Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
T

transmutation

Transformation d’un nucléide en un autre par réaction nucléaire.


Il y a donc dans un noyau modification du numéro atomique Z. Cette transmutation peut être naturelle ou artificielle.


Transmutations naturelles

Il s’agit d’une conséquence de la radioactivité : les noyaux qui rayonnent transmutent en un autre noyau pour aboutir finalement à un élément stable.

• La radioactivité alpha se traduit par la réaction

Exemple :

On constate que le noyau qui émet un rayonnement alpha meurt en tant que tel et « ressuscite » un autre noyau ; ce nouveau noyau a Z – 2 comme numéro atomique et A – 4 comme nombre de masse, puisque deux protons et deux neutrons ont été éjectés dans le grain alpha, qui est un noyau d’hélium 4.

• La radioactivité bêta moins se traduit par

Exemple :

Dans ce cas, le noyau émetteur de bêta se transmute en un nouveau noyau qui a Z + 1 comme numéro atomique et qui a même nombre de masse (ce sont des isobares).

On exprime quelquefois ces résultais sous la forme suivante (lois de Soddy) : quand un noyau émet un alpha, il monte de deux cases dans le tableau des éléments ; quand il émet un négaton, il descend d’une case dans ce tableau.

• Dans la capture k,

Le noyau initial transmute en un autre noyau qui est situé une case plus haut dans le tableau des éléments ; on observe le même processus dans le cas d’émission d’un positon :

Rappelons que les corps radioactifs naturels dérivent les uns des autres et appartiennent à trois familles, qui ont pour tête de file :
— le pour la famille du thorium ;
— le pour la famille de l’uranium-radium ;
— le pour la famille de l’uranium-actinium.


Transmutations artificielles

On réalise de telles transmutations par bombardement nucléaire, si, du moins, la particule projectile a une énergie cinétique suffisante.

• La première transmutation artificielle fut réalisée par Rutherford en 1919 ; ce dernier constata que le choc d’une particule alpha sur un noyau d’azote 14 donnait naissance à un proton et à un élément inconnu, qu’il identifia à l’oxygène 17.

La réaction s’écrit

D’une façon générale, une transformation s’écrit en abrégé :
noyau cible (particule projectile, particule émise) noyau final, ce qui, dans le cas précédent, donne

• Mais on peut également provoquer des transmutations artificielles par des particules chargées : protons, deutons, hélions.

Protons. Le noyau formé peut être stable :
ou radioactif :

On a une réaction (pγ) ; mais il existe aussi des réactions (pα), (pd), (pn).

Deutons (noyau du deutérium ). Ils donneront des réactions (dn), (d, 2n), (dp), (dα), (dγ) :

Hélions (ou particules alpha) :

• On peut encore provoquer des transmutations artificielles par des particules non chargées :
— des photons,

— des neutrons, réactions (nγ), (np), (nα),

La suite des réactions

et

a amené la découverte du neptunium 239 et du plutonium 239. C’est également par des transmutations successives que furent découverts les éléments transuraniens (on en compte actuellement 105).

Remarquons qu’une même transmutation peut être provoquée de deux manières différentes :

et que les réactions provoquées par des particules de haute énergie sur des cibles généralement constituées par des protons ont permis de découvrir et de préciser les propriétés fondamentales de la matière.


Fission de noyaux lourds

La fission de certains noyaux lourds, tels l’uranium 235, est une transmutation spéciale provoquée par des neutrons dits « thermiques », avec partage du noyau initial, généralement en deux parties.

Nous aurons par exemple

que l’on peut écrire

avec Z + Z′ = 92.


Prévision de la possibilité d’une transmutation

Pour connaître la possibilité d’une transmutation, il faut calculer le bilan énergétique de la réaction ; le résultat obtenu montrera si la transmutation envisagée est possible.

Considérons un noyau cible et soit :

La conservation de l’ensemble énergie-masse donne
c2 M1 + c2 M2 + E2 = c2 M3 + E3 + c2 M4 + E4,
c étant la vitesse de la lumière.

L’énergie nucléaire libérée est
Q = E3 + E4 – E2 = c2 (M1 + M2 – M3 – M4).
E2, E3 et E4 sont connus par mesure de parcours dans une chambre de Wilson.