Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Straus (Oscar)

Compositeur autrichien (Vienne 1870 - Bad Ischl 1954).


Fils d’un banquier originaire de Mannheim, Leopold Straus, Oscar a une enfance heureuse et mène de front ses études classiques au lycée avec une instruction musicale due à son précoce talent artistique. Sur le conseil de Brahms, il entreprend l’étude du contrepoint et de la composition, et part en 1891 pour Berlin ; c’est là qu’il travaille particulièrement avec Max Bruch (1838-1920). Grâce à Johann Strauss*, il commence une carrière de chef d’orchestre de théâtre au cours de tournées provinciales qui l’entraînent notamment à Presbourg, à Mayence et à Hambourg. Ses premières chansons, qu’il compose en 1900 pour un cabaret de Berlin où il est pianiste, et ses premières opérettes, qu’il fait représenter en 1904 et en 1906 à Vienne et à Berlin, passent en partie inaperçues, et c’est seulement avec Rêve de valse (Ein Walzertraum), en 1907, qu’il acquiert la célébrité. Son mariage avec la cantatrice Clara Singer contribue à créer un climat affectif favorable à l’éclosion d’œuvres qui deviennent rapidement populaires. Son inspiration continue à évoluer, sous l’influence d’un séjour à Hollywood, jusqu’à la veille de la Seconde Guerre mondiale. En 1938, il est contraint d’émigrer et se réfugie d’abord à Paris, puis à New York, enfin à Hollywood. Après les hostilités, il se fixe à Bad Ischl, où il écrit ses huit dernières œuvres théâtrales, tout en acceptant de diriger dans un certain nombre de festivals étrangers.

C’est là aussi qu’il écrira, à quatre-vingts ans, la célèbre valse chantée du film de Max Ophuls la Ronde (1950).

Les œuvres d’O. Straus

• Une cinquantaine d’œuvres de théâtre (opérettes, opéras, singspiels), parmi lesquelles : les Joyeux Nibelungen (Die lustigen Nibelungen, 1904), Rêve de valse (Ein Walzertraum, 1907), la Belle Inconnue (Die schöne Unbekannte, 1915), Une nuit de bal (Ein Ballnacht, 1918), la Dernière Valse (Der letzte Walzer, 1920), les Perles de Cléopâtre (Die Perlen der Cleopatra, 1923), La Teresina (1925), Une femme qui sait ce qu’elle veut (Eine Frau, die weiss was sie will [d’après Louis Verneuil], 1932), Mariette ou Comment on écrit l’histoire (Sacha Guitry, Paris, 1928), Mes amours (A. Willemetz et L. Marchand, Paris, 1940), etc.

• Musique de film (une dizaine), 500 lieder de cabaret.

• Un certain nombre de chœurs, d’œuvres de musique de chambre, d’orchestre.

G. F.

 A. Bauer, 150 Jahre Theater on der Wien (Vienne, 1952). / F. Hadamowsky et H. Otte, Die Wiener Operette (Vienne, 1947).

Strauss (les)

Famille de musiciens autrichiens dont le nom est lié à l’histoire de la valse et de l’opérette viennoise.


Plusieurs de ses membres ont connu la gloire comme compositeurs de danses et de musique légère.

Johann Ier (Vienne 1804 - id. 1849), fils d’un aubergiste du misérable faubourg de Vienne, Leopoldstadt, vint à la musique en autodidacte. Orphelin de bonne heure, ce fut son beau-père, Golder, qui lui offrit son premier violon ; la fréquentation des « Heurigen » de Grinzing acheva de le convertir à ce genre léger, que cultivaient les orchestres de cabaret de la région viennoise. Grâce à ses dons naturels, Johann put entrer, après une année d’études, dans l’orchestre de danse de Michael Pamer comme altiste ; il avait alors quinze ans. C’est là qu’il connut Josef Lanner et se joignit à son quatuor avant de s’intégrer à l’orchestre que celui-ci fonda en 1824 et qui obtint rapidement la faveur des Viennois. Il composa pour cette formation instrumentale de nombreuses valses, des marches et des pots-pourris qui connurent un succès éclatant. Sa participation aux bals de la Cour, ses nombreuses tournées (1833-1838) en Europe centrale et à Paris, où Berlioz, Esprit Auber, Cherubini et le roi Louis-Philippe louèrent son talent, lui valurent à Vienne la consécration d’une renommée universelle ; Richard Wagner, qui l’entendit dans sa vingtième année (1833), le qualifia de « maître magicien ». Johann Ier a laissé 251 œuvres répertoriées : ce sont principalement des valses, mais aussi des polkas, des quadrilles et des galops.

Johann II (Vienne 1825 - id. 1899), fils du précédent, vint à la musique contre la volonté paternelle ; grâce à sa mère, qui l’aida, il prit secrètement des leçons de musique et devint rapidement aussi habile que son père ; l’accueil favorable que le public et la critique réservèrent à son premier concert, le 15 octobre 1844, fit de lui officiellement d’abord le rival, puis le successeur désigné de celui qui prétendait s’opposer à sa carrière. Avec l’orchestre qu’il avait fondé, Johann fit des tournées dans toute l’Europe, en Russie et même en Amérique (1872) ; à Vienne, il fut le chef attitré des bals de la Cour. En 1863, il abandonna son orchestre pour se consacrer à l’opérette, et le succès qu’il remporta dans ce genre rivalisa dans l’esprit du public avec la faveur que celui-ci accordait aux œuvres de Jacques Offenbach*. Si Strauss fut, ainsi qu’on l’a fort justement dit, « le roi de la valse », c’est sans doute parce qu’il sut lui donner un visage nouveau et lui faire parler un langage dont la syntaxe provenait en grande partie de la musique réputée « sérieuse ». Il ne dirigeait pas seulement ses propres œuvres ; il s’était rapidement imposé dans l’interprétation des œuvres classiques et romantiques ; c’est à ce titre qu’il dirigea notamment en 1856 Mazeppa de Liszt et qu’il fut le premier à faire entendre à Vienne, le 31 août 1861, d’importants fragments de Tristan et Isolde, dont Wagner lui avait fourni des versions orchestrales. Ses dernières œuvres témoignent d’ailleurs de l’influence que le maître de Bayreuth exerça sur l’évolution de son écriture.

Sa fécondité mérite d’être louée autant que sa grâce séductrice ; plus de 500 œuvres en témoignent, dont la plus grande part magnifie la valse ; les titres des principales d’entre elles sont célèbres : le Beau Danube bleu (An der schönen blauen Donau, 1867), Histoires de la forêt viennoise (G’Schichten aus dem Wienerwald, 1868), la Vie d’artiste (Künstlerleben, 1867), Sang viennois (Wiener Blut, v. 1871), Roses du Sud (Rosen aus dem Süden, 1880) ; mais ceux des polkas — Tritsch-Tratsch, Sous le tonnerre et l’éclair, Olga, Perpetuum mobile — ne le sont pas moins, ainsi que les brillants quadrilles sur des motifs empruntés aux opéras de Giacomo Meyerbeer, d’Halévy, de E. Auber et de G. Verdi (Un ballo in maschera).