Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Tyrol (suite)

La vie rurale est typiquement montagnarde. L’habitat isolé domine dans la montagne ; hameaux et villages sont plus fréquents dans les vallées. Mais le tourisme amène une concentration de l’habitat du fait de la nécessaire préservation des pistes de ski. La ferme de type bavarois abrite hommes, bêtes et récoltes sous le même toit. Pour l’ensemble du Tyrol, la population active agricole ne représente plus que 20 p. 100 de la population active totale. L’agriculture est surtout maintenue sur les pentes et à l’intérieur des massifs. Les vallées, par contre, voient dominer l’industrie, l’artisanat, le commerce et le tourisme. L’exploitation des alpages est la base de la vie agricole à partir de 1 000 m d’altitude environ. Les alpages sont le plus souvent en propriété coopérative. Les migrations lointaines de bétail sont rares. Un vieux principe juridique veut qu’à chaque exploitation de la vallée correspondent un ou plusieurs alpages immédiatement au-dessus. La pâture des forêts de mélèzes est fréquente. L’habitat permanent le plus élevé d’Autriche se trouve dans la vallée supérieure de l’Oetz (Rofenhöfe, à 2 014 m). Les vallées sont des îlots de sécheresse relative (Sölden à 1 377 m reçoit 707 mm de pluie ; Obergurgl à 1 927 m, 826 mm). L’irrigation est une nécessité. Elle se fait de plus en plus par aspersion. Les exploitations sont de taille médiocre ou moyenne.

L’industrie et l’artisanat emploient près de la moitié des travailleurs de la province. L’extraction minière est peu importante. Les industries métallurgiques, alimentaires et textiles (Loden) sont quelque peu développées dans les villes.

Le chemin de fer a favorisé l’essor touristique de l’avant-pays et de la vallée de l’Inn. L’automobile, plus récemment, a contribué à la révolution touristique des vallées privées de chemin de fer : Ötztal et Stubaital. L’hôtellerie est presque entièrement entre les mains des propriétaires indigènes. Agriculteurs et artisans se lancent dans cette activité. De nouvelles stations ont été créées vers 2 000 m : Obergurgl (1 927 m), Hochgurgl (2 150 m). Nombre de chalets de montagne utilisés pour l’estivage des bêtes sont convertis en chalets d’habitation. La fréquentation touristique est plus forte en été qu’en hiver. Pour l’ensemble de l’année touristique 1972-73 (hiver-été), le Tyrol a reçu 4,1 millions de touristes, dont 3,7 millions d’étrangers. Le total des nuitées s’est élevé à 29,5 millions, dont 27,8 pour les étrangers. La saison d’été totalise 68 p. 100 du nombre des touristes et 69 p. 100 des nuitées. En été, les étrangers constituent 85 p. 100 de la clientèle ; la proportion est un peu moindre en hiver. Les Allemands (R. F. A.) arrivent en tête avec 71,9 p. 100 de tous les touristes étrangers. Ils sont suivis, de loin, par les Anglais et les Néerlandais.

Innsbruck* (gouvernement provincial, université) est la capitale historique et politique du Tyrol.

F. R.


L’histoire

Les plus anciens habitants connus du Tyrol sont les Rhétiens, des Celtes, qui furent vaincus en 15 av. J.-C. par les légions romaines que commandaient Drusus et Tibère*. Leur territoire devint la province romaine de Rhétie pour environ six siècles. Au cours du vie s., la Rhétie fut conquise par un peuple germanique, les Bavarois. À la même époque, la région de Trente était occupée par les Lombards, un autre peuple germanique, qui fut rapidement assimilé par les populations de langue latine. Ainsi se fixa la frontière linguistique. Bavière et Lombardie furent absorbées par l’Empire carolingien et passèrent par la suite sous l’autorité des rois de Germanie. En 1004, Henri II, roi de Germanie depuis 1002, donna la région du Brenner à l’évêque de Trente, et, en 1027, Conrad II, qui lui succède, y ajoutait le comté de Bolzano (Bozen). Il agrandissait également l’évêché de Bressanone (Brixen), conformément à une politique favorable aux princes ecclésiastiques, censés être plus obéissants au pouvoir royal que les princes laïques. Les deux évêchés situés au sud du Brenner relevaient directement de l’empereur et n’étaient pas inféodés au duc de Bavière. Pourtant, un seigneur laïque, le comte de Tyrol (du nom de Castel Tirolo, situé non loin de Merano [Meran]), étendit peu à peu son autorité sur l’ensemble du pays.

Au xive s., en 1335, la lignée des comtes de Tyrol s’éteignait. L’héritière, Marguerite Maultasch (1318-1369), après un mariage malheureux, perdit son fils unique, Meinhard, en 1363 et fit du Habsbourg Rodolphe IV, duc d’Autriche (1358-1365), son légataire universel. Jusqu’en 1918, le comté de Tyrol devait être partie intégrante du patrimoine héréditaire des Habsbourg.

La province revêt une grande importance stratégique puisque le Brenner est le passage le plus commode entre l’Allemagne et l’Italie septentrionale et que le Tyrol a été le trait d’union entre les possessions occidentales des Habsbourg et les provinces autrichiennes de leur patrimoine. C’est pourquoi l’empereur Maximilien* résida le plus souvent à Innsbruck, dont il fit sa capitale, au détriment de Vienne. Grâce aux mines de cuivre et d’argent (Schwaz) concédées aux Fugger*, le Tyrol était alors un pays riche, mais l’importance de ce secteur n’a cessé de décroître, et l’agriculture de subsistance associée à l’élevage transhumant demeurait la ressource essentielle. C’est pourquoi nombre d’artisans et d’artistes se virent dans l’obligation d’émigrer, temporairement ou définitivement.

Comme dans toutes les autres provinces autrichiennes, les ordres jouaient un rôle prépondérant dans le gouvernement local ; et, exception à peu près unique en Allemagne (avec la Frise), les paysans étaient représentés à la diète, où ils constituaient un ordre distinct de la noblesse et du clergé. Cette place privilégiée dans le système politique ne les empêcha pas de participer à la guerre des Paysans en 1525, pour protester contre l’alourdissement des charges seigneuriales.