Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Toulouse (suite)

L’histoire


Les origines

Tolosa semble avoir été à l’époque celte l’oppidum des Volces (ou Volques) Tectosages. Bien située au coude de la Garonne sur le grand axe Méditerranée-Océan, l’agglomération est déjà un important marché au iie s. av. J.-C. Réduits à la condition mal supportée d’alliés, les Volces Tectosages se révoltent en 107-106 av. J.-C. et capturent la garnison romaine que le consul Cneius Domitius Ahenobarbus a établie dans la ville annexée après 120 à la Provincia Romana (la future Narbonnaise). En 105 av. J.-C., le consul Cépion (Servilius Caepio) reconquiert la ville. Capitale économique d’une riche région céréalière et pastorale (fromages), animée par le trafic du vin italien qui transite par Narbonne en direction de Burdigala (Bordeaux), la ville devient au ier s. apr. J.-C. un centre intellectuel fréquenté par de nombreux juristes et rhéteurs, qui font d’elle la « cité de Minerve » (Palladia Tolosa) selon l’expression de Martial.

Quittant alors le site primitif de colline de la Vieille-Toulouse, la ville s’établit dans la plaine de la Garonne. Érigée en colonie de droit latin à la fin du ier s. ou au début du iie s. apr. J.-C., administrée par des quattuorviri (duoviri assistés de deux édiles), la ville est entourée au iie s. apr. J.-C. d’une première enceinte de brique qui englobe une superficie de 90 ha. Ornée d’importants monuments (un Capitole, un théâtre, un amphithéâtre, des thermes, etc.), Toulouse aurait été évangélisée par Saturnin (ou Sernin) de Toulouse, martyrisé vers 250 au temps de Decius. Menacée par les invasions, la ville complète, vers la fin du iiie s. ou au début du ive s., son enceinte le long de la Garonne en utilisant des matériaux de remploi.

Troisième ville de Gaule peut-être par la population, Toulouse devient au début du ve s. la capitale politique et intellectuelle des rois wisigoths, où des juristes élaborent des abrégés du droit romain à l’intention de leurs sujets. Vainement assiégée par le Romain Litorius (lieutenant d’Aetius), qui est fait prisonnier par Theodoric Ier en 439, occupée par les Francs de Clovis à la suite de leur victoire de Vouillé en 507, Toulouse n’est plus qu’une ville de province.


La ville médiévale

Siège du pouvoir du duc Eudes d’Aquitaine, qui repousse victorieusement en juin 721 l’assaut des forces arabes d’al-Samh, incorporée à la fin du viiie s. au royaume d’Aquitaine par Charlemagne, Toulouse est finalement livrée sans combat à Charles le Chauve par le comte Frédelon en 849. Malgré l’aide des Normands, Pépin II d’Aquitaine ne peut reconquérir en 864 la ville, qui devient alors la capitale du comté de Toulouse, fondé par la maison de Saint-Gilles. La vie urbaine se concentre alors autour de quelques noyaux de peuplement : le château Narbonnais au sud, résidence possible de rois wisigoths et certaine des comtes ; l’église de la Daurade et, à l’extérieur, l’abbaye Saint-Saturnin (Saint-Sernin).

À partir du xie s., le renouveau des activités artisanales et commerciales favorise le repeuplement de la ville.

Un marché se constitue alors autour de Saint-Sernin, et un centre artisanal consacré au travail du cuir se forme autour de l’église Saint-Pierre de Cuisines. Ainsi naît au nord de la ville un nouveau bourg qui est rattaché à cette dernière vers 1140 par une enceinte fortifiée. À la jonction des deux agglomérations est alors érigée (début du xiiie s.) la « maison commune » des consuls : le Capitole, tandis que s’ouvrent les chantiers de reconstruction de la basilique Saint-Sernin et de la cathédrale Saint-Étienne. Il en résulte un afflux d’immigrants dont le nombre est accru par les chartes que les seigneurs toulousains leur concèdent.

L’absence d’autorité seigneuriale réelle permet aux « prud’hommes » de constituer, au moins dès 1152, un « commun conseil de la cité et du faubourg » formé autour de six « capitulaires », de quatre juges et de deux avocats. Émanation du comte d’abord, ce commun conseil assiste à partir de 1189 les 24 consuls, qui prennent le nom de « capitouls » (latin capitulum) et qui administrent dès lors en toute indépendance la République toulousaine, qui, vers 1200, a déjà soumis à sa juridiction la campagne environnante.

Cette république urbaine offre un terrain de diffusion privilégié aux hérésies rigoristes et particulièrement aux cathares*. D’abord cœur de la résistance albigeoise, après le concile de 1229, Toulouse devient (1233) la capitale de l’Inquisition.

Passant sous le contrôle du roi, qui en fait le siège d’une troisième sénéchaussée languedocienne (1271), la ville perd alors son indépendance politique du fait en particulier de la disparition de la cour comtale, foyer de la civilisation occitane. Résidant au château Narbonnais, le sénéchal exerce sur la ville un contrôle étroit qui limite l’autonomie du corps municipal. Cependant, les autorités capétiennes permettent pourtant à la ville de conserver jusqu’à la fin du Moyen Âge sa grande importance religieuse, économique et politique.

Le diocèse de Toulouse est en effet érigé en 1317-18 en archevêché. Peu après, l’institution des jeux Floraux (3 mai 1324) renforce le rayonnement intellectuel de la ville, où s’exprime alors le gothique méridional, tant dans la cathédrale voûtée d’ogives au début du xiiie s. que dans l’église des Jacobins.

En fait, cet essor monumental et artistique traduit d’une certaine manière la victoire économique d’une ville dont les marchands ont possédé dès le début du xiiie s. une maison à Provins pour y exposer pelleteries, draps et épices. Exploitant en fait surtout les ressources agricoles languedociennes (céréales ; pastel, exporté par Bayonne vers l’Angleterre, l’Espagne et les Pays-Bas), les Toulousains font de leur ville jusqu’au milieu du xve s. un important marché régional en relation avec Bayonne, Barcelone, Montpellier, Lyon, Paris... ; ils accueillent les banquiers italiens utilisant des techniques commerciales et financières très évoluées.