Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
U

Urbino (suite)

Le palais fut achevé sous la direction de Francesco di Giorgio Martini* (auteur, également, d’une église à plan ramassé, San Bernardino). Dans les salles aux voûtes harmonieuses, la décoration, répartie avec discernement, témoigne d’un goût exquis. Des stucs ornent les cheminées et les encadrements de portes ; les vantaux comptent parmi les chefs-d’œuvre de la tarsia, cet art qui fait servir l’assemblage de bois découpés à une représentation très intellectuelle de l’espace et des volumes. Botticelli* et d’autres grands artistes ont pu donner les dessins de ces vantaux, comme ceux des magnifiques tarsie, d’environ 1475, qui revêtent la zone inférieure du studiolo ducal, cabinet de travail dont le programme iconographique célèbre les activités de l’esprit. Ici, les panneaux représentent les Vertus théologales, des armures, des instruments de musique et de science, des livres, un paysage, etc. Sous un riche plafond à caissons, la zone supérieure du studiolo montrait, disposées sur deux registres, vingt-quatre figures peintes de philosophes, de théologiens, de savants et de poètes — les unes aujourd’hui au musée du Louvre, les autres à la Galleria delle Marche — ainsi qu’un portrait de Federico en armure et lisant un manuscrit, en compagnie de son jeune fils Guidobaldo (ibid.). L’attribution de cet ensemble semble devoir être répartie entre Joos Van Wassenhove (Giusto di Gand, v. 1435/1440 - apr. 1480), l’Espagnol Pedro Berruguete* et peut-être Melozzo* da Forli. Le premier, en tout cas, est l’auteur de la Communion des Apôtres peinte vers 1475, dans la manière flamande, pour le sanctuaire du Corpus Domini, avec une prédelle de Paolo Uccello* (Galleria delle Marche). Des séjours de Piero della Francesca, dont l’influence a été capitale, on garde le souvenir avec la Flagellation, la Madone de Senigallia (ibid.), le double portrait de Federico et de son épouse (Offices, Florence), la pala de San Bernardino (pinacothèque Brera, Milan).

Le palais abrite encore le temple des Muses, achevé au temps du duc Guidobaldo et dont les figures sont peintes par l’éclectique Giovanni Santi (v. 1440-1494), père de Raphaël*. Sous Francesco Maria Della Rovere, puis sous Guidobaldo II, dans la première moitié du xvie s., on relève les travaux de Titien* pour la cour ducale. C’est aussi, à Urbino comme à Gubbio et à Castel Durante (auj. Urbania), la grande époque de la majolique à l’éclatant décor lustré, dont Nicolo Pellipario (av. 1480 - entre 1540 et 1547) fut le maître le plus renommé.

L’affaiblissement du pouvoir ducal (qui aboutira en 1631 au rattachement d’Urbino au domaine de l’Église) amène dès la fin du xvie s. un dépérissement, auquel échappe cependant l’art aimable de Federico Barocci*.

B. de M.

 P. Zampetti, Il Palazzo Ducale di Urbino e la Galleria nazionale delle Marche (Rome, 1951). / L. Moranti, Bibliografia Urbinate (Florence, 1959). / F. Mazzini, Guida di Urbino (Vicence, 1962).

Urédinales

Ordre de Champignons microscopiques dépourvus de carpophores, à basides cloisonnées transversalement (hétérobasides), issues d’une probaside enkystée, uni, bi- ou pluricellulaire, la téliospore (ou téleutospore).


Dans la nature, les Urédinales sont des parasites obligatoires de végétaux chlorophylliens, Spermaphytes et Fougères. On en recense environ 5 000 espèces, réparties en 125 genres, responsables d’affections souvent sévères connues sous le nom de rouilles ; certaines rouilles sont étroitement spécifiques, alors que d’autres parasitent une large gamme de végétaux sauvages ou cultivés. Leur mycélium chemine entre les cellules de l’hôte, où il applique des suçoirs ; la sporulation se manifeste, à la surface des feuilles ou des tiges de la plante attaquée, par de petites taches localisées, souvent vivement colorées. Au laboratoire, on a pu obtenir récemment en culture artificielle le développement végétatif d’un petit nombre d’espèces, dont l’agent de la rouille du Blé, Puccinia graminis.

Le cycle de développement des Urédinales est complexe : il s’accomplit soit sur un seul hôte (le parasite est alors dit autoïque ou autoxène), soit sur deux hôtes alternés, l’un accueillant les stades gamétophytiques, l’autre les stades sporophytiques ; c’est le cas des rouilles dites hétéroïques ou hétéroxènes. Le cycle complet, qui caractérise les espèces macrocycliques, comporte en principe cinq stades successifs, conventionnellement numérotés de 0 à IV ; mais, chez bon nombre d’espèces, en général microcycliques, un ou plusieurs stades font régulièrement défaut.

L’exemple typique d’Urédinale macrocyclique hétéroxène est fourni par Puccinia graminis, agent de la rouille noire des Graminacées, qui est, en outre, hétérothallique et dont l’hôte alternatif est l’Épine-Vinette (Berberis). Le stade 0 apparaît au printemps sur les feuilles de Berberis, au niveau d’une tache d’infection induite par la germination d’une basidiospore ; il se forme des spermogonies, ou pycnies, conceptacles comparables aux fructifications des Sphæropsidales et génératrices de spermaties ; ces pycnies sont accompagnées de filaments récepteurs qui captent les spermaties d’un thalle de sexualité complémentaire, pour constituer un mycélium à dicaryons. Ce mycélium est à l’origine des écies (ou écidies), en forme de petites cupules groupées à la face inférieure des feuilles d’Épine-Vinette et produisant des files d’éciospores unicellulaires, jaune orangé (stade I) ; ces conidies vont infecter les jeunes feuilles ou les tiges du Blé. Le mycélium parasite produit d’abord des pustules allongées de couleur rouille, les urédies, tapissées d’urédospores pédicellées, toujours dicaryotiques ; entraînées par le vent, les urédies propagent la maladie parmi les plants de Blé (stade II). Vers la fin de l’été se substituent progressivement aux urédies des télies à téliospores (ou téleutospores) bicellulaires, pourvues de parois épaisses, fortement pigmentées ; d’où l’aspect de « rouille noire » que prend la maladie (stade III). La téliospore, où les deux noyaux du dicaryon se sont conjugués, est une spore résistante qui hiverne sur les chaumes pour ne germer qu’au printemps suivant (stade IV).