Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
T

téléphonie (suite)

Le commutateur

Il est le lieu de concentration des lignes d’abonnés et permet de mettre en communication deux quelconques des abonnés rattachés. Il existe deux sortes de commutation : la commutation manuelle et la commutation automatique. Dans certains cas d’exploitation, une forme de commutation manuelle trouve encore fréquemment son utilité dans le domaine des exploitations privées. Si l’on voulait mettre à la disposition de chaque abonné à tout instant et sans risque d’encombrement une liaison vers un quelconque autre abonné, on serait amené à établir pour n abonnés un réseau de liaisons. De chaque abonné partiraient donc n – 1 lignes et il n’y aurait plus besoin de commutation. Celle-ci étant une opération provisoire et limitée dans le temps, sa matérialisation conduit à concevoir un raccordement en étoile des n abonnés par n liaisons à un centre nodal, puis l’établissement à l’intérieur du centre de p connexions, chacune entre deux abonnés parmi les n abonnés. Le calcul des probabilités permet de calculer p. On analyse le trafic des n abonnés et on constate que le trafic global exprimé en erlangs (nombre total d’heures de conversation par heure) est maximal vers 16 h. C’est ce que l’on appelle le trafic à l’heure chargée. On constate également que la moitié des abonnés ne téléphone pas simultanément à l’autre moitié, mais que seulement une très petite partie des liaisons sont établies simultanément. De ces mesures et d’un calcul de probabilité, on déduit la valeur de p. C’est ainsi que, pour donner à 200 abonnés à trafic moyen (0,1 erlang à l’heure chargée) la possibilité de téléphoner entre eux à l’heure chargée avec une probabilité de perte de 0,001, il est nécessaire de disposer de 21 liaisons. La probabilité de perte est la probabilité pour qu’un 22e appel se présentant trouve toutes les jonctions occupées. Plus on désire que cette probabilité soit faible, plus il faut prévoir de jonctions. Ainsi, avec une probabilité de
0,1 — 12 jonctions suffisent ;
0,01 — 17 jonctions suffisent ;
0,001 — 21 jonctions suffisent ;
0,0001 — 24 jonctions suffisent.

Meilleure est la qualité de l’exploitation, plus important, et donc plus cher, est le volume de l’équipement.


Commutation manuelle

Elle est effectuée par une opératrice qui, à l’aide d’un dicorde, établit une liaison électrique entre d’une part l’abonné demandeur — dont l’appel se manifeste sur le panneau du standard par l’allumage d’une lampe associée au jack de cet abonné, sorte de prise de courant dans laquelle l’opératrice enfonce l’une des fiches du dicorde — et d’autre part l’abonné demandé, dans le jack duquel sera enfoncée l’autre fiche du dicorde. Au préalable, l’opératrice se sera assurée par un test que l’abonné demandé n’est pas déjà en communication. Des équipements annexes permettent à l’opératrice d’effectuer les appels (clé d’appel ou appel automatique), de surveiller (clé d’écoute discrète) le bon acheminement de la demande et d’intervenir soit pour renseigner, soit pour couper la communication lorsque l’un des deux correspondants a « raccroché ». Chaque élément (appelé meuble) peut contenir sur son panneau vertical 600 jacks d’abonnés, avec les lampes de signalisation associées, et 120 jacks de circuits. Lorsque le nombre d’abonnés est important, plusieurs opératrices sont nécessaires pour assurer l’exploitation, ce qui amène à multiplier le nombre de meubles élémentaires et à répéter l’extrémité de la ligne et des équipements d’un abonné devant les opératrices. Cette conception s’appelle un multiplage, et le commutateur ainsi constitué prend le nom de commutateur multiple.

À l’époque de la téléphonie manuelle (1925), on a réalisé de très grandes unités qui pouvaient recevoir jusqu’à 10 000 lignes et qui étaient servies par plusieurs centaines d’opératrices. Actuellement, la commutation manuelle est limitée à l’exploitation de quelques centaines de lignes dans les entreprises. Elle a pratiquement disparu de l’exploitation publique. Les meubles ont été réduits, en volume ; il n’y a plus ni jacks, ni fiches, ni dicordes, mais des pupitres dirigeurs permettant par leurs claviers à touches de commander manuellement des dispositifs automatiques de sélection. Ces exploitations s’apparentent manifestement bien plus à la téléphonie automatique, mais restent néanmoins personnalisées, ce qui peut présenter un très grand intérêt (exploitation des grands hôtels, des grandes entreprises, où la présence d’un échelon humain intermédiaire reste indispensable).


Commutation automatique

C’est la forme moderne de la commutation. Toutes les opérations effectuées par l’opératrice ont été traduites sous forme électromagnétique et électronique. Au lieu d’être orales, les instructions de l’abonné demandeur sont représentées par le décrochage du combiné et par l’envoi de trains d’impulsions émises par le cadran ou le clavier du poste téléphonique. Le décrochage du combiné par l’abonné demandeur entraîne au central une recherche automatique de la ligne appelante (présélection) et la connexion de cette ligne sur une mémoire qui, par l’envoi d’une tonalité, invite l’abonné à émettre ses ordres. Ces ordres sont les trains d’impulsions qui, emmagasinées dans la mémoire, commandent le fonctionnement des différents étages de sélection dans leur recherche de l’abonné demandé. L’appel, puis la taxation sont faits automatiquement.

Les centraux automatiques ont des capacités qui varient de quelques raccordements à plusieurs milliers et dizaines de milliers. Il est évident que l’importance et la complexité des équipements va de pair avec la capacité. Les évolutions technique et technologique permettent de mettre à la disposition des usagers deux conceptions fondamentales.

• Dans la commutation spatiale, la jonction est réalisée physiquement par un circuit métallique entre les deux abonnés, circuit en prise pendant toute la durée de la communication.