Soudan (suite)
Un condominium anglo-égyptien (accords du 19 janv. et du 10 juill. 1899) fut établi au Soudan. Celui-ci constitua une union douanière avec l’Égypte et fut administré par un gouverneur britannique résidant à Khartoum. Les opérations de pacification contre les mahdistes durèrent jusqu’en 1900. Le Soudan fut ensuite modernisé sous le gouvernement de sir F. R. Wingate (1899-1916) ; le coton devint la grande richesse du pays. Pendant la Première Guerre mondiale, le développement de la demande de coton contribua à maintenir le loyalisme au Soudan, même lorsque la Turquie fut entrée dans le conflit et que le khédive fut déposé.
Cependant, le nationalisme couvait. Il ne fut pas étranger aux graves événements de 1924, marqués par l’assassinat du gouverneur du Soudan au Caire et une mutinerie à Khartoum. Les Britanniques s’efforcèrent d’abord de s’appuyer sur les mahdistes ralliés et les chefs, dont ils restaurèrent l’autorité (1927). Ils ne purent empêcher le développement de courants d’opposition, l’un en liaison avec les nationalistes égyptiens, l’autre se réclamant d’un nationalisme plus proprement soudanais. Après une période de prospérité (1924-1929), la crise économique vint alimenter le mécontentement. Le Graduates’ General Congress, modéré, créé en 1938 et transformé en parti Umma (« Communauté ») en 1943, fut débordé par le parti des Achiqqa (les « Frères ») ; dès 1944, l’administration britannique dut composer et accepter la création d’un Conseil consultatif du Nord-Soudan.
En fait, les problèmes du futur statut du pays se trouvaient déjà posés : celui du Sud, pénétré par les missions chrétiennes, et celui des liens avec l’Égypte. En 1946, E. Bevin annonça l’accession prochaine au self-government et, en 1948, Londres imposa une constitution en dépit des protestations égyptiennes. La querelle avec les unionistes, partisans de l’union avec l’Égypte, et avec les Égyptiens empira alors ; l’Égypte abolit unilatéralement le condominium, et Farouk fut proclamé roi du Soudan en 1951. Après le coup d’État au Caire en 1952, les partis soudanais fusionnèrent dans le National Unionist Party, dont le chef, Ismā‘īl al-Azharī (1900-1969), finit par imposer l’indépendance aussi bien à la Grande-Bretagne qu’à l’Égypte (1er janv. 1956).
Toutefois, le Soudan était déjà déchiré par les hostilités avec le Sud. Une première insurrection avait été réprimée dès 1953 ; une seconde éclata en juillet 1955 et se transforma en une guerre de quinze ans qui prit fin en février 1972. Elle détermina la fuite de milliers de Sudistes et de cadres et causa peut-être un demi-million de victimes. Elle affaiblit le régime, qui tomba sous la dictature militaire du maréchal Ibrāhīm ‘Abbūd de 1958 à 1964. En même temps grandissait une opposition communiste ; celle-ci réussit à susciter une insurrection générale en 1964, qui rendit le pouvoir à une coalition de militaires et de civils. Mais, écartés dès 1965, les communistes furent mis hors la loi. En 1969, un nouveau coup d’État plaça le colonel Gafaar el-Nemeyri (Dja‘far al-Nimayrī, né en 1930), chef d’un groupe d’officiers nationalistes, à la tête de l’État. Si le nouveau régime régla par accord la question du Sud, il acheva, en juillet 1971, l’élimination brutale des communistes et réprima très durement deux tentatives de putsch militaire (sept. 1975 et juill. 1976).
M. M.
R. L. Hill, Biographical Dictionary of the Anglo-Egyptian Sudan (Oxford, 1951). / K. D. D. Henderson (sous la dir. de), Making of the Modern Sudan. The Life and Letters of Sir Douglas Newbold (Londres, 1953). / K. M. Barbour, The Republic of the Sudan (Londres, 1961). / P. M. Holt, A Modern History of the Sudan (Londres, 1961 ; 2e éd., 1965). / J. H. Schultze, Ost-Sudan (Berlin, 1963). / J. H. G. Lebon, Land Use in Sudan (Bude, 1965). / R. O. Collins, Land Beyond the Rivers. The Southern Sudan, 1898-1918 (New Haven, 1971).