Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

Victor-Emmanuel III

(Naples 1869 - Alexandrie, Égypte, 1947), roi d’Italie de 1900 à 1946.


Un anarchiste italien, Gaetano Bresci, ayant assassiné à Monza le roi Humbert Ier (29 juill. 1900), c’est le fils de ce dernier et de Marguerite de Savoie, Victor-Emmanuel III, prince de Naples, qui monte sur le trône. Le jeune roi, petit de taille, est assez effacé ; amoureux de la campagne, numismate passionné, il a épousé, en 1896, Hélène de Monténégro, qui lui donnera deux enfants.

En 1900, l’Italie traverse une crise de croissance qu’aggrave une crise économique et sociale endémique. Le temps semble révolu de l’arbitraire de la « droite historique » ou du jacobinisme anticlérical si longtemps incarné en Francesco Crispi*. Président du Conseil de février 1901 à octobre 1903, Giuseppe Zanardelli (1826-1903), le plus marquant des parlementaires de gauche, prend Giovanni Giolitti* comme ministre de l’Intérieur et Giulio Prinetti aux Affaires étrangères. Tandis que Giolitti applique son programme de prospérité économique — auquel réplique une épidémie de grèves en 1904 —, Prinetti travaille au rapprochement avec la France (accords Prinetti-Delcassé [nov. 1902] délimitant la sphère d’influence des deux puissances en Afrique du Nord, voyage du roi à Paris en 1903).

Après la mort de Zanardelli (1903), Giolitti accède à la présidence du Conseil : il restera au pouvoir pratiquement jusqu’à la Première Guerre mondiale (1903-1905, 1906-1909, 1911-1914). Cette pérennité assure à l’Italie une politique continue : forte législation sociale et assimilation du socialisme, instauration du suffrage presque universel, conversion de la rente, essor économique, entrée sur la scène politique des catholiques, rapprochement constant avec la France, la Russie et la Grande-Bretagne malgré le renouvellement de la Triple-Alliance (1912), annexion de la Libye lors du traité d’Ouchy-Lausanne (oct. 1912) [v. Empire colonial italien]. Il est vrai qu’en même temps les problèmes sociaux (grève générale en 1904, détresse du Midi, émigration en masse) se posent sans cesse et avec acuité dans ce pays surpeuplé, en voie de développement et tiraillé entre un Nord riche et un Sud pauvre.

De 1915 à 1918, l’Italie est en guerre. Victor-Emmanuel III rend à la dynastie sa popularité en s’établissant près du front de bataille et en confiant la régence à son oncle Thomas, duc de Gênes. À la fin de la Première Guerre* mondiale, l’Italie récupère les provinces irrédentes (Trentin, Trieste), mais se trouve terriblement affaiblie. D’autre part, le mythe bolcheviste dans les masses pauvres, un nationalisme exacerbé jusqu’à l’absurde dans les classes dirigeantes vont désormais fausser la vie politique et faire peser sur l’Italie la menace de l’aventure et de la guerre civile. Il est vrai qu’un parti nouveau, éloigné des extrêmes, le parti populaire italien (Partito popolare italiano), en organisant politiquement les masses catholiques, joue à partir de 1919 un rôle axial de première importance.

Sceptique et froid, s’en tenant à son rôle constitutionnel, Victor-Emmanuel III rappelle Giolitti au gouvernement (juin 1920) : celui-ci s’efforce de restaurer le crédit public et le prestige du Parlement, ébranlé par le manque de toute activité législative ; il propose des mesures draconiennes pour enrayer l’inflation, mais l’ensemble de ces mesures exaspère les masses ouvrières, favorisant, en retour, le développement du mouvement fasciste. La Chambre dissoute, les élections de mai 1921 ne provoquent pas le choc attendu par Giolitti, qui démissionne dès le 23 juin.

L’Italie est alors livrée à l’aventure fasciste (v. fascisme). Car Victor-Emmanuel III est incapable de tenir une position d’arbitre qui ne convient ni à son tempérament ni à l’impatience des fascistes. Pressé de régler les différends entre ceux-ci et une opposition renforcée à la suite du meurtre de Giacomo Matteotti (10 juin 1924), le roi refuse de prendre connaissance des preuves de la connivence de Benito Mussolini*, Premier ministre depuis le 29 octobre 1922, avec les tueurs. Et c’est, le 3 janvier 1925, le fameux discours du Duce, qui revendique la plénitude du pouvoir avec son seul parti. Le roi garde la confiance de l’armée et une autorité souveraine théoriquement indiscutée, mais pratiquement réduite à rien. Sa proclamation comme empereur d’Éthiopie (1936) et roi d’Albanie (1939) ne change pas cet état de choses.

Il faut attendre les humiliations de la Seconde Guerre mondiale pour voir enfin Victor-Emmanuel III faire preuve de l’esprit de décision et de responsabilité qui lui a manqué en 1925. Le 25 juillet 1943 a lieu à Rome un véritable coup d’État royal qui aboutit à l’arrestation de Mussolini et à la formation d’un ministère présidé par le maréchal Badoglio*, tandis que le Grand Conseil fasciste décide la restitution, entre les mains du roi, de la plénitude des pouvoirs civils et militaires.

Mais, devant l’intervention allemande (9 sept.), Victor-Emmanuel III doit fuir Rome et s’installer à Brindisi. Vieilli et privé d’un prestige que vingt ans de fascisme accepté ont usé, le roi nomme son fils, Humbert, prince de Piémont, lieutenant général (5 juin 1944) en attendant d’abdiquer en sa faveur (9 mai 1946) et de partir pour l’exil, au lendemain du référendum du 2 juin qui consacre la fin de la monarchie italienne.

P. P. et M. V.

➙ Fascisme / Italie / Mussolini.

 A. Grasselli Barni, Vittorio Emanuele III (Plaisance, 1922). / A. Robertson, Victor-Emmanuel III, King of Italy (Londres, 1925). / G. Liuzzi, Vittorio Emanuele III (Turin, 1935). / D. Bartoli, Vittorio Emanuele III (Vérone, 1946 ; trad. fr. Victor-Emmanuel III, S. F. E. L. T., 1946). / J. Godechot et M. Vaussard, Histoire de l’Italie moderne (Hachette, 1972 ; 2 vol.).

Victoria

État d’Australie ; 227 618 km2 ; 3 546 000 hab. Capit. Melbourne.



L’État

C’est l’un des plus petits du Commonwealth d’Australie : sa superficie représente seulement 3 p. 100 de celle de l’ensemble du pays. Mais sa population est relativement dense (16 hab. au km2) et constitue 27 p. 100 de la population totale australienne. Les habitants du Victoria sont presque tous d’origine européenne : on compte à peine 5 000 aborigènes métissés. Pourtant, le peuplement par les Européens a été tardif : c’est seulement après 1830 que les premiers colons ont commencé à s’installer dans la région et, en 1838, il y avait seulement 3 511 Européens et quelques milliers d’aborigènes. La colonisation a pris une grande ampleur lorsque de riches gisements d’or ont été découverts à Ballarat et à Bendigo (1851). On comptait 236 000 Européens en 1854. La mise en valeur agricole prend alors un grand essor, et Melbourne devient même pendant quelques années la première ville d’Australie, avant Sydney.