Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

socialisme (suite)

Pietro Nenni

Il naît à Faenza en 1891. Fils de paysans, orphelin de père à cinq ans, il se révolte très tôt contre les injustices sociales et participe aux luttes révolutionnaires aux côtés de B. Mussolini. Combattant de la Première Guerre mondiale, il s’engage ensuite dans le socialisme le plus radical (1921). Rédacteur en chef (1922), puis directeur (1923-1925) de l’Avanti !, il est contraint d’émigrer en France où il devient, en 1931, secrétaire général du parti socialiste italien (PSI). Commissaire politique de la brigade Garibaldi durant la guerre d’Espagne (1936-1938), il est déporté par Mussolini en 1943. Après la libération, il devient officiellement secrétaire général du PSI ; un moment ministre des Affaires étrangères, il entre dans l’opposition avec les communistes ; son alliance avec ces derniers provoque la sécession du PSDI de G. Saragat (janv. 1947). Mais, après la crise hongroise de 1956, Pietro Nenni se rapproche peu à peu de l’aile gauche des démocrates-chrétiens. Cette « ouverture à droite » se heurte à l’aile gauche du PSI (Tullio Vecchietti), partisan d’un front populaire, mais finit par s’imposer. Le 5 décembre 1963, dans le cabinet de centre gauche présidé par Aldo Moro, P. Nenni, qui abandonne le poste de secrétaire général du PSI, devient vice-président du conseil, titre qu’il garde dans les deux formations gouvernementales suivantes. Le 30 octobre 1966, P. Nenni est élu président du parti réunifié (PSU). Une crise éclate après les élections de 1968, quand le PSU perd un million et demi de voix ; P. Nenni joue les conciliateurs entre les fractions du parti ; mais il ne peut éviter une nouvelle scission en juillet 1969. Ministre des Affaires étrangères de juin 1968 à juillet 1969, P. Nenni assure la présidence du PSI maintenu.

P. P.

Giuseppe Saragat

Issu d’une famille aisée, il naît à Turin en 1898. Il milite dans le parti socialiste italien dès 1922. Membre du bureau du parti en 1925, il doit s’exiler l’année suivante, en Autriche puis en France où il exerce plusieurs activités au service de ses idées. Rentré en Italie en 1943, arrêté par les Allemands, il échappe miraculeusement à la mort. Directeur, avec P. Nenni, de l’Avanti !, ambassadeur en France (1945-1946), il s’oppose ensuite aux dirigeants de son parti qui, sous l’impulsion de P. Nenni, s’engagent dans une collaboration étroite avec les communistes. Président de l’Assemblée constituante (1946-47) puis sénateur, il rompt avec P. Nenni et fonde le parti socialiste démocratique italien (PSDI), hostile à l’alliance communiste (janvier 1947) et dont il est le secrétaire général. Vice-président du conseil de 1947 à 1949 puis de 1954 à 1957, il devient, avec son groupe, l’arbitre de la politique italienne ; c’est lui qui, à partir de 1958, entraîne A. Fanfani vers « l’ouverture à gauche ». Le 5 décembre 1963, Aldo Moro peut former un cabinet de centre gauche où G. Saragat a le portefeuille des Affaires étrangères. Le 28 décembre 1964, G. Saragat, au 21e tour de scrutin, est élu président de la République italienne ; deux ans plus tard (30 oct. 1966), la Constituante socialiste réalise officiellement la réunification socialiste. Le 24 décembre 1971, G. Saragat est remplacé à la magistrature suprême par Giovanni Leone.

P. P.

M. V. et P. P.

➙ Communisme / Italie.


Le socialisme belge

Le parti socialiste belge est fondé le 5 avril 1885, à Bruxelles, par une centaine d’ouvriers représentant 59 associations diverses : ligues politiques, syndicats, coopératives, etc. Appelé parti ouvrier belge (P. O. B.), titre qu’il portera jusqu’au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, il voit ses statuts et son programme fixés par le congrès d’Anvers des 15 et 16 août de la même année. Le 13 décembre 1885, le P. O. B. lance un quotidien, le Peuple, vendu au prix de deux centimes.

Toutefois, ce n’est qu’au congrès de Quaregnon, en 1894, que le P. O. B. recevra sa charte (connue sous le nom de « charte de Quaregnon », confirmée au congrès de la Victoire, en 1945). Celle-ci réclame la socialisation des moyens de production, la suppression des classes sociales, l’émancipation économique, morale et politique du prolétariat.

Pendant les quelque trente années qui s’écoulent entre sa fondation et la Première Guerre mondiale, le P. O. B. combat pour l’amélioration des conditions de travail, le relèvement du niveau de vie d’une classe ouvrière fort misérable. Sa lutte principale porte cependant sur l’obtention, pour les travailleurs, des droits politiques par l’instauration du suffrage universel.

Le P. O. B. prend la tête de manifestations de masses dans les principales villes du pays (80 000 manifestants au grand serment de Saint-Gilles en août 1890 ; 160 000 manifestants dans les rues de Bruxelles le 15 août 1911) ; il organise des grèves importantes qui dégénèrent parfois en émeutes (Charleroi en 1885 et la grève générale d’avril 1913, qui immobilise 450 000 travailleurs). La répression sera sanglante.

Sous la pression du P. O. B. et des masses qu’il manœuvre, le gouvernement conservateur de l’époque est contraint, en 1892, à une première révision constitutionnelle. Le suffrage universel est acquis, mais avec des modalités qui en édulcorent la portée. Une voix supplémentaire est accordée aux électeurs censitaires, une autre encore aux pères de famille et aux porteurs de diplômes (loi Nyssens, 1893). La Belgique passe de 137 772 électeurs censitaires à 1 370 887 exprimant 2 111 217 suffrages. 28 députés socialistes entrent au Parlement après les élections d’octobre 1894.

En 1901, le leader socialiste Émile Vandervelde (1866-1938), président du Bureau socialiste international (B. S. I.), réclame l’adoption du suffrage universel pur et simple. Le gouvernement s’y oppose. Il y a de nouveaux troubles qui font encore des morts.

Une nouvelle révision constitutionnelle doit avoir lieu en 1914 lorsque éclate la Première Guerre mondiale, qui met fin aux luttes intérieures. Dès août 1914, Émile Vandervelde devient ministre d’État dans le cabinet d’Union nationale.

Au lendemain de la guerre, le suffrage universel est définitivement acquis sous la pression socialiste (1918-19) ; il sera étendu aux femmes en 1949.

Les socialistes, qui ont participé aux premiers gouvernements d’Union nationale, font voter d’importantes réformes sociales : journée des huit heures (1921), pension de retraite à soixante-cinq ans (1920), interdiction de la vente de l’alcool au détail.

À deux ou trois reprises, pendant l’entre-deux-guerres, le P. O. B. est représenté à la Chambre par le plus important groupe parlementaire. En 1925, une tentative de gouvernement « travailliste » est combattue par la haute finance, et le gouvernement doit capituler devant la fuite des capitaux et la chute verticale du franc belge.