Tong K’i-tch’ang (suite)
Issu d’une modeste famille paysanne de la préfecture de Shanghai (Chang-hai), il renia par la suite ses humbles origines et se forgea une nouvelle généalogie. À l’âge de dix-sept ans, il se rendit à Huating (Houa-t’ing), dans le Jiangsu (Kiang-sou) actuel, où il se mit sous la protection de Mo Ruzhong (Mo Jou-tchong), riche notable, d’une grande érudition et amateur d’art averti. On peut présumer que c’est auprès de ce personnage que Dong Qichang reçut sa formation de peintre et de lettré.
Reçu bachelier en 1589, il occupa successivement les charges officielles de chroniqueur, d’inspecteur de la région de Huguang (Hou-kouang), de ministre des rites et enfin d’éducateur du prince héritier. En 1626, il quitta la cour et se retira dans ses domaines de Huating.
Grâce à ses différents postes de haut fonctionnaire, il avait acquis une fortune en se livrant à des exactions diverses. Il rassembla une grande collection de peintures et d’antiquités. Grand amateur du beau sexe, il encourut un retentissant scandale, et une de ses fermes fortifiées fut incendiée par le peuple. À sa mort, il reçut le titre posthume de « lumière des lettres ».
Sa position sociale élevée favorisa beaucoup sa renommée auprès de ses contemporains : il fut l’objet de louanges dithyrambiques. En réalité, son œuvre, relativement importante, est très imprégnée de l’influence des peintres anciens. S’exerçant chaque jour à copier un ou deux arbres, il reconnut son incapacité à peindre les personnages, les chars, les bateaux et les maisons. En fait, comme la plupart des peintres lettrés, il fut plutôt un amateur.
Il faut toutefois reconnaître que Dong Qichang parvint à une excellente technique à la fin de sa vie. Son pinceau acquit une grande spontanéité, et son trait fut celui d’un grand calligraphe. Les effets d’encre très nuancés atteignirent une subtilité inégalée parmi ses prédécesseurs. Grande fut son influence sur les peintres individualistes de la fin des Ming* et du début des Qing (Ts’ing*).
Le musée de l’ancien palais de Taibei (T’ai-pei) conserve une de ses œuvres, intitulée Discussion sur l’Antiquité au bord de la rivière. Outre la signature de l’artiste, datée de 1602, elle porte plusieurs colophons, notamment de Zhen Jiyou (Tchen Ki-yeou), illustre lettré contemporain de Dong Qichang, et de l’empereur Qianlong (K’ien-long). Nombreux y sont les cachets de collectionneurs, depuis la fin des Ming jusqu’au dernier empereur des Qing. Ce paysage de rochers, d’arbres et de fleuve utilise la technique des « rides en fibres de chanvre » inspirée de Dong Yuan (Tong Yuan*). Les touches du feuillage des arbres, suivant les différentes espèces, sont en accord avec la tradition consacrée. Malgré la froideur apparente et l’aspect fragmentaire de la composition, il faut admirer la subtilité du trait et la virtuosité du pinceau. Les différents dégradés de l’encre sont particulièrement riches. Au total, ce paysage illustre bien l’école des lettrés dite « du Sud ».
C.-I. H.