Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
T

Thérèse d’Ávila (sainte) (suite)

Pour être authentique, l’oraison doit nécessairement se traduire dans « des œuvres, des œuvres », car « la perfection ne consiste pas dans des plaisirs intérieurs, elle est l’apanage de celui qui aime le plus » (Château intérieur, IIIe Demeure, chap. ii). « Le Seigneur ne nous demande que deux sciences : celles de l’amour de Sa Majesté et du prochain, voilà à quoi nous devons travailler. Si nous les observons parfaitement, nous faisons sa volonté, et ainsi nous lui serons unis. » (Château intérieur, Ve Demeure, chap. iii.)

E. R.

➙ Carmes.

 M. Lépée, Sainte Thérèse d’Ávila, le réalisme chrétien (Desclée De Brouwer, 1947). / M. Auclair, la Vie de sainte Thérèse d’Ávila (Éd. du Seuil, 1951). / E. Renault, Thérèse d’Ávila et l’expérience mystique (Éd. du Seuil, coll. « Microcosme », 1970). / L. Guillet, Thérèse d’Ávila. La vocation (Mame, 1971) ; Ce que croyait Thérèse d’Ávila (Mame, 1972). / P. Werrie, Thérèse d’Ávila (Mercure de France, 1971).

Thérèse de l’Enfant-Jésus (sainte)

Religieuse française (Alençon 1873 - Lisieux 1897).


Horloger-bijoutier, son père, Louis Martin, a d’abord voulu entrer dans la vie religieuse ; en 1858, il a épousé une dentellière, Zélie Guérin, qui lui donna neuf enfants : deux garçons morts en bas âge et sept filles dont deux moururent prématurément ; les cinq autres mourront religieuses, quatre au Carmel, une à la Visitation.

Thérèse est la dernière de cette famille très unie et très chrétienne où domine l’élément féminin et dont le chef mène une existence marquée par le mysticisme. L’enfant est privée de sa mère dès l’âge de quatre ans. Ses sœurs, et particulièrement Pauline, lui tiennent alors lieu de mère ; quant au père, il la considère comme sa « petite reine ».

Après la mort de Mme Martin, la famille, qui jouit d’une assez belle fortune, s’installe à Lisieux, aux « Buissonnets ». Thérèse, entourée de tendresse, est privée en 1882 de la présence de Pauline, qui entre au carmel de Lisieux ; cette enfant enjouée et équilibrée connaît alors un accès de névrose infantile. Peu à peu, elle vaincra une sensibilité excessive et acquerra l’équilibre qui est le caractère marquant de sa personnalité.

Après l’entrée au Carmel de sa sœur aînée Marie (1886), Thérèse se sent attirée elle aussi par la vie religieuse. Mais son jeune âge oblige son entourage et les autorités ecclésiastiques à repousser jusqu’en avril 1888 son entrée au carmel de Lisieux : elle n’a encore que quinze ans.

Ayant pris l’habit monastique le 10 janvier 1889, elle devient sœur Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte Face ; elle fait profession le 8 septembre 1890, après un examen canonique où elle déclare venir « pour sauver les âmes et surtout prier pour les prêtres ».

Au Carmel, où elle remplit de modestes emplois avant d’être sous-maîtresse des novices (1893), elle connaît la croix prosaïque et pesante de la vie commune sous la houlette d’une prieure impétueuse et dominatrice, tandis que l’état de santé de son père (qui sombre dans une demi-folie avant de s’éteindre en 1894) la fait terriblement souffrir ; il est vrai que l’entrée au Carmel de sa sœur Céline lui apporte quelque consolation.

Jusqu’à la mort de son père, Thérèse se soumet, dans un dépouillement joyeux non exempt d’épreuves intérieures, à toutes les exigences de la vie monacale. Puis, peu à peu, elle découvre sa « petite voie » de confiance et d’amour. Il ne s’agit pas d’un rêve facile, d’une théorie élaborée dans une tension volontariste, mais d’une praxis qui tient en ceci : que cette jeune religieuse investit l’infini de l’amour miséricordieux dans les plus petits actes de la vie, qu’elle vit un amour extraordinaire dans les choses ordinaires.

La dernière étape de sa courte existence, à partir de Pâques 1896, Thérèse la vit dans la double nuit de la souffrance et du doute, sans que soit altérée sa gaieté rayonnante. Durant dix-huit mois, elle ne connaît plus la joie qui s’attache ordinairement à l’expérience de la foi. Sans perdre la foi, elle participe aux ténèbres d’un athéisme dont, à la fin du xixe s., les chrétiens commencent à prendre conscience de son développement dans la société moderne. Dès lors, la jeune carmélite voue sa vie à la fois à Jésus et aux incroyants, qu’elle regarde comme ses « frères ». On conçoit que le message de Thérèse dépasse de beaucoup celui — frelaté et quelque peu puéril — qu’une certaine hagiographie et une certaine iconographie ont prétendu lui faire assumer. Ce qu’elle propose à l’Église contemporaine, c’est tout simplement la « nuit d’espérance », une recherche humble à travers l’incroyance des hommes. C’est dans cette optique qu’il faut lire l’Histoire d’une âme (1897), cette autobiographie que Thérèse a écrite à la demande de son entourage.

Quand elle meurt, le 30 septembre 1897, terrassée par la tuberculose, Thérèse de Lisieux vient de dire : « Ma mission va commencer. » C’est vrai, au pied de la lettre. Rapidement, celle qui n’est jamais sortie du petit carmel de sa petite ville devient, pour le monde entier, la « petite Thérèse » dont la véritable stature se dégagera peu à peu et apparaîtra en pleine lumière avec les travaux suscités par la célébration, en 1973, du centenaire de sa naissance. Béatifiée dès 1923, canonisée dès 1925 par Pie XI, qui l’adopte comme la patronne de son pontificat et celle des missionnaires, Thérèse attire à Lisieux des foules constamment renouvelées. L’édition critique des Œuvres complètes de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus est en voie de réalisation.

P. P.

➙ Carmes / Lisieux.

 A. Combes, Introduction à la spiritualité de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus (Vrin, 1946) ; le Problème de « l’Histoire d’une âme » et des œuvres complètes de sainte Thérèse de Lisieux (Éd. Saint-Paul, 1950). / H. U. von Balthasar, Therese von Lisieux. Geschichte einer Sendung (Leipzig, 1958 ; trad. fr. Thérèse de Lisieux. Histoire d’une mission, Sherbrooke et Apostolat des éd., 1973). / M. Maurette, le Procès de sainte Thérèse de l’enfant-Jésus (Éd. du Cerf, 1963). / J. Lafrance, Thérèse de Lisieux et sa mission pastorale (Desclée De Brouwer, 1968). / C. de Meester, la Dynamique de la confiance. Genèse et structure de la voie d’enfance spirituelle de sainte Thérèse de Lisieux (Éd. du Cerf, 1969) ; les Mains vides. Le message de Thérèse de Lisieux (Éd. du Cerf, 1973). / R. Laurentin, Thérèse de Lisieux. Mythes et réalité (Beauchesne, 1972). / J.-F. Six, la Véritable Enfance de Thérèse de Lisieux. Névrose et sainteté (Éd. du Seuil, 1972) ; Thérèse de Lisieux au Carmel (Éd. du Seuil, 1973) ; la Vie de Thérèse de Lisieux (Éd. du Seuil, 1975). / R. Laurentin et J.-F. Six, Thérèse de Lisieux (Beauchesne, 1973). / E. Rideau, Thérèse de Lisieux. La nature et la grâce (Fayard, 1973).