Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

Viêt-nam (suite)

Après la mort de Kennedy (22 nov. 1963), la Maison-Blanche semble prête à se lancer massivement dans l’aventure militaire vietnamienne malgré le va-et-vient diplomatique en faveur de la réunion d’une nouvelle conférence de paix. C’est dans ce climat qu’éclate l’« incident du golfe du Tonkin » (31 juill. - 2 et 4 août 1964), présenté comme une « agression de Hanoi » et qui sera reconnu plus tard comme une provocation de Washington.

À partir de ce moment, la Maison-Blanche va envoyer des troupes de plus en plus nombreuses au Viêt-nam du Sud, développant la nouvelle théorie de « guerre locale » tout en cherchant l’« homme fort et providentiel » capable de contrôler la situation intérieure.

De 1963 à 1967 se succèdent les gouvernements des généraux Duong Van Minh (né en 1916), Nguyên Khanh (né en 1927), Nguyên Cao Ky (né en 1931), Nguyên Van Thiêu (né en 1923). La présence au Viêt-nam du Sud d’un demi-million de soldats américains, avec l’emploi massif du matériel de guerre le plus terrifiant (défoliants, gaz toxiques, napalm, bombes à billes et à fléchettes) et l’escalade de la guerre aérienne américaine contre le Nord, entreprise par le président Johnson, vise à soutenir le régime de Saigon ; les Américains tentent de forcer Hanoi à résipiscence par des bombardements massifs quasi quotidiens, qui vont durer huit ans et causer d’effroyables destructions.

Le F. N. L. et la république démocratique, face à cet assaut, tiennent tête. Avec l’apport de matériel venu de tous les pays socialistes, ils offrent une capacité de résistance tendue par une faculté d’adaptation intelligente, l’expérience du combat et une bonne organisation sur tous les plans.

En janvier-février 1968, la puissante offensive du F. N. L. (dite « du Têt », le nouvel an vietnamien), puis l’encerclement de la base stratégique de Khe Sanh prouvent, malgré la violente riposte américaine, que Washington, avec 500 000 soldats (plus ses alliés coréens, thailandais, australiens et l’armée saigonaise de 1 million d’hommes), ne peut guère espérer emporter la décision sur le champ de bataille. Acceptant de négocier après avoir suspendu les bombardements sur le Nord, le président Johnson envoie ses délégués à la conférence de Paris pour y rencontrer les autres parties (13 mai 1968).


La conférence de Paris à la recherche de la paix

Durant toute une année, les négociateurs cherchent à percer les intentions réelles de leurs vis-à-vis, Hanoi et le F. N. L. désirant surtout savoir s’ils peuvent compter sur un retrait américain.

Au plan en dix points du F. N. L. (retrait américain, droit du peuple sud-vietnamien à décider de son avenir sans ingérence étrangère, élections générales et formation d’un gouvernement de concorde nationale), le président Nixon répond par la proposition d’un retrait militaire, d’élections sous contrôle international et l’engagement de respecter les accords de Genève de 1954. Mais le secrétaire d’État William Rogers fait savoir que la Maison-Blanche n’est liée à aucun gouvernement sud-vietnamien déterminé. Désormais, les travaux de la conférence sont retardés par cette déclaration sybilline et, en tout état de cause, restrictive.

Au début de juin 1969, le Gouvernement révolutionnaire provisoire de la république du Sud Viêt-nam (G. R. P.) est formé. Le 3 septembre de cette même année, le président Hô Chi Minh meurt à Hanoi. Les extrémistes saigonais et américains tentent de profiter de cette occasion pour présenter des exigences nouvelles. Mais, devant de nouveaux échecs, l’administration américaine institue la politique de « vietnamisation », visant à mettre en place une équipe capable de reprendre totalement en main la politique de Washington. Cependant, l’élection présidentielle aux États-Unis approche. La poursuite de la désastreuse guerre du Viêt-nam risque de coûter à Nixon son fauteuil présidentiel. Le monde entier attend avec impatience pour Noël 1972 la signature de l’accord de Paris mis au point par Lê Duc Tho (né en 1912) et Henry Kissinger au mois de novembre, après cinq ans de négociations difficiles. Suintement contre toute attente, Noël 1972 voit Nixon faire volte-face et ordonner de violents bombardements avec des « B-52 » sur Hanoi et Haiphong pendant douze jours consécutifs pour essayer de revenir sur l’accord Lê Duc Tho-Kissinger et obliger Hanoi à faire les concessions qu’il a refusées sur la table de négociation. Mais le Viêt-nam du Nord tient bon ; Nixon ordonne précipitamment la cessation des bombardements et accepte la signature de l’accord. Le 27 janvier 1973, l’accord de Paris est signé entre Nguyên Duy Trinh (république démocratique du Viêt-nam), William Rogers (États-Unis), Trân Van Lâm (république du Viêt-nam [Saigon]) et Mme Nguyên Thi Binh (Gouvernement révolutionnaire provisoire de la république du Sud Viêt-nam).

Les clauses principales en sont : la reconnaissance par les États-Unis de l’indépendance, de la souveraineté, de l’unité et de l’intégrité territoriale du Viêt-nam ; le cessez-le-feu et le retrait des troupes et du personnel militaire américains ; l’interdiction d’introduire du nouveau matériel de guerre au Viêt-nam du Sud ; la libération des prisonniers de guerre et des prisonniers politiques ; la liberté de déplacement et d’expression ; la reconnaissance de la troisième force (composée de neutralistes) ; la formation par les trois parties (Saigon, G. R. P., troisième force) d’un Conseil de réconciliation et de concorde nationale en vue d’organiser les élections générales au Viêt-nam du Sud. La question de la réunification du Viêt-nam sera réglée par le Nord et le Sud après les élections et la formation d’un gouvernement unique sud-vietnamien. Cependant, dès la signature de l’accord de Paris, l’application de celui-ci sous contrôle international se révèle difficile : les combats ne cessent guère et de nombreux incidents ont lieu. L’acte final, signé le 2 mars à Paris, avec la garantie de puissances internationales, suivi des pourparlers à La Celle-Saint-Cloud entre Saigon et le G. R. P. sur le processus de l’application de l’accord de Paris, reste largement entaché par les difficultés qui opposent les deux principales parties sur le terrain militaire, d’autant que Washington ne retire pas ses « conseillers » du Viêt-nam du Sud et que le fonctionnement de la commission internationale de contrôle est bloqué par les autorités saigonaises. Un nouvel accord de cessez-le-feu est signé le 15 juin 1973 entre Lê Duc Tho et Henry Kissinger, mais il n’est pas plus respecté. En avril 1974, la conférence de La Celle-Saint-Cloud, après plusieurs interruptions, est ajournée sine die, tandis que sur le terrain continuent les affrontements, dont souffrent surtout les populations civiles.