insectes, Crustacés, Mollusques) et témoignent d’un indiscutable esprit d’observation.


Orient

On retrouve dans l’Orient médiéval (islām, Byzance) les mêmes caractéristiques des ouvrages zoologiques, qui sont tantôt des encyclopédies de caractère compilatoire sans esprit critique, tantôt des traités dus à des « techniciens » qui connaissaient bien les animaux. Parmi les premiers, citons le Livre des animaux d’al-Djāḥiz (ixe s.), influencé par Aristote, mais renfermant aussi quelques observations personnelles, ainsi que le traité d’al-Damīrī (v. 1341-1405). Ce dernier, intitulé Livre de la vie des animaux, est une encyclopédie « para-zoologique » où les animaux sont classés par ordre alphabétique. On trouve pour chacun d’eux sa description d’après Aristote et al-Djāḥiz, les traditions et proverbes le concernant, ses propriétés alimentaires ou médicales.

Parmi les auteurs techniques islamiques, il convient de citer les agronomes qui avaient de bonnes connaissances en zootechnie (élevage des moutons, des chevaux, des mulets, des ânes, des chameaux, des oiseaux de basse-cour, des abeilles). Sous la dynastie des Mamelouks furent publiés de nombreux ouvrages concernant l’hippologie et l’hippiatrie.

Les grands médecins de l’islām médiéval : Avicenne*, Avenzoar (Abū Marwān ibn Zuhr, v. 1092/1095-1161), Averroès*, ont contribué également à la zoologie en étudiant divers parasites de l’Homme et certains animaux venimeux (Arthropodes, Serpents), et en commentant ou en résumant les traités zoologiques d’Aristote.

Il en est de même du médecin et philosophe juif Moïse Maïmonide* (1135-1204), qui dans son Traité des poisons mentionne divers animaux venimeux ou dangereux pour l’Homme (chien enragé). On trouve également des allusions zoologiques dans le Talmud, et dans ses commentaires, tel celui de Rashi (1040-1105).

L’apport des Byzantins, qui, de 330 à 1453, maintinrent la tradition hellénique, est assez réduit.