Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Tanger (suite)

La France, l’Angleterre, l’Espagne — puis l’Italie à partir de 1928 — ont la responsabilité de l’administration de Tanger. L’Assemblée législative y comprend quatre français, quatre Espagnols, trois Anglais, trois Italiens, un Américain, un Belge, un Néerlandais et un Portugais, ainsi que six musulmans et trois juifs sujets du sultan du Maroc, lequel conserve la souveraineté nominale sur toute la zone internationalisée.

Cet état de choses dure jusqu’en 1940. Après la défaite de la France et l’entrée en guerre de l’Italie, les Espagnols occupent Tanger le 14 juin 1940, et en novembre la zone est incorporée au Maroc espagnol. Toutefois, la Grande-Bretagne y conserve ses droits, et l’Espagne s’engage à en respecter la démilitarisation.

Tanger est évacuée par les Espagnols en octobre 1945, le statut international est restauré par la conférence de Paris. Dès avril 1947, le sultan du Maroc élève des protestations contre cette décision et réclame une révision des traités qui garantirait les droits des Marocains sur Tanger.

En 1952, des émeutes contre les Européens sont suscitées à Tanger par le parti nationaliste marocain. Après la reconnaissance de l’indépendance du Maroc par la France (mars 1956) et par l’Espagne (avr.), le statut international est aboli le 29 octobre 1956.

De nombreuses firmes commerciales s’étant établies à Tanger pour profiter des conditions fiscales et monétaires particulièrement favorables, le Maroc, dans le dessein de sauvegarder la prospérité économique de la ville, lui accorde, le 29 août 1957, des garanties particulières codifiées dans une charte.

P. P. et P. R.

➙ Espagne / Maroc.

 E. M. G. Routh, Tangier, England’s Lost Atlantic Outport, 1661-1684 (Londres, 1912). / E. Rouard de Card, le Statut de Tanger d’après la convention du 18 décembre 1923 (Pedone, 1925) ; Modifications du statut de Tanger d’après les accords du 25 juillet 1928 (Pedone, 1928). / G. H. Stuart, The International City of Tangier (Palo Alto, Calif., 1931). / J. Caille, le Consulat de Tanger, des origines à 1830 (A. Pedone, 1967).

Tanguy (Yves)

Peintre américain d’origine française (Paris 1900 - Woodbury, Connecticut, 1955).


Il apparaît comme l’exemple le plus pur et le plus caractéristique de toute la peinture surréaliste. Parfait autodidacte, c’est en effet à l’exploration à la fois fervente et systématique des ressources de l’automatisme* que ce Breton d’origine a dû de faire surgir devant nos yeux tant d’images dépaysantes entre toutes, parce qu’elles semblent faire constamment allusion à des paysages connus alors que, de toute évidence, il s’agit là des seuls espaces du rêve et de la mélancolie.


L’Argonaute de la rue du Château

C’est la rencontre du Cerveau de l’enfant, de Giorgio De Chirico*, qui va décider en 1923 de la carrière picturale de Tanguy. Mais parler de carrière est chose on ne peut plus impropre à propos d’un homme qui ne demanda jamais rien d’autre à la peinture que de lui livrer les secrets les mieux cachés de l’univers. Et que ce soit le Cerveau de l’enfant qui en ait décidé nous apprend tout au plus que de très forts fantasmes œdipiens présidèrent à cette quête du Graal qui ne s’interrompit qu’à la mort du peintre. Les premières peintures sont d’une gaucherie que perturbe déjà une sorte de frémissement médiumnique. Et la saveur des scènes populaires évoquées ne parvient pas à dissimuler l’étrangeté de leur facture (le Pont, 1925 ; les Forains, 1926). Avec ses compères de la rue du Château (Paris XIVe), Jacques Prévert et Marcel Duhamel, Tanguy adhère en 1925 au mouvement surréaliste. C’est l’année suivante qu’il se livre à ses premières tentatives automatiques et, en l’espace de quelques mois, crée un univers onirique d’une parfaite originalité. Jusqu’en 1929, c’est ce que l’on nommera l’époque des « fumées » : des paysages désolés s’emplissent d’apparitions furtives et naïves d’abord, de plus en plus précises, bien qu’impalpables, par la suite. En 1930, un voyage en Afrique du Nord passe pour avoir contribué à substituer à ces steppes ingrates de hautes falaises tourmentées. Quoi qu’il en soit, ce sont un peu plus tard des plages immenses qui apparaissent dans la peinture de Tanguy, où se pressent des objets indéfinissables bien que décrits de la manière la plus exacte (Jours de lenteur, 1937, musée national d’Art moderne, Paris).


Les méduses du naufragé

En 1939, Tanguy arrive aux États-Unis et, peu après, s’installe à Woodbury, où il vivra jusqu’à sa mort, ayant acquis en 1948 la nationalité américaine. Cette période correspond à une sorte de durcissement de sa peinture, qui perd de plus en plus ses allures évanescentes pour accuser les structures, en renforcer l’apparence minérale et en accroître la densité formelle (le Palais aux rochers de fenêtre, 1942, musée national d’Art moderne). Les éléments, au lieu de se trouver comme précédemment disséminés dans un espace trop vaste, accaparent au contraire une place de plus en plus importante, au point de se trouver bientôt si tassés les uns contre les autres qu’il en résulte une sensation d’étouffement, comme si à brève échéance l’air — ou la vie — allait manquer. C’est ce qui explique sans doute que les toutes dernières toiles (Multiplication des arcs, 1954, Museum of Modern Art, New York) semblent à la fois manifester que l’espace onirique de Tanguy a fait son plein des « êtres éternels du rêve » et que le peintre a achevé sa carrière terrestre. Son œuvre se dresse aujourd’hui devant nous, aussi mystérieuse qu’au premier jour, immobile, silencieuse, idéale.

J. P.

 Yves Tanguy : un recueil de ses œuvres (New York, 1964). / D. Marchesseau, Yves Tanguy (Filipacchi, 1973).

Tanis

Nom grec du site connu dans l’Égypte* pharaonique comme Djâné et auquel correspond aujourd’hui le bourg de San el-Hagar, dans la partie orientale du Delta, sur un bras du Nil auquel la ville donnait son nom.


Des fouilles considérables y ont été menées par Rifaud, agent du consul Bernardino Drovetti (1825), Auguste Mariette (1860-1880), Flinders Petrie (1884), Pierre Montet (1929-1956), puis Jean Yoyotte (à partir de 1965) ; sur ce tell immense, les recherches ont été consacrées surtout au grand temple d’Amon et à ses abords.