Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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symbiose (suite)

La fixation de l’azote libre par les Bactéries est soumise à plusieurs conditions ; outre la présence indispensable de sucres disponibles, il faut un milieu dépourvu de nitrates et d’ions ammonium (les engrais azotés sont plus nuisibles qu’utiles aux Légumineuses). L’oxygène, sans excès, est aussi nécessaire, mais, aux fortes teneurs, il bloque certains fonctionnements enzymatiques. La leghémoglobine, voisine de l’hémoglobine sanguine, semble fortement liée à la réaction : elle peut fixer l’oxygène, mais elle jouerait plutôt le rôle de transporteur d’électrons (oxydoréduction liée aux synthèses azotées) ; elle ne se forme que lorsqu’il y a réunion des deux symbiotes et elle s’accumule alors dans le cytoplasme des cellules hôtes ; en vieillissant (en automne chez les plantes annuelles), les nodules verdissent, et la transformation de la leghémoglobine en pigment vert correspond à la perte d’activité du nodule.

Les Légumineuses sont considérées à juste titre comme des plantes améliorantes, car l’azote fixé (de 50 à 300 kg par hectare et par an dans des champs ensemencés en Légumineuses) sert à la plante hôte, et, après la mort de cette dernière, les racines, en se décomposant (ou les parties aériennes, si elles n’ont pas été prélevées), enrichissent le sol et permettent des cultures ultérieures avides de produits azotés sans apport d’engrais. Mais, dès le début de l’activité des nodules, avant la floraison de la Papilionacée, des substances azotées exsudent des racines et sont utilisées par la flore d’accompagnement : les Graminacées voisines sont beaucoup plus développées et vigoureuses que les plantes témoins cultivées loin des Légumineuses dans un sol identique. L’emploi d’azote marqué permet de montrer que ces plantes se sont bien nourries des molécules ammoniacées, acides aspartique ou glutamique fraîchement synthétisés. Ce rejet peut être de 25 jusqu’à parfois 50 p. 100 de la production totale. On compte qu’une prairie bien équilibrée doit contenir un quart de Légumineuses pour que celles-ci favorisent la pousse des autres éléments. En 1960, la culture des Trèfles et des Luzernes a fourni au sol national 250 000 t d’azote, alors que la production d’engrais azoté en rapportait 550 000 t. Les zones semi-arides du globe devraient être favorisées par ces cultures. On connaît des phénomènes analogues dans d’autres groupes de végétaux. Par exemple, les Aulnes (Bétulacées) possèdent sur leurs racines des nodosités qui grossissent jusqu’à une dizaine de centimètres de diamètre et se lignifient. Le micro-organisme symbiotique est une Bactérie actinomycétale (Actinomyces alni) ; les échanges gazeux avec l’extérieur ont lieu à travers les lenticelles. Ici encore, on trouve des traces d’hémoglobine dans les nodosités. Le rendement est énorme, jusqu’à 500 kg d’azote par hectare et par an, et l’on observe une excrétion favorisant le développement des plantes associées (Pins par exemple). D’autre part, la chute des feuilles ramène au sol une part importante des substances organiques formées. L’Aulne est ainsi une plante pionnière intéressante, qui est capable de coloniser les terrains pauvres en humus (Alaska, éboulis alpins). Hippophæ rhamnoides (Éléagnacées) est une bonne plante fixatrice et fertilisante des dunes tant que les sujets sont inoculés. On connaît des symbioses du même type : Eleagnus sheperdia (Éléagnacées), Cæanothus (Rhamnacées), Myria, Coriaria, Casuarina et parfois le Café. Chez les Rubiacées tropicales, ce même rôle de fixation d’azote serait joué par des nodosités portées par les feuilles.


Associations entre deux végétaux

Des Algues bleues fixatrices d’azote peuvent s’associer avec de nombreux hôtes : des Hépatiques (Peleia), des Ptéridophytes (Anabœna azollæ sur Azolla), des Gymnospermes (Anabœna cycadæ sur le Cycas), des Angiospermes (Nostocs sur les Myrtales).

Mais l’exemple le plus remarquable de symbiose est fourni par les Lichens*. En effet, l’union d’un Champignon et d’une Algue constitue un ensemble si cohérent qu’on en fait un groupe à part dans la nomenclature au même titre que les Algues, les Champignons ou les Mousses. Dans la plupart des cas, les deux partenaires ne peuvent survivre isolés dans la nature, et il faut alors tous les soins d’un laboratoire pour les conserver indépendants, dans des conditions fort éloignées de celles qu’ils supportent habituellement.


Symbioses entre animaux et végétaux

De nombreuses espèces aquatiques possèdent des inclusions vertes, jaunâtres ou brunâtres que l’on peut identifier comme des Algues. Les animaux sont des Protozoaires, des Spongiaires, des Cœlentérés, et leurs symbiotes sont surtout des Zooxanthelles ou des Zoochlorelles. Ces dernières sont dans le cytoplasme, qui les tolère comme de véritables inclusions cellulaires. On a pu séparer l’animal de son symbiote en l’élevant à l’obscurité, au froid et dans une eau de composition minérale particulière ; à ce moment-là, l’animal pâlit ; mais il faut un long traitement pour que l’Algue soit définitivement éliminée. De tels animaux Protozoaires se laissent très vite réinfester par de nouvelles Algues : ils les absorbent dans des vacuoles digestives, dont les sucs sont impuissants devant la Chlorelle, qui, peu à peu, passe directement dans le cytoplasme ; l’Algue doit utiliser le CO2 et les déchets rejetés par l’animal, qui emploie l’oxygène, les vitamines et l’amidon élaborés par le végétal ; le Protozoaire peut, cependant, résorber l’excès de population de l’Algue, qui se multiplie fort bien dans ces conditions. Certaines Hydres vivent aussi en symbiose avec des Chlorelles ; des Turbellariés marins (Convoluta) sont associés à des Algues flagellées ; des Protozoaires, des Actinies, des Coraux, quelques Mollusques opisthobranches portent des Zooxanthelles qui s’attaquent aux déchets azotés.

Certains auteurs considèrent comme une forme de symbiose le mode de pollinisation* entomophile de quelques Angiospermes. L’Insecte se nourrit de nectar et de pollen, qu’il transporte d’une étamine à un stigmate, assurant ainsi la persistance de l’espèce. La spécificité entre l’Insecte et son hôte est très étroite dans de nombreux cas. Il y a parfois une stricte adaptation de la plante à son visiteur : la Sauge porte une sorte de pédale qui fait basculer l’anthère sur le dos de l’Insecte. La fleur d’Ophrys (Orchidée) ressemble à une femelle d’Insecte et, de ce fait, attire même les mâles. Chez Victoria regia, de petits Coléoptères visitent les fleurs ouvertes la nuit ; enfermés le jour, ils ne seront libérés que le soir, après s’être enduits du pollen des étamines mûres ; ils porteront celui-ci dans une autre fleur, où, peut-être, les stigmates seront réceptifs. On connaît également des pollinisations par des Oiseaux (Oiseaux-Mouches), par de petits Mammifères (Chauves-Souris) ou des Mollusques (Escargots). Chez le Yucca, un Insecte pond dans les fleurs des larves qui s’y développeront, mais, dans ses nombreux voyages, il pollinise avant sa ponte plus de fleurs qu’il n’en détruira, assurant ainsi sa reproduction et celle de son hôte. Un Hyménoptère cynipide (Blastophaga) est également responsable de la fécondation des Figuiers sauvages, dont il pollinise certaines fleurs en recherchant son lieu de ponte.