Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
T

toxicologie (suite)

Atteintes chroniques

• Fibrose après agression chimique. Certaines intoxications aiguës ou chroniques, certaines réactions allergiques succédant à un contact chimique sont suivies d’un processus de fibrose d’évolution plus ou moins rapide. Les intoxications respiratoires, hépatiques, rénales, hématopoïétiques permettent d’observer des exemples de ce type d’évolution. Dans la silicose, les macrophages après phagocytose du quartz subissent une cytolyse qui libère des facteurs stimulant la croissance des fibroblastes d’une part, l’afflux et la multiplication de macrophages de l’autre ; ces derniers captent la silice et libèrent de nouveau des facteurs de stimulation de la fibrose, créant un système auto-entretenu qui pourra évoluer jusqu’à la fibrose totale du poumon.

• Cancérogenèse chimique. Les substances cancérogènes sont capables directement ou par l’un de leurs métabolites d’affecter les liaisons chimiques avec les protéines ; il s’agit des composés électrophiles qui se fixent sur les éléments nucléophiles cellulaires.

La théorie mutationniste du cancer (apparition de cellules mutantes capables de reproduction mal limitée) est actuellement la plus généralement acceptée, la cancérogenèse résultant de deux effets successifs : l’initiation et la promotion. L’initiation résulte de l’administration de doses répétées du cancérogène, dont l’effet est additif et irréversible et ne peut aboutir à un cancer qu’après un temps de latence. La promotion détermine l’apparition clinique du cancer : elle résulte de l’effet d’un facteur augmentant le taux de mitoses (huile de croton, créosotes, phénols, irritants divers, lésions mécaniques).

Les agents cancérogènes les plus connus sont :
1o les substances alkylantes : bêta-propiolactone, diméthyl-nitrosamine ; 2o certains hydrocarbures polycycliques capables de subir une époxydation qui les rend électrophiles (benzopyrène, dibenzanthracène, 3-méthylcholanthrène) ; 3o certaines aminés aromatiques qui sont N-hydroxylées par le système microsomal et différents dérivés nitrosés, dont le groupement NO est au contraire réduit en composé NOH, directement réactif (naphtylamine, N-acétylamine, fluorine, nitroquinoléines) ; 4o différents composés naturels : alcaloïdes du Senecio, aflatoxine B.

La prédisposition au cancer peut résulter d’une déficience des mécanismes de réparation des acides nucléiques (xeroderma pigmentosum) ou plus souvent d’une déficience immunitaire qui diminue le pouvoir de destruction naturelle du système lymphocytaire vis-à-vis des cellules mutantes capables de proliférer sans contrôle.

• Mutation et environnement chimique. La mutation cancérogène n’est que l’une des modifications cellulaires possibles.

D’autres mutations résultent d’une modification de la structure informatrice des gènes et l’on distingue des mutations géniques, ou ponctuelles, et des mutations par aberration chromosomique. Les mutations géniques peuvent résulter de l’incorporation d’une base analogue (S-bromodésoxyuridine à la place de la thymine), d’une alkylation sur l’A. D. N. ou de l’établissement de liaisons physiques entre l’A. D. N. et le composé mutagène (acridine, hydrocarbures polycycliques).

E. F.


Traitement des toxicomanes

Jusqu’à ces dernières années, le concept d’une harmonie naturelle faisait croire ou admettre que tout effet nocif pouvait être tenu en équilibre par l’effet favorable inverse, d’où l’idée constante qu’à tout poison devait correspondre un antidote.

La découverte récente des méthodes de sauvetage et de réanimation efficaces a montré qu’elles étaient indispensables au traitement de toute urgence, et les intoxications aiguës ont vu leur pronostic transformé par la respiration artificielle, l’assistance cardiaque, les épurations intestinales, sanguines et pulmonaires.

L’emploi d’antidotes complète la stratégie d’action médicale urgente.

Le traitement des intoxications par caustiques se limite à un lavage à grande eau prolongé plus de dix minutes en cas d’effet local. L’absorption digestive provoque des brûlures intenses de traitement difficile.

L’absorption digestive des poisons irritants, et en général de toute substance dangereuse, doit faire décider d’une évacuation digestive et d’un lavage gastrique sous contrôle médical si l’intoxiqué n’est pas dans le coma ou ne souffre pas de convulsions. Dans ces cas, le risque de fausse route et d’inondation pulmonaire est particulièrement menaçant.

L’administration d’antidotes par voie digestive est une manœuvre très incertaine. Elle ne doit être proposée qu’en cas d’intoxication bénigne.

Les centres antipoison s’efforcent de répondre avec compétence aux situations d’intoxication et d’orienter convenablement les phases initiales du traitement des intoxiqués.


Toxicologie générale


Réactions biologiques

Qu’ils agissent directement ou après métabolisme, les composés chimiques affectent des liaisons avec des éléments cellulaires ; leur toxicité résulte, d’une part, de leur solubilité et de leur encombrement global (caractères physiques), d’autre part de leur fixation sur des sites caractéristiques des membranes, des métabolites ou des enzymes (caractères de réactivité chimique).

L’examen des formules des substances ayant une toxicité permet de passer en revue les différentes notions chimiques élémentaires classiques et leur interprétation électronique et moléculaire. On distingue les réactifs ioniques, acides et bases au sens large actuellement connus, les réactifs fonctionnels (aminés, alcools, etc.) et les radicaux libres. Pour le moment, les corrélations structure-activité se limitent à l’interprétation du rôle des fonctions chimiques élémentaires portées par de très petites molécules, à des composés classés en série homologue, à quelques grosses molécules. L’effet toxique des substances aptes à se fixer sur les zones riches en électrons de la matière vivante apparaît comme une loi générale.

• Substances agissant réversiblement. Certaines substances se fixent par des liaisons labiles, réversibles, sur leur site d’action (liaisons électrostatiques ou simplement physiques).

La mesure du taux sanguin permet la détermination théorique du taux fixé sur le récepteur pour un même effet physiologique. Les variations quantitatives de la toxicité dépendent en général d’une variation du métabolisme. Parfois, l’intensité de la réponse du récepteur varie.