Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

autoroute (suite)

Il est encore parfois d’usage de parler d’autoroutes de dégagement pour définir les sections d’autoroutes constituant les extrémités d’une autoroute de liaison, mais implantées en zone urbaine ou suburbaine. Cette appellation, qui fut celle des autoroutes de l’Ouest et du Sud au départ de Paris, n’est plus que rarement utilisée en France. Une autoroute dite autrefois « autoroute de dégagement » est une « autoroute urbaine » si elle assure en majorité des déplacements urbains à courte distance ou une « autoroute de liaison » si elle assure en majorité des déplacements interurbains à longue ou moyenne distance.


Histoire

Il semble que ce soit aux États-Unis et en Allemagne que, pour la première fois, l’idée de réserver exclusivement l’usage de certaines routes aux automobiles ait été mise en pratique. Ainsi, en 1914, fut mise en service dans l’île de Long Island, près de New York, une route réservée aux automobiles qui comportait des carrefours en nombre limité, donnant accès à des voies latérales desservant les propriétés riveraines. Cette route ne correspondait pas à la définition actuelle des autoroutes, mais elle était dotée de deux de leurs caractéristiques essentielles : elle était réservée à la circulation des automobiles et ne comportait qu’un nombre limité de points d’échanges avec les autres routes, l’accès direct des propriétés riveraines étant interdit. Elle présentait encore des carrefours à niveau et les deux sens de circulation s’écoulaient sur une même chaussée.

À la même époque, une route expérimentale d’une dizaine de kilomètres de longueur et réservée aux automobiles était projetée en Allemagne. Elle devait être mise en service en 1921, aux environs de Berlin, et comportait deux chaussées de 6 m de largeur séparées par un terre-plein central. Les seuls accès à cette route étaient localisés à ses extrémités.

Les caractéristiques de ces routes, conçues pour l’automobile, devaient se préciser et s’affiner au cours du temps, un grand nombre de pays apportant leur contribution à l’évolution et aux progrès de la conception technique des autoroutes. On peut citer notamment les réalisations suivantes, dans la période de 1925 à 1940 :
— Tout d’abord, en Italie, la construction, en 1924, de 80 km d’« autoroutes de dégagement » de la ville de Milan, qui étaient dotées d’une chaussée unique à double sens de circulation et ne comportaient aucun croisement. Au début de 1940, il y avait environ 500 km d’autoroutes en service en Italie, toutes à chaussée unique à double sens, sans croisements. On peut citer parmi ces autoroutes la liaison Turin-Milan ;
— Aux États-Unis, la mise en service, en 1927, du « Holland Tunnel » à New York, qui sera prolongé en 1932 par une autoroute d’une dizaine de kilomètres de longueur, sans croisements et dotée d’une chaussée unique à quatre voies. En 1940, les États-Unis disposaient d’environ 800 km d’autoroutes, dont les 260 km de l’autoroute à deux fois deux voies du « Pennsylvania Turnpike » ;
— En Allemagne, la construction, de 1929 à 1932, d’une autoroute Cologne-Bonn d’une vingtaine de kilomètres de longueur, dotée d’une chaussée unique à quatre voies, sans croisements. C’est l’Allemagne qui devait fournir le plus gros effort de construction d’autoroutes dans la période 1933-1942, puisqu’elle disposait, à cette dernière date, d’environ 3 800 km d’autoroutes en service, construites essentiellement d’ailleurs à des fins stratégiques ;
— Aux Pays-Bas, la construction, de 1930 à 1933, d’une autoroute d’une quarantaine de kilomètres de longueur entre La Haye et Utrecht, dotée d’une chaussée unique de 14,50 m de largeur, sans croisements et réservée aux véhicules automobiles. En 1940, les Pays-Bas disposaient d’environ 100 km de ces autoroutes ;
— En France, le démarrage, en 1936, de la construction de l’autoroute de l’Ouest de Paris, dont les travaux, arrêtés par les hostilités en 1939, ne furent terminés qu’après la guerre. Cette première autoroute française devait, selon le « plan Marquet » de 1934, s’intégrer dans un réseau autoroutier qui aurait compris autour de Paris environ 270 km d’autoroutes.

Après la Seconde Guerre mondiale, la construction des autoroutes devait s’intensifier dans tous les pays industrialisés, sous la pression de la croissance de la circulation automobile, qui tend de plus en plus à se concentrer sur de grands axes d’échanges, interurbains ou urbains. En France, l’intensité de la circulation motorisée a crû suivant les coefficients multiplicateurs moyens indiqués au tableau suivant :

Cette circulation n’est pas répartie uniformément sur le réseau routier, mais se concentre sur un petit nombre de grands axes. En France, en 1965, et en ce qui concerne le trafic interurbain, 10 p. 100 de la longueur du réseau routier (ou autoroutier) national assuraient 40 p. 100 des parcours, et 20 p. 100 de la longueur de ce réseau assuraient 60 p. 100 des parcours. L’augmentation de la circulation sur les grands itinéraires est d’ailleurs plus élevée que la croissance moyenne indiquée ci-dessus.

Ces phénomènes de croissance et de concentration de la circulation se retrouvent dans d’autres pays que la France, et la nécessité est ainsi apparue de réaliser, sur les axes routiers les plus importants, des autoroutes permettant d’écouler, dans les meilleures conditions de rapidité, de sécurité et de confort, des volumes très élevés de circulation. L’effort de construction d’autoroutes va donc s’intensifier dès 1945-1950.


Le réseau autoroutier français et ses liaisons européennes

Après l’achèvement de la liaison Paris-Lyon-Marseille, la France disposait, au début de 1971, de 1 538 km d’autoroutes, longueur qui est portée à 3 300 km dès 1975, avec les progrès des itinéraires vers l’Ouest (Normandie, section de Chartres à La Ferté-Bernard, voie empruntant la rive droite de la vallée de la Loire vers Tours), l’amorce de la liaison Bordeaux-Toulouse et le développement du réseau alpin, et de l’autoroute vers la Champagne et la Lorraine. Ce réseau s’intègre dans le maillage des autoroutes européennes, auxquelles il se raccorde : au nord, de Lille et de Valenciennes, vers la Belgique, les Pays-Bas et le nord de la République fédérale allemande ; au nord-est, de Metz vers la Sarre ; près de Genève, avec la Suisse ; dans les Alpes, de Chamonix (tunnel du Mont-Blanc), et Menton vers l’Italie ; au sud, du col du Perthus et Hendaye vers l’Espagne.