Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Yougoslavie (suite)

La fusion et la modernisation des entreprises ont permis de réduire le nombre de chantiers de construction navale : le « Trois-Mai » à Rijeka (le plus actif), les chantiers de Pula, Kraljevica, Trogir, Split. Les cargos lancés sont de taille moyenne : Split et Rijeka ont lancé des unités de 150 000 t ; Pula, des minéraliers de 250 000 t. La majeure partie est exportée. La construction automobile a été développée grâce à l’aide occidentale. Ainsi, des centaines de milliers de Crvena Zastava (« Drapeau rouge ») ont été produites par l’usine de Kragujevac sous licence Fiat. À Koper, en Istrie, une usine de montage de petites voitures Citroën s’est installée. La firme Kosmos, à Ljubljana, travaille en liaison avec Alfa-Roméo, et Vozila, à Novo Mesto, avec British Leyland Motor Corporation ; Litostroj à Ljubljana monte des modèles Renault. Il faut ajouter, pour les camions, la participation de Mercedes à Priboj et à Pančevo (FAP) et de Deutz à Maribor (TAM). On recensait déjà en Yougoslavie en 1975 plus de 1,3 million de voitures de tourisme et plus de 180 000 camions.

Enfin, le pays est devenu un gros fournisseur d’équipement, d’usines clés en main, qu’il exporte vers les pays en voie de développement, surtout du Maghreb, du Moyen-Orient et de l’Asie dans les domaines variés de l’électrotechnique, de la fabrication d’engrais minéraux, de ponts et de routes, dans la réalisation des périmètres d’irrigation et de grands chantiers agricoles, dans l’outillage minier. Ces équipements sortent des grandes usines et entreprises établies surtout dans les capitales : Litostroj à Ljubljana, Rade Končar à Zagreb, TAM et Hidromontaža à Maribor, Premier-Mai à Zagreb, Jugostroj à Rakovica, près de Belgrade, Ivo Lola Ribar à Belgrade, etc.


La croissance de l’industrie légère

L’industrie légère occupe, comme dans les autres pays socialistes, une place modeste. Les investissements qu’elle reçoit sont très inférieurs à ceux de l’industrie lourde. On remarque toutefois en Yougoslavie un effort pour sortir de sa médiocrité cette activité de transformation. L’industrie textile, si faible dans les années 50, a rattrapé le retard. Les textiles synthétiques de bonne qualité, fabriqués sur place, sont très répandus. Le tabac macédonien a gardé toute sa réputation. La cueillette ou la culture des plantes médicinales apportent leur contribution à l’industrie pharmaceutique. Le houblon de Slavonie et l’orge des plaines pannoniennes sont à la base de bières de qualité. Enfin, l’artisanat sur bois, sur argent, sur cuivre, celui du textile connaissent, avec le tourisme, une renaissance extraordinaire. Leur production représente une part appréciable des achats des visiteurs étrangers.


L’agriculture, ses structures et sa production

La collectivisation des terres en Yougoslavie, comme en Pologne, ne concerne qu’une faible partie de la surface agricole. En 1972, le pourcentage revenant à l’État était d’environ 8 p. 100 ; celui des coopératives, de 6 p. 100 ; le secteur privé occupait par conséquent la majeure partie des terres cultivées. La superficie moyenne d’une exploitation d’État était de 4 800 ha ; celle d’une coopérative, de 470 ha. On constate donc l’opposition fondamentale entre deux types de secteurs : celui qui est formé par les exploitations « sociales » (anciens domaines confisqués par l’État, anciennes coopératives dites « de travail », qui s’apparentaient à des kolkhozes et qui ont été dissoutes, regroupées ou agrandies) ; celui qui est formé par les petites exploitations individuelles, dont le plafond a été fixé, par une loi de 1953, à 10 ha. Les premières sont concentrées dans les plaines fertiles du Nord, Slavonie et Vojvodine ; elles sont dotées en investissements et en matériel et se spécialisent dans les cultures industrielles et fourragères, les céréales, dont elles fournissent de grandes quantités à l’État. Beaucoup constituent de véritables « combinats agro-industriels », comme celui, le plus célèbre, de Belje dans la Bačka, qui couvre plusieurs dizaines de milliers d’hectares et transforme lui-même la majeure partie de sa production, dont une forte proportion est commercialisée ou exportée à l’étranger. La petite exploitation coopérative résulte d’institutions fondées après la guerre et qui avaient pour but d’aider à l’installation de colons sans terre, de partisans, de populations descendues des montagnes. Des 4 000 associations s’étendant sur 1,66 Mha qui existaient encore en 1960, il n’en reste en 1970 que quelques dizaines, qui ont été fondues dans le groupe précédent, celui de l’agriculture sociale.

Les propriétés privées proviennent des lopins familiaux non concernés par la réforme agraire. Le secteur privé rassemble donc une partie de la production de subsistance. Ces propriétés sont pour la plupart réunies en coopératives générales (les OZZ), qui en assurent le ravitaillement, en semences par exemple, et les débouchés, concluent des accords avec les firmes d’État et le premier secteur social de la production agricole. Mais rien n’indique une volonté de passage vers les formes sociales. En effet, les petites exploitations familiales ne cultivent en général que de 1 à 5 ha. Il s’agit d’une culture autoconsommatrice familiale d’appoint. La société rurale s’est transformée. On considère qu’un membre sur quatre de ces familles travaille à la ville et à l’usine. On assiste à une recrudescence de la friche sociale, à un abandon des pentes montagneuses et des villages d’altitude ou déshérités, à la prolifération de maisons de type urbain à la campagne, à l’amorce de la construction de résidences secondaires.

C’est donc à une évolution intermédiaire entre celle des pays occidentaux et celle des pays socialistes qu’on assiste en Yougoslavie, le trait distinctif étant la présence d’une masse sous-employée à la campagne qui contraint à l’émigration à l’étranger (plus de 1 million d’émigrés au total, qui ne peuvent trouver d’activité ni dans l’agriculture ni dans l’industrie).