Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
T

tableau de bord (suite)

Précautions à prendre

Pour qu’un tableau de bord soit efficace, il faut respecter un certain nombre de principes. Des tableaux de bord trop complets ont parfois servi à décorer les murs du bureau du président et sont tombés en désuétude ; mieux vaut donc prévoir peu de chiffres, mais régulièrement consultés et tenus à jour. La rapidité d’information est également plus importante que la précision rigoureuse des chiffres. Les réalisations doivent toujours être confrontées aux prévisions. Fastidieux à lire, les tableaux de chiffres gagneront parfois à être présentés sous forme de schémas, de graphiques, sans toutefois en abuser : un recueil de 80 courbes est peu utilisable. Les indices sont plus faciles à percevoir que les chiffres bruts. D’autre part, un tableau de bord doit être aussi transportable, quitte à faire réaliser des agrandissements de certains tableaux lorsqu’on veut les utiliser lors de réunions. Subdivisé selon la périodicité de mise à jour utile, il doit être établi au minimum en deux exemplaires, destinés l’un à la mise à jour, l’autre au président. Enfin, certains chiffres, jugés intéressants à une époque, ne le seront peut-être plus ultérieurement ; d’autres manqueront. Le tableau de bord doit donc être revu, élagué et remanié périodiquement. Cette tenue à jour doit être systématique et intéresser tous les exemplaires de tableau existants.


Tenue

Parfois, les chefs d’entreprises aiment, au début, à manipuler eux-mêmes les chiffres pour remettre à jour leur tableau de bord, ce qui leur fait mieux prendre conscience du contenu de celui-ci et des évolutions. Ils en confient ensuite le soin à leur secrétaire ! Pour les entreprises importantes, c’est souvent le service de contrôle de gestion qui s’en occupe.

Il ne peut exister de tableau de bord type ; c’est à chaque dirigeant de préciser les rubriques et les chiffres qui lui seront utiles ainsi que la façon de les présenter. Les renseignements financiers sont assez uniformes, mais le tableau de bord ne doit pas se limiter à eux.

• Tableau de bord des cadres. Chaque responsable dans l’entreprise doit se constituer un tableau de bord qui lui permettra de mieux contrôler son action. Il sera plus simple que celui du dirigeant, puisqu’il concerne seulement une partie de l’entreprise. Dans l’établissement de ces tableaux de bord partiels, deux dangers guettent leurs auteurs : d’une part, faire un travail en double ; d’autre part, obtenir des chiffres non homogènes avec ceux des autres cadres. Lorsqu’il existe un service central de contrôle de gestion, le plus simple consiste à lui faire établir un certain nombre d’éléments communs, à charge par chacun de compléter soit par d’autres chiffres, soit par des présentations (courbes, graphiques, ratios), plus parlants pour son activité.

F. B.

➙ Direction / Fabrication / Gestion financière / Management / Prévisions et objectifs.

tabou

Dans les civilisations préindustrielles, caractère d’un objet, d’une personne ou d’un comportement qui le désigne comme interdit et dangereux aux membres de la communauté.



Horizons sémantiques

Le terme de tabou, emprunté au polynésien et qui a pour antonyme le mot noa (profane, ordinaire, accessible à tout le monde), désigne une défense, un interdit à caractère sacré, par exemple l’obligation d’éviter le contact avec un objet prohibé sous peine de devenir soi-même tabou ou l’interdiction de tuer ou de consommer un animal. Il exprime donc simultanément le rite négatif constituant la prohibition et la qualité de ce qui en est frappé. E. S. Handy précise qu’en Polynésie le concept de tapu (tabou) englobe deux notions : d’une part, ce qui est divin et qui doit être préservé de l’impur et du commun ; d’autre part, ce qui est impur, donc dangereux pour le commun et pour le divin.

Bien que Durkheim* et Radcliffe-Brown* aient souligné le risque de prendre pour terme générique une expression dialectale, son usage subsiste comme substitut général d’interdit. Néanmoins, l’extension du terme polynésien à toutes les institutions analogues observées par les ethnologues et classées par J. Frazer dans le Rameau d’Or en actes (relation sexuelle, inceste, interdit alimentaire, meurtre...), en personnes (chefs, rois, défunts, femmes en état de grossesse ou en menstruation, guerriers, chasseurs...), en choses (armes tranchantes, sang, cheveux, nourriture...) et en mots tabous (noms de divinités, de morts, de parents, d’objets impurs...), de même que les généralisations subséquentes d’autres auteurs, impose de distinguer entre la signification du terme dans le contexte polynésien d’origine, les sens qu’attribue chaque culture à des phénomènes relativement analogues, les élaborations théoriques de la notion dans le cadre de l’ethnologie religieuse en relation avec les idées de sacré, de totem, de mana, d’impureté et l’emploi générique du mot tabou comme substitut d’interdit ou de prohibition légale.

Au sens strict, le terme désigne les interdits dont la violation entraîne une impureté rituelle, alors que la transgression d’un interdit ordinaire n’est sanctionnée que socialement, par exemple par la réprobation, l’amende, l’incarcération, la mort. Les Mélanésiens des îles Saa et Ulawa différencient nettement l’ädi mwahulé, ou tabou commun imposé par les chefs et protégé par la loi, de l’ädi maaï, ou tabou surnaturel. Pertinente théoriquement, puisque beaucoup de peuples disposent de termes différents pour les concepts de tabou et d’interdit (miziro et mahano en Ouganda), la distinction rigoureuse est empiriquement impossible pour un certain nombre de prescriptions négatives qui ne sont pas tout à fait des tabous, ou seulement dans certaines circonstances (comme le remarque A. Kashamura, qui affecte d’un signe particulier ces interdits relevant des deux catégories), ou bien dont l’aspect d’obligation a perdu avec le temps sa dimension religieuse. La désuétude des systèmes de tabous correlle ainsi avec l’abandon de la foi religieuse ou magique, qui implique le doute quant à la connexion causale entre la violation d’un interdit et l’infortune qui suit l’infraction. Alors le « il est tabou d’entrer » signifie seulement « défense d’entrer ».