Touraine (suite)
À l’exemple de l’architecture, les arts d’expression reflètent l’influence classique, unie à un réalisme fondamental. À Saint-Denis d’Amboise est conservé un gisant, dit « la Femme noyée », d’un réalisme saisissant. Quand Michel Colombe*, qui était berrichon, s’établira à Tours, il conservera, dans les monuments qui attestent son talent, notamment le tombeau du duc de Bretagne François II à Nantes, un certain accent naturaliste qui perce à travers son élégance italienne. Colombe a fait école : à son neveu Guillaume Regnault († 1532) est dû le tombeau de Louis de Poncher et de son épouse, de 1523, passé au musée du Louvre ; autres disciples du maître, Martin et Bastien François sont les auteurs, dans la capitale tourangelle, de la charmante fontaine de Beaune, de 1510. À Tours également vient s’établir, vers 1504, le maître florentin Antonio Guisto Betti (1479-1519), souche de la lignée des sculpteurs à laquelle appartient Jean Juste (1485-1549), auteur du monument funéraire de Louis XII et d’Anne de Bretagne à Saint-Denis*.
La peinture s’était manifestée avec éclat au Moyen Âge, non seulement par l’enluminure, mais par la décoration murale, dont il subsiste deux ouvrages importants : la Psychomachie qui décore la crypte de l’église de Tavant et la Vie du Christ de la chapelle Saint-Jean-Baptiste du Liget. Au xve s., Jean Fouquet* peint dans sa province de vastes compositions murales dont rien ne demeure. Jean Bourdichon (v. 1457-1521), enlumineur d’une vingtaine de manuscrits dont les célèbres Heures d’Anne de Bretagne, recueillies à la Bibliothèque nationale, est comme lui né à Tours. Mais ni l’auteur de la Déposition du Christ de Nouans-les-Fontaines ni celui du Triptyque de la Passion du Logis royal de Loches ne sont connus. À Tours vient s’établir en 1516 le maître flamand Jean Clouet*, peintre du roi. Au xviie s. s’illustrent Claude Vignon* et Abraham Bosse*, de Tours, Henri (1603-1677) et Charles (1604-1692) Beaubrun, d’Amboise, tous établis à Paris.
Les arts appliqués n’ont pas moins brillé en Touraine. Du xive s. date le chef reliquaire en argent doré de saint Adrien provenant de l’abbaye de Cormery et conservé à la cathédrale de Tours ; du xve le bras reliquaire de cristal enchâssé d’argent ciselé de l’église Sainte-Catherine-de-Fierbois ; de 1500 environ la célèbre nef de sainte Ursule, chef-d’œuvre de Pierre Rousseau, de Tours, dont Henri III fit présent à la cathédrale de Reims à l’occasion de son sacre. Les vitraux à grands médaillons du chœur de la cathédrale de Tours (xiiie s.) rappellent ceux de la Sainte-Chapelle de Paris ; nombreuses sont les verrières du xvie s. en Touraine, telles celles de Notre-Dame-la-Riche de Tours et le bel ensemble de la sainte chapelle de Champigny-sur-Veude. C’est à Tours que Louis XI instaura, en 1479, la manufacture de soierie qui créa le type de tissage armure dénommé « gros de Tours ». Aux ateliers tourangeaux de tapisserie du xvie s. est probablement due l’italianisante tenture de la Vie de saint Saturnin dont le château d’Angers conserve deux pièces et Langeais une. Le xixe s., enfin, a laissé, dans l’histoire de la céramique, un nom honorable, Charles Avisseau (1796-1861), de Tours, qui consacra son savoir à retrouver la technique de Bernard Palissy.
G. J.
P. Vitry, Tours et les châteaux de Touraine (Laurens, 1905). / G. Lecointre, la Touraine (Hermann, 1947). / R. Ranjard, la Touraine archéologique (Gibert-Clarey, Tours, 1949). / Touraine romane (Zodiaque, La Pierre-qui-vire, 1957). / M. H. Bourdérioux, Châteaux et manoirs de Touraine (Nouv, Éd. latines, 1966). / D. Janson, Sites et monuments du Grand Tours (Centrale Diffusion, Tours, 1973). / G. Oury, Églises de Touraine (Nouv. Éd. latines, 1973). / P. Leveel, Indre-et-Loire (Delmas, 1975).
