Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Toscane (suite)

L’histoire


Les origines antiques et médiévales

La Toscane doit son nom aux Étrusques (Tusci en latin), qui y apparaissent à la fin du viiie s. av. J.-C. et s’y organisent en puissantes cités. Elle est soumise entièrement par les Romains au milieu du iiie s. av. J.-C., et devient sous Auguste l’une des quatorze régions d’Italie. Occupée par les Goths de Radagaise en 405-106 apr. J.-C., puis par ceux de Théodoric Ier* en 490, elle est occupée en 568 ou 570-574 par les Lombards, qui la constituent en duché de Tuscie. Charlemagne s’empare de ce dernier en 774 et crée le comté de Lucques, dont les deux premiers titulaires sont Boniface Ier (812-823) et son fils Boniface II (823-839).

Pour mieux lutter contre les Sarrasins, ce comté est érigé en marquisat de Toscane au profit d’Adalbert Ier (845-898). Contrée relativement riche, le marquisat comprend quatre régions différentes, mais économiquement complémentaires : riche de troupeaux de moutons, de marbre (Carrare), de bois de chênes et de châtaigniers, la montagne apennine encadre la région, les voies de passage vers les cols étant contrôlés par des châteaux érigés sur des éperons rocheux, tel celui de Canossa ; les vallées enserrées dans la montagne convergent en général vers le val d’Arno, dont la mise en valeur céréalière, léguminière et pastorale progresse grâce aux défricheurs ; les collines favorables aux cultures arbustières (vigne, olivier) nourrissent une population nombreuse et dispersée ; enfin, la plaine côtière, la Maremme, où viennent se déverser les alluvions du Serchio et de l’Arno, est encore en majeure partie marécageuse et paludéenne, et donc peu favorable à l’homme et aux activités maritimes.

Survivant aux raids des Normands, qui pillent Pise et Luni en 860, à ceux des Hongrois en 926, le marquisat de Toscane échoit en 1027 à un membre de la famille des Attoni, Boniface III (1012-1052), déjà maître de l’Émilie et de la Lombardie. Boniface est assassiné en 1052 et son fils Frédéric étant mort en bas âge en 1053, sa veuve, Béatrice de Lorraine (1052-1076), puis sa fille, la comtesse Mathilde (1076-1115), lui succèdent.

Mathilde organise dans son château de Canossa la rencontre de Grégoire VII avec l’empereur Henri IV en 1077 ; elle lègue ses biens au Saint-Siège aux termes d’un testament dont les Empereurs contestent la validité. Il en résulte une reprise du conflit opposant les Empereurs aux papes. À celui-ci participent les cités épiscopales qui, géographiquement bien situées, ont déjà acquis une certaine indépendance à l’intérieur de leur contado : Pise, au débouché de l’Arno, là où la via Aurelia Rome-Arles franchit le fleuve ; Massa Marittima et Grosseto, qui contrôlent, la première au nord et la seconde au sud, cette même route aux abords de la mer ; Lucques, au débouché de la vallée du Serchio, sur la route du col de la Cisa (1 041 m), dite via Francigena, qui traverse également Sienne plus au sud ; Sienne elle-même et surtout Florence, où la route Poggibonsi-Bologne par le col de la Futa (903 m) franchit l’Arno ; Arezzo, que traverse l’ancienne via Cassia, unissant Luni à Rome ; Pistoia, au pied de l’Apennin ; Volterra, au cœur des collines toscanes.

Ces villes entreprennent une œuvre considérable de bonification et de mise en valeur des terres paludéennes le long du littoral et des rives de l’Arno et du Serchio, œuvre qui entraîne la substitution de la petite propriété aux vastes latifundia antérieurs. Mais, en conflit d’intérêt aux limites de leurs contados respectifs, recherchant les unes l’appui de l’Empereur, les autres celui du pape, elles adhèrent soit à la cause du premier (gibelins de Pise, de Pistoia, d’Arezzo et de Sienne), soit à celle du second (guelfes de Florence, de Lucques, d’Orvieto et de Montepulciano). Ainsi, Florence, qui souhaite le libre accès à la mer, s’oppose-t-elle à Sienne, à Arezzo et à Pise, qui l’en empêchent ; Pise, de son côté, entre en lutte contre Lucques pour le contrôle de la vallée moyenne de l’Arno, de la Garfagnana, de la Lunigiana et de la Versilia.


De la division à l’unité

Malgré ces conflits incessants, les cités se constituent en communes au xiie s., avant d’être contraintes d’accepter le régime de la seigneurie. Il en est ainsi à Pistoia, à Arezzo et surtout à Pise, où, à la suite de la défaite navale de la Meloria en 1284, ce régime s’installe au profit du guelfe Ugolino della Gherardesca (1284-1288), puis du gibelin Guido da Montefeltro (1289-1293). Il en est de même à Sienne, qui a sa propre monnaie depuis 1186 et qui bat Florence à Montaperti en 1260, mais qui décline après la faillite des Buonsignori en 1298. Florence, surtout, connaît la même évolution, imposant sa tutelle sur l’Italie centrale après avoir animé la lutte menée par la ligue guelfe contre Pise à partir de 1197. Au xiiie s., cette lutte est marquée par la victoire des Gibelins à Montaperti en 1260, puis par celle du guelfe Charles Ier d’Anjou, maître de la Toscane de 1268 à 1285, et enfin par la défaite que Florence inflige aux gibelins d’Arezzo à Campaldino en 1289.

Au xive s., la querelle des guelfes et des gibelins* prend fin, les deux partis s’unissant contre la papauté et le mercenaire étranger. Mais alors surgissent des conflits internes, à caractère social, notamment à Florence, déchirée entre « Blancs » et « Noirs » de 1300 à 1302, secouée par l’insurrection que suscitent en 1343 les Bardi pour chasser Gautier de Brienne du pouvoir et affaiblie par les krachs bancaires des années 1342-1346 ainsi que par la révolte des Ciompi (1378).

Finalement, au début du xve s., l’oligarchie florentine domine la Toscane en s’efforçant de faire échouer les prétentions des Visconti de Milan et en conquérant, par l’intermédiaire des condottieri, les cités voisines : Pistoia (1331), Arezzo (1384), Cortone (1411) et surtout Pise (1406), qui, avec Porto Pisano et Livourne (1421), lui donne accès à la mer. Et lorsque, après des désordres opposant les Albizzi aux Médicis, Cosme de Médicis rentre à Florence le 5 octobre 1434, l’histoire de la Toscane se confond avec celle de Florence et des Médicis*, qui constituent un vaste État toscan, en dehors duquel seules Lucques et Sienne demeurent indépendantes.