Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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sol (suite)

Les Azotobacter se présentent le plus souvent sous forme de gros cocci, remplis de granulations et capables de s’enkyster (forme de résistance) dans certaines circonstances défavorables. Certains sécrètent un pigment jaune-vert. Les Beijerinckia sont des bâtonnets qui ni ne s’enkystent ni ne sporulent et qui sont caractérisés par des granules polaires. Les uns et les autres peuvent être isolés et cultivés sur un milieu inerte (gel de silice) imprégné d’une solution saline contenant un substrat carboné adéquat, mais dépourvu d’azote combiné.

En anaérobiose, les Clostridium — et en particulier Clostridium pastorianum —, extrêmement ubiquitaires, rencontrés dans presque tous les sols, sont les agents majeurs de la fixation de l’azote moléculaire. Ils peuvent être cultivés dans les mêmes conditions que les précédents, mais en anaérobiose.

Les Bactéries qui vivent en symbiose avec les végétaux supérieurs sont essentiellement les Rhizobium symbiotiques de certaines espèces de la famille des Légumineuses*. Chacun des partenaires de cette symbiose est incapable d’utiliser à lui seul N2, et seuls les « nodules » formés au niveau des racines par pénétration des Rhizobium prennent une forme spéciale, dite « bactéroïde ».

Une technique récente, la réduction de l’acétylène en éthylène, a rendu beaucoup plus sensible la mesure du pouvoir fixateur d’azote des micro-organismes et a démontré que le phénomène était beaucoup plus répandu qu’on ne le pensait. Cette technique permet également d’apprécier le pouvoir fixateur global d’un échantillon de sol.

• Ammonification. Il est indispensable que l’azote organique provenant de la fixation ou encore des tissus végétaux morts ou des tissus animaux faisant retour au sol soit minéralisé. Étant donné que le terme final de cette minéralisation est l’ammoniac, ce deuxième chaînon du cycle de l’azote a reçu le nom l’ammonification. Alors qu’un nombre relativement restreint d’espèces bactériennes était capable de fixer l’azote moléculaire, c’est au contraire l’immense majorité des Bactéries du sol qui peut intervenir pour minéraliser l’azote organique. En effet, rares sont celles qui, lors de l’attaque des protéines, des peptides ou des acides aminés, ne libèrent pas de l’ammoniac. Le schéma chimique est, apparemment, extrêmement simple ; les plus grosses molécules sont attaquées par des exo-enzymes et rompues en molécules plus petites du type des protéoses. Ces dernières, par d’autres systèmes enzymatiques, sont ramenées à des molécules de poids moléculaires encore plus faible : polypeptides, peptides et enfin, acides aminés. C’est au niveau de ces derniers que se produit, par des mécanismes chimiques classiques et multiples, la désamination avec libération d’ammoniac et de divers autres corps selon le processus chimique de cette désamination. Quoi qu’il en soit, l’ammoniac va se trouver ainsi libéré dans le sol. Quel va être son devenir ? Une partie peut être utilisée directement par les végétaux, et en particulier par ceux qui sont porteurs de mycorhizes, c’est-à-dire qui vivent en association avec certains Champignons. Une partie va être réutilisée immédiatement par des Bactéries et par des Champignons pour revenir à la forme organique, donc « immobilisée ». Une partie est fixée dans le sol par échange de bases. Une autre partie peut se dégager dans l’atmosphère, en particulier lorsque le processus d’ammonification est brutal, et dans les sols alcalins, surtout si certaines façons agricoles sont mal utilisées (addition massive de fumier, d’engrais verts à rapport C/N trop bas...). Enfin, une dernière partie — et c’est celle qui est particulièrement intéressante dans la description du cycle de l’azote — va être oxydée par le groupement fonctionnel suivant, c’est-à-dire celui de la nitrification.

• Nitrification. Ici, le processus est le fait d’un nombre de micro-organismes toujours faible dans les sols et d’espèces extrêmement spécialisées. Ce processus d’oxydation est essentiellement aérobie ; il est donc particulièrement actif dans les sols bien aérés, de pH voisin de la neutralité, car les germes qui sont responsables sont très sensibles aux pH acides. Il se fait d’ailleurs en deux temps. Dans un premier temps, l’ammoniac provenant de l’ammonification est oxydé en nitrite sous l’action des Nitrosomonas. C’est le temps de la nitritation. Dans un second temps, les nitrites ainsi formés sont oxydés jusqu’à la forme de nitrates sous l’action des Nitrobacter. C’est le temps de la nitratation. Tous les organismes qui interviennent, qu’il s’agisse des Nitrosomonas ou des Nitrobacter, tirent leur énergie de l’oxydation soit de l’ammoniac, soit du nitrite et sont donc des chimio-lithotrophes. Cependant, on a décrit récemment un processus hétérotrophe de nitrification, mais on ignore encore son rôle effectif dans le milieu naturel.

Quel va être le devenir des nitrates ainsi formés dans le sol par nitrification ? La majeure partie, tout au moins dans les sols en bon état et avec des façons culturales correctes, va assurer la nutrition azotée des végétaux, soit de la végétation spontanée, soit des cultures implantées par l’Homme. Une partie va être perdue pour le sol, entraînée en profondeur par lixiviation lors des pluies ou encore vers les rivières et la mer par ruissellement, d’autant plus que, si l’ammoniac et les sels ammoniacaux se fixent sur le sol par échange de bases, les nitrates, eux, restent en solution dans l’eau libre du sol ; c’est une des raisons pour lesquelles ils peuvent s’éliminer aussi facilement. On a proposé, il y a quelques années, l’utilisation de substances chimiques freinant la nitrification pour diminuer ces pertes. Une dernière partie des nitrates va, dans certains sols mal aérés, être réduite : c’est le quatrième chaînon, celui de la dénitrification.

• Dénitrification. Le processus est complexe et rempli d’ambiguïté, car les spécialistes de la physiologie bactérienne opposent les organismes qui assimilent simplement les nitrates et ceux, au contraire, qui les réduisent par voie de dissimilation. De toute façon, un certain nombre d’enzymes sont en cause : les nitrates-réductases. Si la dénitrification peut aboutir, dans certaines conditions, à l’azote moléculaire, rares sont, cependant, les Bactéries qui ont un tel métabolisme, et, le plus souvent, les nitrates sont réduits jusqu’au stade d’ammoniac, avec, d’ailleurs, de nombreux corps intermédiaires possibles. En fait, c’est seulement le cas où l’azote moléculaire est libéré qui intéresse ici le microbiologiste du sol, puisque cet azote est perdu pour l’agronome, fait retour à l’atmosphère et boucle le cycle de l’azote.