Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

Vienne. 86 (suite)

Les campagnes du nord du haut Poitou sont moins boisées et plus ouvertes que celles du sud : larges plaines déblayées par les rivières entre Poitiers et Châtellerault, plateaux crétacés du nord-ouest, autour de Loudun (8 408 hab.), de Mirebeau et de Neuville-de-Poitou. Traditionnel pays à blé, le nord du haut Poitou offre aujourd’hui une gamme de ressources très variées. L’élevage laitier s’y est développé dans le cadre de puissantes coopératives ; le maïs et l’orge accompagnent le blé, tout comme le colza et le tournesol. Sous un ciel dont la luminosité évoque déjà celle des pays de la Loire viennent des cultures légumières et la vigne.

Au milieu de ces campagnes pratiquement démunies d’industries, la vallée du Clain en aval de Poitiers s’individualise par son dynamisme. Fief traditionnel de la coutellerie et de la fabrication des armes, Châtellerault (38 282 hab.) a trouvé un second souffle avec la décentralisation d’industries parisiennes (métallurgie diverse, travail du bois, industries alimentaires) : la spectaculaire croissance de la Z. U. P., qui flanque la ville au sud, traduit cette expansion. Mais l’activité manufacturière s’est aussi diffusée vers le nord, sur les confins tourangeaux (Ingrandes, Dangé), et vers le sud jusqu’à Poitiers (laiteries, beurreries, mais aussi métallurgie et travail du caoutchouc). Cette industrialisation a largement bénéficié des facilités de communication (voie ferrée de Paris à Bordeaux ; R. N. 10), avantage qui deviendra décisif avec l’ouverture de l’autoroute Poitiers-Châtellerault et surtout avec le raccordement de celle-ci à l’autoroute Paris-Tours.

S. L.

➙ Poitiers / Poitou-Charentes.

Vienne (Haute-). 87

Départ. de la Région Limousin* ; 5 512 km2 ; 352 149 hab. Ch.-l. Limoges*. S.-pr. Bellac et Rochechouart.


Correspondant aux deux divisions traditionnelles du haut Limousin (centre et sud) et de la basse Marche (nord), le département est, à première vue, un ensemble assez homogène de plateaux entre 250 et 500 m, aux horizons sans accidents marquants. Il n’empiète que très peu, à l’est d’Eymoutiers, sur les hauts plateaux bordant la Montagne limousine (730-760 m). Cependant, la variété n’est pas absente : les vallées du nord (Vienne, Gartempe, Brame, Issoire) sont plus larges et plus évasées, les plateaux du sud plus élevés et plus accidentés (500-550 m, gorges du réseau de l’Isle), et les hauts plateaux lancent des promontoires au sud-est (mont Gargan, 731 m) et au centre avec l’échiné est-ouest des monts d’Ambazac (589 m) et des monts de Blond, qui dépassent encore 500 m dans l’ouest du département. Climatiquement, au-dessous de 450 m (soit sur 75 p. 100 du territoire), les températures moyennes de janvier et de juillet sont voisines de celles de Paris, mais, du fait de la latitude plus méridionale et de l’ouverture aux influences d’un océan proche, elles sont, en général, plus élevées entre ces mois extrêmes, tandis que les vagues de chaleur estivale les en différencient également. La précocité et la force des premières gelées sporadiques d’automne sont une caractéristique des plateaux les plus élevés, tandis qu’en hiver et au printemps les temps perturbés dominent ; l’enneigement est modeste et très peu durable. Le sud est sensiblement plus arrosé que le nord (907 mm à Limoges, de 1 200 à 1 600 mm dans la région d’Eymoutiers, de 1 100 à 1 200 mm sur les plateaux au sud de la Vienne, mais, en général, de 800 à 950 mm en basse Marche), et la répartition saisonnière des précipitations diffère : l’extrême ouest a un indice océanique A. H. P. E. (A. [automne], H. [hiver], P. [printemps], E. [été]), mais les plateaux du sud ont un indice à tendance « subtropicale », le printemps venant immédiatement après l’automne A. P. H. E., tandis que le nord connaît une légère continentalité A. E. P. H. Il s’agit donc d’un climat océanique, d’autant que les différences saisonnières sont peu accusées, mais à légère touche méridionale. Or, l’opposition nord-sud est aussi un trait fondamental permanent de la géographie agraire. Moins uniformes, dotés de sols plus profonds, plus riches en éléments fins, en phosphore et en potasse (notamment dans les bassins de la Ligoure et de la Briance), bien arrosés, mais sans les excès de pluviosité et de fraîcheur qui conduisent à un lessivage intense, les plateaux du sud avaient élaboré un système agricole plus « peuplant », où châtaigneraies et ravières (puis la pomme de terre) s’ajoutaient aux céréales, à la glandaie des porcs, et étaient parvenus à nourrir de 40 à 60 habitants au kilomètre carré, métayers certes très pauvres, dont les enfants devaient souvent émigrer vers l’Aquitaine et les Charentes. La vigne fut même largement cultivée dans la vallée de la Vienne. Cette société se transforma au xixe s. en une démocratie rurale très attachée au sol durement acquis ; d’où la longue résistance des densités, encore nettement supérieures actuellement (malgré une brutale décompression contemporaine) à celles du nord. Celui-ci, même après l’introduction du sarrasin, resta un domaine d’économie très extensive, à longues jachères, aux vastes brandes livrées au pâturage des moutons. La grande propriété et le faire-valoir indirect, organisé en métairies plus vastes, y résistèrent plus aisément à une pression paysanne moins forte, parce que venant d’une masse moins nombreuse. Aussi le passage à une économie agricole moderne est-il plus difficile dans le sud, plus morcelé, plus marqué par l’empreinte du surpeuplement rural d’autrefois. La tendance à la spécialisation dans l’élevage boucher, esquissée de longue date (« chemins des bœufs » limousins vers Paris), a gagné sans cesse, appuyée sur une race remarquable (limousine). Prés et champs fourragers ont supplanté le blé, qui couvrit de vastes espaces, au xixe s., en remplaçant le seigle. Il n’y a guère d’élevage laitier qu’autour de Limoges. En basse Marche, l’élevage du mouton en parc, en provenance des brandes poitevines, a connu récemment une forte expansion. Ces systèmes extensifs entretiennent un fort exode rural. Le département eut son maximum de population en 1906 (conjonction des bonifications agricoles et du développement industriel). La population a baissé jusqu’en 1954, ne remontant que légèrement ensuite, malgré un solde migratoire positif (la natalité est, par contre, très basse). Ce fait traduit l’isolement de Limoges dans un département sans tissu urbain (Bellac, Saint-Yrieix-la-Perche, Rochechouart ne sont guère plus que des bourgs) et où l’industrie est extractive (uranium de Bessines-sur-Gartempe, autrefois kaolin) ou peu diversifiée (non-ferreux du Palais-sur-Vienne, ganterie et feutres de Saint-Junien, papeteries, tanneries de la vallée de la Vienne). Malgré son petit nombre et sa chute rapide, la population rurale représentait encore 39,9 p. 100 de la population totale en 1975.

P. B.

➙ Limoges / Limousin.