Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
T

toxicologie (suite)

Toxicologie clinique

L’activité de toxicologie clinique s’applique à des phénomènes très différents selon que les troubles ont été observés après une absorption massive, brutale, après une imprégnation plus lente, mais très anormale, ou sont suspectés en raison de coïncidences inquiétantes entre une imprégnation modérée par un produit chimique et certaines maladies (toxicologie aiguë, subaiguë et chronique).

Le secteur de toxicologie chronique ne peut être exploré que progressivement et avec beaucoup de prudence pour trois raisons essentielles :
— la très longue durée nécessaire à l’observation réellement chronique oblige à tenir compte d’une foule d’interférences dont l’effet propre peut être très supérieur à ceux que l’on pourrait attribuer à l’environnement ;
— la forte dispersion écologique des conditions de vie et l’interférence avec des habitudes déviantes jouent un rôle essentiel en pathologie chronique (nutrition anormale, alcoolisme, tabagisme, absorption régulière de médicaments) ;
— la relative rareté des opérations régulièrement conduites dans cet esprit de recherche est due à la difficulté et au coût d’opérations portant sur des centaines de références acquises sur chacun des individus étudiés.

• Les intoxications aiguës (survenant immédiatement ou dans les quelques jours suivant l’absorption) par suicide ou accident ont vu leur pronostic s’améliorer par l’organisation des centres antipoison, qui constituent maintenant un réseau de surveillance et d’indications thérapeutiques spécialisées. Les produits les plus dangereux sont connus, et le traitement est conforme à l’état actuel de nos connaissances sur la réanimation médicale.

• Les intoxications subaiguës (survenant après quelques jours, un mois) et subchroniques (après quelques mois), par exposition professionnelle nouvelle ou anormale, par absorption médicamenteuse, ont été en général dépistées en quelques mois grâce à une surveillance systématique organisée soit dans le secteur même où la nuisance est apparue (médecine d’entreprise, organisations hospitalières et sanitaires), soit par le jeu d’organismes centralisateurs interentreprises ou intermédicaux.

L’étude de la tératogenèse humaine peut être associée aux études de toxicologie subaiguë, ainsi que l’allergie aux substances chimiques.

• Les intoxications chroniques (après quelques années), la cancérogenèse, la mutagenèse (induction de mutations), le vieillissement des organes et des organismes n’ont fait l’objet que d’un petit nombre de travaux. Dans tous les cas, la rareté des publications proprement toxicologiques, c’est-à-dire s’efforçant de relier la détection d’un produit de nocivité potentielle à l’apparition réelle d’un dommage humain, est à opposer à la masse de publications analytiques qui apprécient la présence du produit suspect dans l’environnement et qui doivent être classées parmi les références quantitatives d’une pollution du milieu, sans que l’on puisse affirmer sa toxicité.

Principales intoxications

Atteintes subaiguës

• Toxicologie professionnelle, médicamenteuse, alimentaire. L’absorption prolongée et régulière de produits chimiques peut provoquer des troubles sérieux par effet cumulatif direct ou indirect.

Aussi certaines espèces vivantes, surtout parmi les micro-organismes, peuvent-elles transformer certaines substances minérales en dérivés hautement toxiques pour l’Homme. C’est le cas du mercure, qui est transformé par des Bactéries marines en méthylmercure ; ce dernier s’accumule dans les tissus des Poissons, qui deviennent toxiques pour l’Homme, par concentration du toxique à l’extrémité d’une chaîne alimentaire.

• Malformations congénitales d’origine toxique. Elles correspondent en général à une intoxication assez brève de la femme enceinte. La tératogenèse toxique se limite aussi à quelques expériences particulièrement nettes, et à un petit nombre d’épidémies humaines. La découverte du rôle tératogène de la thalidomide est due à des constatations cliniques, et celui-ci est relié à une inhibition compétitive de la vitamine B2.

Chez le nouveau-né, le métabolisme des substances étrangères est faible. Il peut être activé si l’on donne précocement une substance inductrice comme un barbiturique. Le sexe, l’état physiologique font varier la sensibilité à certains poisons.

• Génétique et réactions anormales aux médicaments. Les variations individuelles de réponse aux substances chimiques ont reçu ces dernières années des explications génétiques importantes qui explicitent l’ancienne notion d’idiosyncrasie (réaction propre à l’individu). On distingue les anomalies de métabolisme, qui provoquent une exagération quantitative de la réaction aux médicaments, et les anomalies enzymatiques congénitales, qui provoquent une réaction aux médicaments parfaitement différente de l’action espérée : troubles génétiques de l’acétylation, des cholinestérases, hémolyses médicamenteuses liées à des anomalies génétiques de la glucose-phosphate-déshydrogénase, ou de l’hémoglobine, et porphyries hépathiques.

• Allergie aux substances chimiques. La réponse allergique vis-à-vis d’une substance de faible poids moléculaire résulte d’une réponse immunitaire exagérée dans un groupe humain et dirigée contre une protéine autologue ayant fixé un radical chimique ou l’un de ses dérivés par une liaison covalente.

On connaît trois types chimiques de réaction allergique humorale : asthme et choc anaphylactique par libération d’intermédiaires chimiques à partir du mastocyte, allergie par anticorps précipitants ressemblant à la maladie sérique, allergie cytolytique où le complément provoque, en présence de l’anticorps, la destruction d’un élément cellulaire ayant fixé l’haptène (hémolyse allergique par exemple).

L’allergie cellulaire résulte de l’activité de lymphocytes immuno-compétents sur l’ensemble haptène-protéine : dans l’eczéma de contact, par exemple, l’afflux intra-épidermique de ces éléments permet l’apparition des microvésicules.

• Chronotoxicologie et chronopharmacologie. La susceptibilité d’un organisme vis-à-vis d’un agent doué d’actions pharmacologiques ou toxicologiques n’est pas constante en fonction du temps ; elle varie au contraire de manière périodique et prévisible.