Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

Varsovie (suite)

Les perspectives de développement

Varsovie apparaît relativement isolée dans une zone faiblement urbanisée. C’est pourquoi un plan intéressant plusieurs voïévodies prévoit l’urbanisation de l’axe de la Vistule, d’abord de Gdańsk à Varsovie, ensuite de Varsovie à Cracovie. La ville de Płock, qui dépasse déjà 50 000 habitants, offre, avec sa raffinerie et sa pétrochimie, un premier exemple d’urbanisation.

Les rapports de Varsovie avec sa propre voïévodie et, en général, ce qu’on appelle son aire métropolitaine font l’objet de nombreuses études aboutissant à des plans à moyen et à long terme. La voïévodie de Varsovie compte 2,5 millions d’habitants, mais elle comprend des éléments très hétérogènes. L’agriculture occupe encore la moitié de la superficie ; les ruraux sont en majorité dans un grand nombre de communes. Les localités situées le long des voies ferrées, notamment de celles de Łódź et de Lublin, sont les plus industrialisées : mécanique et surtout textile. Les migrations pendulaires entre les localités de la voïévodie restent importantes. Le plan d’aménagement prévoit une réduction de ces mouvements par l’industrialisation de ces communes, la décentralisation de certains services urbains, l’animation (par l’implantation de commerces et de services culturels) de la banlieue-dortoir.

À long terme, les plans envisagent une agglomération de 4 millions d’habitants à la fin du siècle. Les études d’aménagement sont conduites conjointement par le Bureau d’urbanisme de Varsovie, qui a élargi son champ d’activité en englobant la zone suburbaine, et le Bureau du plan régional de la voïévodie.

Pour Varsovie, le plan prévoit un maximum de population de l’ordre de 1 700 000 habitants, chiffre qui devrait progressivement être réduit par la suite, bien qu’il ne paraisse pas excessif. La population actuelle de la ville représente, en effet, moins de 5 p. 100 de la population totale de la Pologne, pourcentage exceptionnellement faible en Europe pour une capitale.

Les directions majeures du peuplement doivent être privilégiées en fonction d’un schéma radial et de bandes perpendiculaires, réalisant une croix ayant le cœur de Varsovie pour centre.

Pour la voïévodie, on prévoit, évidemment à long terme, la création de deux ou trois villes nouvelles, parallèles à la Vistule, qui pourraient contenir au total près de 1 million d’habitants. Ces villes seraient reliées à Varsovie par des liaisons rapides et recevraient des usines décentralisées ; elles seraient dotées d’un équipement complet.

Enfin, on s’efforce de préserver les zones de culture suburbaine : la ceinture maraîchère et fruitière de l’agglomération permet un ravitaillement satisfaisant de l’agglomération. On aménage les espaces verts ou boisés de la périphérie, notamment la fameuse forêt de Kampinos. On prévoit la construction de lacs artificiels de retenue sur la Vistule et ses affluents.

A. B.

L’art à Varsovie

Ravagée par les Suédois (1655 et 1701), délaissée et enlaidie par les Russes (1815-1918), quasi rasée par les Allemands (1939-1945), Varsovie renaît chaque fois, car elle incarne l’esprit d’un peuple qui n’a jamais accepté de mourir.

Un symbole de cette vitalité est le Palais royal (Zamek). Édifice attesté dès le début du xive s., il n’a cessé d’être remanié, restauré, agrandi, rebâti. Les Allemands l’ont fait sauter ; sa reconstruction, à partir du sol, s’est achevée en 1974. Quant à la cathédrale Saint-Jean, qui n’était plus en 1945 qu’un monticule de débris, on l’a aussi refaite complètement.

Finalement, ce qui reste de plus significatif pour cette période ancienne, c’est, relevée de sa chute, la colonne de Sigismond III (1644), œuvre d’artistes italiens interprètes du triomphalisme royal, le palais Radziwiłł (actuellement Conseil des ministres), bâti à la même époque par Costantino Tencalla, et surtout l’étonnante Vieille Ville (Stare Miasto), entièrement reconstruite avec autant de fidélité que d’amour. Ses maisons à porches, aux façades peintes et décorées de graffiti, aux caves profondes, à la lourde opulence, donnent une image attachante de cette ville parcourue de courants italiens et germaniques. Et c’est dans la banlieue, au château de Wilanów, que Jean III Sobieski avait fait construire de 1677 à 1694 par son architecte, l’Italien Agostino Locci, que l’on trouve l’image la mieux conservée du cosmopolitisme varsovien de cette époque : Polonais, Italiens, Français, Allemands y ont travaillé également ; ce château abrite maintenant une intéressante collection de portraits nationaux.

Cependant, c’est du xviie s. finissant au début du xixe s. que s’est vraiment formé le visage de la ville. La rue du Faubourg-de-Cracovie (Krakowskie przedmieście) et ses alentours immédiats sont bordés d’églises et de palais : le palais Krasiński et l’église du Saint-Sacrement, construits sur des projets du Hollandais Tylman z Gameren (ou Tijlman Van Gameren, 1632-1706), remontent à la fin du xviie s.

La seconde moitié du xviiie s. — rococo, puis néo-classicisme — a particulièrement marqué Varsovie : d’abord sous les rois saxons et leur ministre Heinrich von Brühl (1700-1763) ; ensuite sous Auguste II. Aux premiers, on devait l’énorme palais de Saxe — dont il ne reste qu’un noble jardin — et surtout le palais Brühl, charmant reflet du style de Dresde, dont il ne reste rien. Subsistent l’ancien palais Potocki (auj. ministère de la Culture et des Arts) et un gracieux bijou, l’église des Visitandines, terminée vers 1760 par Francesco Placidi (v. 1700-1782) et Efraim Schroeger (1727-1783).

Comme si, après le drame des partages, elle avait voulu se reforger une âme spartiate, Varsovie a sacrifié résolument à la mode néo-classique. Déjà la façade de l’église des Carmes et celle de Sainte-Anne (par Peter Aigner, 1788) attestent ce goût de la sévérité, qu’accentue encore la rotonde de Saint-Alexandre (1818-1825) par Chrystian Piotr Aigner (1756-1841). Cela est confirmé par les constructions d’Antonio Corazzi (1792-1877) au palais Staszic (1820-1823) et surtout au Grand Théâtre (1825-1833) ; ici le style s’alourdit quelque peu, mais le froid Thorvaldsen* s’y trouve bien.