Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Babylone (suite)

Les fouilles archéologiques

Le site, bien connu grâce aux fouilles allemandes menées par Robert Koldewey (1889-1917), n’est cependant pas épuisé, et le Service des antiquités d’Iraq a entrepris récemment de nouvelles recherches ainsi que des travaux de restauration. Les monuments dégagés appartiennent surtout à l’époque néo-babylonienne. Hormis quelques traces dans un sondage, la ville d’Hammourabi semble malheureusement avoir disparu. La cité du Ier millénaire (2 500 m sur 1 500 m) était enfermée dans une double enceinte quadrangulaire, munie de bastions ; l’Euphrate coulait en son centre (un peu à l’est de son tracé actuel), et on le franchissait grâce à un pont dont il subsiste 7 piles de brique distantes de 9 mètres. Les dégagements opérés ont permis de constater qu’un certain urbanisme présidait à l’organisation de la ville, avec des rues hiérarchisées et se croisant à angle droit.

Des portes de la ville connues par les textes, quatre ont été retrouvées, la plus importante étant la porte d’Ishtar, au nord, qui fut exhaussée à trois reprises : les murs du niveau inférieur avaient été revêtus de briques cuites avec reliefs non émaillés, ceux du niveau moyen de briques émaillées mais sans relief ; enfin dans l’état le plus récent, les parois étaient recouvertes de briques émaillées avec relief. Cette porte, à la fois fortifiée et très décorée, était le point de passage de la voie processionnelle qui, venant du nord, peut-être d’un temple consacré aux festivités du nouvel an, laissait à l’ouest une citadelle et un palais recelant le trésor de guerre des princes babyloniens ; au-delà de l’enceinte, cette voie se poursuivait dans la ville et donnait accès, toujours à l’ouest, au grand palais de Babylone, œuvre de plusieurs souverains. Le palais butait contre l’enceinte au nord et était puissamment protégé du côté du fleuve par une citadelle ; il était composé de cinq ensembles juxtaposés, dont chacun était organisé de façon similaire : une cour bordée d’appartements d’apparat au sud (dont la salle du trône, donnant sur la 3e cour) et, vers le nord, les zones de service. À l’angle nord-est, une série de pièces allongées et voûtées supportait, pense-t-on, les fameux jardins suspendus de Sémiramis. Au-delà du palais, la voie processionnelle conduisait à la ziggourat « Etemenanki » (tour à étages à l’intérieur d’une grande enceinte), qui inspira vraisemblablement le mythe de la tour de Babel. Au sud et relié à Etemenanki se trouvait « l’Esagila », le grand temple de Mardouk, dieu de Babylone. D’autres temples de type babylonien ont été dégagés, par exemple ceux de Ninourta, d’Ishtar et de Ninmah.

Au nord de la ville, le tell Babil marque la place du palais d’été.

Malgré l’importance de cette grande métropole, les objets d’art retrouvés ont été peu nombreux et ne portent pas réellement témoignage de l’art babylonien, car le fameux lion en basalte semble être hittite, certaines statues viennent de Mari, et des stèles assyriennes se trouvent en assez grand nombre.

J. C. M.

G. L.

➙ Assyrie / Hammourabi / Iran / Kassites / Mésopotamie.

 R. Koldewcy, Das Wiedererstehende Babylon (Leipzig, 1925). / E. Unger, « Babylon », in Reallexikon der Assyriologie, t. Ier (Berlin, 1928). / M. M. Rutten, Babylone (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1948 ; 3e éd., 1966). / G. Goossens, « Asie occidentale ancienne », in Histoire universelle, t. Ier (Gallimard, « Encycl. de la Pléiade », 1956). / C. J. Gadd, Babylonia c. 2120-1800 B. C. (Cambridge Ancient History, no 23, 1965) ; Hammurabi and the End of his Dynasty (Cambridge Ancient History, no 35, 1965) ; Assyria and Babylon c. 1370-1300 B. C. (Cambridge Ancient History, no 42, 1965). / D. J. Wiseman, Assyria and Babylonia c. 1200-1000 B. C. (Cambridge Ancient History, no 41, 1965). / J. M. Munn-Rankin, Assyrian Military Power 1300-1200 B. C. (Cambridge Ancient History, no 49, 1967). / P. Garelli, le Proche-Orient asiatique, des origines aux invasions des peuples de la Mer (P. U. F., coll. « Nouvelle Clio », 1969).

Bach

Dynastie de musiciens allemands, dont le plus important fut Jean-Sébastien (Eisenach 1685 - Leipzig 1750).



J.-S. Bach et l’Europe

Jean-Sébastien Bach est, au milieu du xviiie s., l’Européen par excellence..., mais un Européen qui n’a pas voyagé et qui, par d’autres voies que les déplacements, a su découvrir toutes les merveilles du monde musical pour les assimiler et en faire surgir un message neuf. Il naît au centre de l’Europe, dans une Europe qui n’a pas encore trouvé sa stabilité, puisqu’elle oscille constamment entre la puissance des trois grands : le Saint Empire romain germanique, qui vient d’être attaqué par les Ottomans ; Sa Majesté le roi d’Espagne, dont les territoires sont loin d’être unis ; Sa Majesté le roi de France, qui cherche à parfaire l’unité territoriale d’une parcelle européenne baignée par trois mers, et qui sera le phare de la civilisation classique, bientôt attaquée en sa grandeur par un monde anglo-saxon auquel la maîtrise des mers doit un jour assurer la suprématie. Jean-Sébastien Bach sera le témoin de ces mutations, de ces luttes entre les souverains, et il verra même bouger, sinon déjà s’épanouir, à l’est, un domaine slave dont il va subir indirectement l’influence. Mais Bach se tient au centre de cet échiquier international, comme il réside au centre d’un Saint Empire romain germanique qui va vers le déclin, au centre d’une Saxe dont l’étoile monte, au centre d’une Thuringe dont les routes permettent des liaisons utiles entre l’ouest et l’est d’une part, entre le sud et le nord de l’autre. Voilà qui explique que Bach ne méconnaîtra rien de ce qui touche le monde occidental français, le monde méridional italien, en un mot, le monde latin.

Cette situation « géographique » de Bach explique en grande partie les directions où s’alimentera son extraordinaire génie. Mais elle explique peut-être aussi la place qu’il tient dans la musique, notamment dans l’histoire du mouvement polyphonique, dont il symbolise le terme ultime. Préparée dès le Moyen Âge, stimulée par le xvie s. anglais, flamand, français, allemand, espagnol et italien, cette polyphonie, qui monte en flèche au xviie s., s’annexant certains pôles d’ordre instrumental, connaît avec Jean-Sébastien Bach un sommet que tous les musiciens à venir, les juges les plus sévères auront à gravir pour y découvrir les lois immuables qui régissent la tonalité et assurent au classicisme, comme au romantisme, leur base.